Publié le 14 novembre 2015 à 21h16 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h44
La pluie de recours contre l’élection de Jean-Claude Gaudin à la présidence de la métropole Aix-Marseille-Provence est partie le 13 novembre au soir. Maryse Joissains, président de la Communauté du Pays d’Aix, maire d’Aix-en-Provence, a tenu à faire le point sur les actions en justice en cours et revenir sur les événements qui se sont déroulés le 9 novembre . Elle était entourée, pour l’occasion, par les maires -tous membres de la Communauté du Pays d’Aix (CPA)- qui ont déposé un recours : Hervé Fabre-Aubrespy (LR-Cabriès), Robert Dagorne, (LR-Éguilles), Roger Pellenc (DVD-Pertuis), Roger Meï (PCF-Gardanne), ainsi que Me Michel Boulan, maire (LR) de Chateauneuf-le-Rouge et avocat de la ville de Gardanne dans ce dossier et Gérard Bramoullé, premier adjoint à la ville d’Aix.
Me Michel Boulan revient sur les raisons qui ont poussé des élus à porter plainte: «Jean-Claude Gaudin a été un orfèvre dans cette affaire. Nous arrivons à un système où pour des communes telles Pertuis et Gardanne, il faut 20 000 habitants pour avoir un élu à la métropole alors qu’à Marseille il suffit de 7 500 habitants pour disposer d’un élu».
«La légèreté n’est pas de notre côté»
Le tribunal administratif a décidé sur cette base de suspendre deux arrêtés préfectoraux de septembre et d’octobre provoquant le renvoi de la réunion. «La légèreté n’est pas de notre côté, elle est du côté de ceux qui ont décidé de passer outre la justice». Précisant: «Sylvia Barthélémy, en tant que présidente d’EPCI, nous a convoqués, elle avait la liberté d’annuler la convocation. Elle l’a fait, en son âme et conscience, par SMS puis, par mail. Une réunion a eu lieu le lundi matin mais il ne s’agissait pas d’un conseil métropolitain, elle n’était pas destinée à appliquer l’ordre du jour et donc l’élection du président». Il en vient aux conditions du scrutin: «Nous avons là un florilège de ce qu’il ne faut pas faire. D’abord, le climat de violence, le micro coupé à Maryse Joissains qui doit se saisir de celui de Sylvia Barthélémy pour clore la réunion. Puis, Sylvia Barthélémy a fait monter Guy Teissier à la tribune. Si la première réunion n’était pas un conseil métropolitain, la seconde encore moins». «L’écart de voix, prévient-il,n’est pas le seul critère pour annuler une élection». Il insiste sur l’importance du retrait de Gaby Charroux, le maire de Martigues, en pleine séance, «il a considéré que les conditions n’étaient pas remplies pour se présenter».
«J’ai eu peur que l’annulation ne soit un traquenard»
Maryse Joissains explique les raisons qui l’ont poussée à demander la tenue de la réunion marseillaise en tant que doyenne des présidents d’EPCI : «J’ai eu peur que l’annulation ne soit un traquenard». «On ne peut pas, lance-t-elle, travailler avec des gens qui ont des comportements de voyous. Il y a urgence de repousser, comme pour Paris, la métropole à 2017. Parallèlement, nous allons pousser notre dossier de métropole du Pays d’Aix». Avant de considérer «Marseille doit être mis sous tutelle. Et Jean-Claude Gaudin, en n’obtenant que 119 voix sur 240, a fait la démonstration qu’il n’avait pas la majorité, qu’il n’était plus le leader». Robert Dagorne revient aux prémices de l’affaire : « Nous étions contre la loi Balladur, François Hollande, alors candidat, a affirmé que lui, élu, il annulerait le rapport Balladur. Tel n’a pas été le cas. Patrick Mennucci, se voyant maire de Marseille, voulait la métropole et le rapport s’est transformé en loi Lebranchu qui donne l’hégémonie à Marseille. Alors que nous, nous étions favorables au pôle métropolitain intervenant en matière de transport, d’environnement, de schéma de cohérence territoriale. D’ailleurs, sans les blocages de Marseille et de MPM un syndicat des transports pourrait fonctionner depuis trois ans». Roger Pellenc considère que cette métropole est «trop vaste», «trop technocratique» Et le pire, selon lui, «c’est que nous n’avons jamais été concertés, écoutés». Il assène: «Nous allons faire péter cette métropole». Tandis que pour Roger Meï n’ira pas par quatre chemins : «La métropole, c’est la nécropole des communes». «Qu’on ne vienne pas me faire croire qu’il y avait urgence à élire le président de la métropole puisque le décret du Conseil d’État délimitant les territoires n’est toujours pas paru. Les fonctionnaires n’ont rien à craindre, les entreprises n’ont rien à craindre, tout le monde sera payé», tient à préciser Hervé Fabre Aubespry Gérard Bramoulé conclura cette séance: «Nous contestons la métropole sur un plan économique, juridictionnel. Mais ce n’est pas cela le plus grave. Le vrai débat c’est que l’État de droit est en cause. Une assemblée illégitime provoque une élection. Dans quel monde juridique sommes-nous ?».
Michel CAIRE
Maryse Joissains demande le report de la mise en place de la métropole au Premier ministre
Dans deux courriers distincts adressés concomitamment vendredi 13 novembre au Président de la République et au Premier ministre, Maryse Joissains Masini, président de la Communauté du Pays d’Aix et maire d’Aix-en-Provence demande le report au 1er janvier 2017 de la mise en place de la métropole Aix Marseille Provence.
Revenant sur le déroulement, lundi 9 novembre, de la séance d’installation de cette métropole après la suspension par le tribunal administratif de Marseille de deux arrêtés inter-préfectoraux fixant le nombre et la répartition des sièges de l’institution créée au 1er janvier 2016 par fusion de six intercommunalité, Maryse Joissains Masini dénonce le «contexte surréaliste» de l’élection de son président. «Aussi, écrit-elle à Manuel Valls, en l’état de ces décisions de justice, qui ont considéré en particulier qu’il y avait urgence à suspendre les arrêtés du 1er septembre 2015 et du 12 octobre 2015 compte tenu de l’imminence de la séance et de l’atteinte qu’ils sont susceptibles de porter aux conditions de représentation des communes, il était nécessaire de reporter l’élection du président.»
«En effet, poursuit-elle, si le juge a considéré qu’il ne pouvait pas suspendre un acte préparatoire, en l’occurrence, la convocation, il est compétent pour annuler les actes pris à l’occasion de cette séance.»
«Dans ces conditions, l’élection qui a suivi sera certainement invalidée. De fait, le président de la métropole, élu par moins de la moitié du corps électoral, sera privé de la légitimité indispensable à assurer le succès de cette métropole et à répondre à ses enjeux», précise-t-elle dans son courrier à François Hollande.
Face à l’insécurité juridique liée à la décision de tribunal administratif, qui a saisi, via le Conseil d’État, le Conseil constitutionnel d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), « je vous réitère très solennellement, monsieur le Premier ministre, ma demande visant à différer la création de la Métropole Aix Marseille Provence d’une année en la renvoyant au 1er janvier 2017», écrit Maryse Joissains Masini.
Dénonçant auprès du Président de la République l’obstination du gouvernement à vouloir «imposer un projet dont la fragilité institutionnelle et technique, et désormais juridique, a été démontrée», le président de la Communauté du Pays d’Aix pointe «un mécanisme de péréquation inique» visant à «renflouer les caisses de ceux qui ont contribué à les vider depuis des années.»
«Dans l’avenir, cet échec annoncé sera le vôtre», prévient-elle. «Même les élus socialistes, il en reste, sont aujourd’hui déchaînés contre votre décision. Quant aux Marseillais, ils auraient préféré que le gouvernement prenne toute la mesure de la faillite de Marseille et y remédie par des moyens appropriés plutôt que d’y répondre par des solutions technocratiques hors-sol», ajoute-t-elle.
«Monsieur le président, poursuit-elle, la solution pour sortir de cet imbroglio et de ce qui pourrait un jour devenir une affaire d’État, serait que nous puissions en terminer avec cette métropole incapable de faire gagner Marseille mais dangereuse pour les territoires appelés à fusionner.»
Et Maryse Joissains conclut : «Au nom de la sagesse inhérente à votre haute fonction, je vous invite à saisir l’opportunité offerte par le contentieux juridique qui hypothèque ces lois MAPTAM et NOTRe pour étudier les solutions alternatives qui ont émergé au cours du débat. Je vous suggère à cette occasion de n’écarter aucune hypothèse, comme la possibilité de créer non pas une, mais deux métropoles dans le département afin d’éviter l’écueil de la création d’un objet institutionnel trop grand avec ses 350 0000 hectares pour plus de 1,8 million d’habitants, incapable de concilier urbanité et ruralité».