Publié le 27 avril 2016 à 21h51 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 15h14
Journée spéciale Opéra grand Avignon, en ce mardi 26 avril, sur les ondes de Radio-Classique. L’événement, sur la scène, c’était la seconde représentation de «Lucia di Lammermoor», l’opéra de Gaetano Donizetti. Un véritable catalogue d’airs plus connus les uns que les autres que cette composition d’une musicalité riche et dense. Pour incarner le rôle-titre, en l’absence de l’enfant du pays, Julie Fuchs initialement programmée, c’est la tchèque Zuzana Markova qui tenait le haut de l’affiche. Un rôle que nous avions déjà entendu chanter à Marseille, il y a quelques mois, et qu’elle retrouvait avec plaisir sur les bords du Rhône. Et une fois de plus, la grande et svelte soprano a fait valoir sa technique, son legato, sa puissance, imposant son chant avec aisance. Un regret, cependant, pour stigmatiser le peu d’émotion résultant de son jeu de scène. Certes n’est pas Natalie Dessay ou Patrizia Ciofi qui veut, mais nous avons regretté que la scène de la folie, notamment, remarquablement chantée, n’ait pas suscité le frisson, voire les larmes.
Aux côtés de Zuzana Markova, la Mezzo Marie Karall est une excellente Alisa, rôle qu’elle embrassait pour la première fois en Avignon. Chez les hommes, le duo Jean-François Borras, Eduardo, et Florian Sempey, Enrico, «envoie du lourd», comme on dit trivialement. S’il est parfois sur la corde raide, le ténor bénéficie d’une projection directe et assurée, d’une ligne de chant de qualité et d’une présence évidente. Belle présence scénique, aussi, pour le baryton Florian Sempey qui, lui aussi, prenait le rôle; d’un gabarit identique à celui du ténor, sa voix est bien placée, puissante et chaude. Julien Dran, en prise de rôle, est un Arturo de grande qualité et Alain Gabriel un inquiétant Normanno. La déception de cette production viendra du Raimondo de Ugo Guagliardo, en délicatesse avec sa voix. Là où l’on espère une basse assurée, sombre mais pas trop, nous avons eu un yoyo vocal entre une basse nasale, dans le masque, et des aigus dans la gorge. La mise en scène de Frédéric Bélier-Garcia fait ressortir la fragilité de l’héroïne, même si nous conservons les réserves énoncées plus haut, et les sentiments d’amour et d’égoïsme qui animent les uns et les autres. Comme à son habitude, le directeur musical Roberto Rizzi-Brignoli dirige avec une forte personnalité cette partition qu’il maîtrise parfaitement avec des tempi rapides qui nous ont fait frémir au premier acte car les décalages scène-orchestre étaient vraiment importants. Le maestro a repris ensuite son petit monde en main jusqu’à la scène finale de l’acte II qui manquait un peu de précision. Hormis ces petits problèmes passagers, le chœur s’en est bien sorti et le son vintage de l’orchestre fut plutôt plaisant pour cette interprétation.
Michel EGEA