Publié le 16 juillet 2016 à 1h02 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 15h29
Sur la scène une longue table recouverte de bouteilles vides, de verres, d’objets rappelant la boisson. Derrière elle, dans la pénombre, un homme laisse échapper des volutes de fumée. Il parle aussi, beaucoup, tout le temps, se présentant à nous en phrases syncopées, destinées à parler de sa vie privée comme de ses activités publiques. Et quelles activités…Une seule en fait. La même depuis 50 ans, qui consiste à chanter, en touchant un public aussi populaire que branché. Un demi-siècle de succès, de tubes, de concerts dans des salles pleines en délire, voire dans des stades de foot remplis d’aficionados en délire. Un parcours qu’il assume et dont il nous fait part durant plus d’une heure le temps d’un monologue assez poignant en fait, où se dessine en filigrane le portrait d’un homme seul, souvent accablé d’ennui et qui en souffre. Connu de tous, il est en matière d’idole de la chanson française, le King…et son prénom seul suscite une certaine forme de respect et d’hystérie. Il est là devant nous…Johnny Hallyday, qui se raconte sans fards, sans tricher, indestructible icône et homme fragile, dernière idole française et pas que pour les jeunes. L’entendre évoquer son accident d’auto durant lequel Sylvie Vartan faillit terminer défigurée, son addiction à l’alcool, la préparation de ses concerts nous scotche et nous émeut. Car pour incarner ce Johnny si proche, et si méconnu, la production de ce spectacle de théâtre a choisi Pierre-François Garel, acteur magique s’il en est, habitué à relever les défis, lui qui travailla avec l’exigent metteur en scène polonais Krystian Lupa, et qui possède une voix prenante. Peu intéressé en réalité par l’univers de Johnny, (lui son chanteur de prédilection serait plutôt Bashung, dont il connaît tout et notamment la genèse de «La nuit je mens»), Pierre-François Garel ne singe pas l’interprète de «Que je t’aime» mais en donne une vision tragique, personnelle, qui a pour fonction, d’interroger chacun sur la travail d’un artiste quel qu’il soit. Du coup il n’est pas Johnny Hallyday, mais tous les Johnny du monde sans trahir ni singer une des stars françaises les plus célèbres au monde. C’est absolument exceptionnel de densité et c’est un grand moment de théâtre mis en scène par Hélène François et Émilie Vandenameele, les deux auteurs de la pièce.
Jean-Rémi BARLAND
«La dernière idole » avec Pierre-François Garel. A voir jusqu’au dimanche 17 juillet à 22h40 à l’Artéphile dans le cadre du Festival Off d’Avignon. 5 bis rue du Bourg Neuf. Réservations au 04 90 03 01 90