Publié le 27 septembre 2016 à 17h14 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h45
Mise à feu réussie, samedi dernier, à La Criée : des centaines de visiteurs tout au long de la journée, le vernissage de la première exposition qui consacre la fonction d’accueil des arts plastiques du nouveau hall et Feu Chatterton pour… Mettre le feu ! Et Macha Makeïeff, la directrice du lieu, qui sourit : «En cinq ans j’ai concrétisé mon projet ; je suis heureuse.» Ce projet, elle l’avait défendu bec et ongle alors qu’elle postulait à ce poste et que certain(e)s tentaient de la détourner de son chemin en la poussant vers l’opéra, d’autres lui mettant des bâtons dans les roues. Mais il en faut plus pour déstabiliser la descendante aux yeux clairs d’officier russe. Pierre après pierre elle a concrétisé ce projet dans des conditions pour le moins difficiles puisqu’au-delà des jalousies il lui a fallu triompher des multiples travaux de restauration, rénovation et désamiantage.
«Ce théâtre reste un lieu de création, de prises de risques où l’on mise sur les artistes. Un lieu ouvert sur la cité, sur la jeunesse, sur les publics. Nous avons la chance de travailler avec Tiphaine Raffier, artiste associée qui, entre autres travaux qu’elle mène ici, fait de la médiation et anime de nombreuses répétitions publiques. Elle écrit aussi superbement pour la scène.» C’est avec la reprise de «Trissotin ou les femmes savantes» que Macha Macha Makeïeff a choisi de débuter la saison. «Oui, nous reprenons Trissotin après une tournée de 100 dates… Il y a de la demande, des jeunes qui veulent le revoir, des artistes enthousiastes qui veulent le jouer. J’y crois vraiment et je suis heureuse d’afficher nos créations. La tournée va se poursuivre jusqu’en mai 2017…» Un autre temps fort de la saison sera Karamazov, mis en scène par Jean Bellorini, qui fut un événement du dernier festival d’Avignon. Quatre heures et demi d’un spectacle mystique, cruel, musical. Du vrai théâtre de troupe qui saisit le spectateur d’entrée et l’emmène dans le récit.
L’adaptation de Jean Bellorini et Camille de la Guillonière est remarquable. Il y a aussi une autre pièce qui vient d’être créée aux Bouffes du Nord et qui mérite toute l’attention ; c’est Traviata, vous méritez un avenir meilleur. Du théâtre musical dans ce qu’il a de plus accompli avec Judith Chemla, une très belle artiste. Il y aura aussi Ubu avec Olivier Martin-Salvan, La Mouette de Tchekhov avec une mise en scène de Thomas Ostermeier, du cirque, de la musique, des spectacles pour enfants et de la danse avec, en juin 2017, la nouvelle création d’Angelin Preljocaj qui a vu le jour la semaine dernière à Aix-en-Provence. «Lorsqu’on a un artiste de la qualité d’Angelin Preljocaj à proximité et l’un des meilleurs plateaux pour la danse à sa disposition, ce serait fâcheux de passer à côté d’une collaboration. Si j’avais plus de moyens, je programmerais plus de danse. La danse apporte beaucoup au théâtre et le mélange des genres génère une fascination réciproque des artistes et de l’émulation.» Multi facettes, multiculturelle, multidisciplinaire : la saison concoctée pour La Criée par Macha Makeïeff ne manque ni d’intérêt, ni de personnalité. Elle est remarquablement équilibrée entre répertoire et création. A savourer sans modération.
Michel EGEA
Pratique. « Trissotin ou les femmes savantes » du 29 septembre au 7 octobre, Théâtre de La Criée, grande salle. Les jeudis, vendredi et samedi à 20 heures, le mercredi à 19 heures et le dimanche à 16 heures – Scolaires les 4 et 6 octobre à 14h15. Tarif plein : 25€ – Réservations : 04 91 54 70 54 – theatre-lacriee.com
Alain Boggero « voleur de flyers »
Pour la première exposition qui inaugure la programmation de son Nouveau Hall, La Criée présente le peintre Alain Boggero. À la fermeture des chantiers navals de la Seyne-sur-Mer où Alain Boggero travaillait comme charpentier-tôlier, l’artiste fait la promesse de peindre ses six mille collègues licenciés et crée ses œuvres sur tous les supports de récupération. En voisin, Alain Boggero découvre à La Criée les cartes postales joyeuses, tendres et colorées qui l’inspirent fortement. Surprenant «délicieusement» Macha Makeïeff, il en détourne des centaines qui deviendront une immense galerie de portraits d’ouvriers. Une œuvre foisonnante de cet artiste puissant et singulier à découvrir à La Criée jusqu’au 18 octobre du mardi au samedi de 12h à 18h et lors des représentations.