Publié le 11 octobre 2016 à 19h09 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 15h38
Dans le cadre de la visite à Tunis d’une délégation de parlementaires de l’Union Européenne, une rencontre d’une demi-journée a été organisée par la Délégation de l’Union européenne en Tunisie, l’Association l’Art Rue, en collaboration avec le Programme EUNIC de renforcement des secteurs culturels en Tunisie, en présence du Ministère des Affaires Culturelles (MAC) tunisien, autour de la société civile et de la Culture. Cette rencontre est la deuxième occasion de souligner l’importance du Programme de Renforcement de la Culture EUNIC, dont l’objectif est de répondre à un certain nombre de problèmes qui seront d’ailleurs soulevés par les participants et ayant fait en partie l’objet de plusieurs études. C’est aussi le seul programme qui soutiendra financièrement, par le biais d’appels à propositions, les opérateurs culturels en relation avec la société civile.
Cette rencontre s’est déroulée en deux parties : une première, planifiée officiellement, sous la présidence de Silvia Costa, Présidente de la Commission Culture du Parlement européen et modérée par Sofiane Ouissi, Directeur Général de l’Association l’Art Rue et une seconde, ayant eu lieu spontanément entre les opérateurs culturels et le MAC en présence de représentants de la Délégation de l’Union européenne en Tunisie et
d’institutions culturelles de pays de l’Union européenne, après le départ des parlementaires européens, afin de continuer le débat préalablement lancé
Discussion avec les Parlementaires européens (14h-16h) :
Dans son mot d’ouverture, Sofiane Ouissi, s’appuyant sur la résolution du Parlement européen du 14 septembre 2016 sur les relations de l’Union européenne avec la Tunisie, souligne la nécessité de donner une place plus claire et plus importante à la culture et au soutien des actions culturelles de terrain dans les relations UE-Tunisie.
Insuffisamment mentionnée dans la résolution, la culture est pourtant, selon les partenaires de la société civile tunisienne présents, cruciale pour la «consolidation démocratique», plusieurs fois mentionnée par la résolution. Afin de mieux refléter cet aspect, les professionnels présents proposent d’amender la résolution et d’y ajouter un 71e point qui traiterait plus spécifiquement des besoins de la Tunisie en matière d’actions et de politiques culturelles et qui viendrait compléter l’article 67 de la résolution qui traite de manière lacunaire de la Culture.
En réponse à ces observations de départ, les Parlementaires européens apportent les précisions suivantes:
-La résolution ne peut faire l’objet à ce stade d’un amendement, le vote de la résolution ayant déjà été effectué. Ils soulignent que le simple fait que le Parlement européen ait voté une résolution dédiée à la Tunisie est un soutien fort à la consolidation démocratique du pays et à l’ensemble des actions qui y participeront ;
-Le soutien à la Tunisie en général et à la culture en particulier fera l’objet d’initiatives futures. Ce soutien est un prolongement du cadre bilatéral entre l’Union Européenne et le MAC, qui couvre les quatre axes suivants : Maisons de Culture, Jumelage, Statut de l’Artiste et Renforcement des Secteurs Culturels via le Programme EUNIC ;
-Il existe actuellement plusieurs instruments/outils financiers européens pour renforcer les secteurs culturels et la Tunisie a la possibilité de participer à d’autres programmes Européens de soutien aux secteurs culturels tels que « Creative Europe », « Horizon 2020 » ou encore « 2018 – Année européenne du patrimoine culturel». Les diverses
possibilités de participation à ces programmes comme à d’autres seront approfondies par la Commission Culture du Parlement Européen et par le MAC, avec l’appui et le suivi de la Délégation de l’Union européenne en Tunisie.
Par la suite, les principaux points évoqués par les parlementaires et les participant sont été les suivants: Le rôle important de la Tunisie dans les enjeux méditerranéens, notamment dans la lutte contre la radicalisation. Le Parlement européen a donné son signal à la Commission Européenne, afin de considérer la Tunisie comme l’un de ses partenaires prioritaires. Il s’agit d’un partenaire en cohérence avec les valeurs de l’Union Européenne et la nature de la visite vise à renforcer les ponts économiques, culturels et humanitaires entre les deux parties.
La prise de contact avec la société civile favorise quant à elle l’échange d’informations et aura une bonne influence sur la prise de décisions stratégiques. Les parlementaires européens ont expressément encouragé la poursuite du dialogue avec la société civile tunisienne et la Délégation de l’Union européenne en Tunisie a été invitée à assurer les liaisons nécessaires à la poursuite de ce dialogue. Les membres du Parlement européen ont également mis l’accent sur la lueur d’espoir qui vient de la Tunisie, et souligné que le pays sert de modèle pour le monde arabe.
-L’importance de l’apport de la société civile pour faciliter l’adoption ou la mise en œuvre de reformes
L’ensemble des personnes présentes ont constaté les progrès impressionnants accomplis par la société civile tunisienne depuis la révolution et le rôle important qu’elle joue, surtout en périodes de conflits. Les membres présents du Parlement européen ont exprimé leur souhait d’être mieux informés des besoins et problématiques auxquels sont confrontés les acteurs du secteur culturel tunisien et de la société civile, tels que définis et exprimés par ces mêmes acteurs et ont encouragé la mise en place de lieux d’écoute consultative des acteurs du secteur culturel. Les membres de la société civile présents ont quant à eux exposé les principales difficultés auquel est exposé le secteur : insuffisances des infrastructures culturelles, incapacité des maisons de la culture à répondre aux besoins du secteur (accueil des jeunes, des associations/voir étude et recommandations Maison de Culture), insuffisance des ressources matérielles et humaines, absence de politique nationale culturelle claire, absence de soutien logistique ou morale des pouvoirs publics.
Silvia Costa souligne, avant de conclure, qu’aura lieu aux services du Parlement européen à Bruxelles, fin novembre 2016, une semaine dédiée à la Tunisie et que c’est «une autre occasion pour la société civile tunisienne d’être présente et de se faire entendre des institutions européennes».
Table-Ronde Société Civile Tunisienne (16h-18h)
Poursuivant le débat après le départ des parlementaires européens, les acteurs de la société civile tunisienne, ont eu l’occasion d’évoquer avec les représentants du MAC tunisien, de la Délégation de l’Union européenne et d’instituts de la culture de pays européens (British Council et Institut Français), les points suivants :
-Le cadre législatif des associations doit être revu afin de favoriser les actions des différents acteurs culturels de la Société Civile Tunisienne et d’empêcher toute entrave quant à l’obtention ou la gestion de subventions.
-L’impact du manque de ressources financières sur les ressources humaines des associations: par manque de moyens, les associations ont majoritairement recours au bénévolat et au volontariat, ce qui ne permet pas de structurer durablement les organisations, l’économie de la culture ou de renforcer les capacités des jeunes opérateurs culturels.
-L’importance pour la société civile culturelle de développer une nouvelle stratégie de collaboration avec le MAC et la nécessité de créer un mouvement, groupement ou coalition culturelle pour mieux définir les priorités du secteur et mieux les communiquer aux pouvoirs publics. Ce genre d’initiative sera une occasion de sortir un seul discours efficace et crédible vis-à-vis du MAC, de l’Union européenne ou de tout autre partenaire stratégique.
-L’absence de suivi donné par le MAC aux initiatives ou communications envoyées par des membres de la société civile. Plusieurs documents, résultats de recherche, propositions ont été envoyés au MAC mais n’ont jamais reçu de réponse.
-La nécessité pour le MAC de formuler une politique culturelle claire, donnant la réponse à la question : «Qu’offre la Tunisie culturellement aux citoyens tunisiens ? ».
En conclusion ces échanges ont été extrêmement fructueux et devraient initier une série de débats autour de l’état d’avancement de la culture en Tunisie, en présence de plusieurs acteurs. Toutes les parties présentes ont exprimé le souhait de poursuivre ce dialogue à travers une rencontre entre parlementaires tunisiens et société civile au sujet de la Culture, notamment avec les membres du Parlement tunisien qui sont également membres de la Commission parlementaire mixte UE-Tunisie. Enfin, la possibilité de mettre en place un groupe de réflexion mixte dans le cadre de la mise en œuvre du Programme EUNIC de Renforcement des Secteurs Culturels a été évoquée et ce, notamment afin de définir les objectifs des appels à propositions qui seront publiés dans le cadre du programme.
Association L’Art Rue – Dar Bach Hamba – 40, rue Kouttab Louzir – 1000 Médina de Tunis – Tél. : (+216) 71 323 315 – Plus d’info: lartrue.com