Publié le 30 mars 2017 à 15h00 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h45
Il ne restait pas beaucoup de places en vente, mercredi, pour la deuxième représentation de l’opéra de Bellini «I Capuleti e i Montecchi». Les amants de Vérone font toujours recette et, à Marseille, le bel canto aussi… Il faut dire qu’une fois de plus, après une production impériale de «Boris Godounov» il y a quelques semaines, le directeur de l’établissement lyrique marseillais, Maurice Xiberras, a réuni une distribution de très haut niveau pour servir le premier grand opéra de Vincenzo Bellini. A commencer par les deux protagonistes principaux du drame : Juliette et Romeo, incarnés par Patrizia Ciofi et Karine Deshayes. La première tisse son chant, note après note, comme une toile, avec précision. Sa voix est puissante et sensuelle, somptueuse dans les registres bas et médium et maîtrisée lorsque ça grimpe un peu dans la tessiture; une voix de soprano à maturité, émouvante, colorée, servant une présence scénique exceptionnelle. Et un succès de plus pour «la» Ciofi à Marseille. A ses côtés, Karine Deshayes se taille un triomphe dans le rôle de l’amant maudit. On savait que la mezzo affectionnait particulièrement cette incarnation mais, on ne pensait pas que ce serait à ce niveau de perfection. Une ligne de chant puissante, directe, souple et précise, lui permet d’imposer sans problème un Romeo de grande classe qui, pour être habile à l’épée, n’en demeure pas moins amoureux.
D’ailleurs, dans sa mise en scène, Nadine Duffaut se sert du héros travesti pour accentuer subtilement le côté sensuel et sensible de la relation entre les amants. Le chaud baiser des retrouvailles qui ponctue la deuxième scène du premier acte en est l’exemple parfait. Dans un décor sombre, en rouge et noir, la metteur en scène travaille sur les sentiments, sur les relations entre les uns et les autres et c’est plutôt réussi. Un mot sur la scène finale, sobre et émouvante, qui tire les frissons… Il faut dire qu’il est aisé de travailler avec de telles comédiennes, mais aussi de tels comédiens. Car le côté masculin du plateau n’est pas en reste au niveau de la qualité. Julien Dran incarne Tybalt avec conviction mais, surtout, avec une voix de ténor sans faille ; ligne de chant idéale, couleurs, tout était réuni pour qu’il se taille un beau succès : c’est fait. Dans le rôle de Capellio, Nicolas Courjal impose son côté sombre; la voix est toujours à la hauteur du rôle, servie par une maîtrise de tous les instants. De la belle ouvrage.
Enfin, dans le rôle de Laurent, Antoine Garcin est au-delà du simple comprimario avec une voix précise et limpide et un jeu assuré. Du côté des chœurs, seuls les hommes ont été sollicités et, comme à la bonne habitude, ils étaient parfaitement préparés par Emmanuel Trenque pour assombrir vocalement le drame… A la tête de l’excellent orchestre de l’Opéra, le maestro Carminati a livré une lecture vive et dense de la partition ; mention spéciale aux vents et, en particulier, à la clarinette solo. Sans oublier la harpe du côté des cordes et le cor chez les cuivres… Autant de raisons qui vous pousseront à aller apprécier cette production à l’occasion de l’une des deux représentations qui sont programmées. Vous ne le regretterez pas !
Michel EGEA
Pratique. Autres représentations les 1er avril et 4 avril à 20 heures.
Réservations : 04 91 55 11 10 ou 04 91 55 20 43 – opera.marseille.fr