Publié le 13 avril 2017 à 22h27 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 16h01
La présence de Nelson Freire sur un programme de concert est un gage de succès; à 72 ans, le pianiste brésilien est entré depuis longtemps dans le livre d’or de ceux qui caressent l’ivoire et l’ébène pour procurer du bonheur à leurs auditeurs. Pour sa troisième soirée, le Festival de Pâques avait décidé de lui adjoindre un directeur musical affichant 37 printemps de moins que lui, Jakub Hrůša, jeune chef tchèque, grand spécialiste de la musique de son pays natal et, en particulier, de Dvořák. Mais en cette soirée festivalière aixoise, à la tête du Bamberger Symphoniker dont il assure la direction musicale depuis l’automne dernier, c’est à Wagner, Beethoven et Brahms qu’il allait être confronté. Un des aspects les plus intéressants de la soirée était de savoir comment ce duo de maîtres Freire-Hrůša allait aborder et donner le concerto pour piano n°4 en sol majeur de Beethoven. Et si le jeune chef tenait la baguette avec assurance, c’est Nelson Freire qui imposait ses tempi et son jeu fluide et aérien, toujours très élégant, aux sonorités soignées. Une prestation de soliste soutenue par les cordes soyeuses et voluptueuses du Bamberger dirigé avec précision par Jakub Hrůša. De la belle ouvrage qui, à notre goût, a un peu manqué de sentiment et d’émotion… Léger reproche que l’on peut faire, aussi, à cette ouverture de «Lohengrin» qui, comme son nom l’indique, avait ouvert le ban de façon presque trop parfaite. En bis, Nelson Freire offrait l’une de ses pièces préférées pour cet exercice, «La mort d’Orphée» ou mélodie d’Orphée et Eurydice, de Gluck.
Restait la Symphonie n°4 en mi mineur de Brahms… Quarante minutes d’une musique chargée de tristes sentiments, quarante minutes de direction passionnée pour Jakub Hrůša qui pouvait ici laisser libre cours à sa vision des choses et à la lecture très personnelle qu’il fait de cette partition. Les goûts et les couleurs ne se discutant pas chacun a pu trouver du bonheur, ou à redire, au terme de cette interprétation. Le jeune chef exploite toutes les qualités des pupitres de son orchestre pour passer de la mélancolie à la puissance, pour mettre en couleur des sentiments parfois opposés, avec précision et rigueur. La mélodie lancinante du premier mouvement trouve sa profondeur dans la profondeur des cordes qui, du premier violon à la dernière contrebasse, sont lumineuses. Et la musique avance avec des vents limpides, des cuivres présents mais mesurés. Les soli sont justes et beaux, notamment celui de la flûte au dernier mouvement. Personnellement j’ai totalement adhéré à cette interprétation passionnée et, pour moi, passionnante. Et il faut croire que je ne suis pas le seul car le succès remporté par les instrumentistes et leur chef est allé au-delà de la simple estime. Du bonheur, un nouveau bonheur, au Festival de Pâques…
Michel EGEA
En attendant la première de Renaud Capuçon dimanche…
Riche programme pour le Festival en ce week-end pascal. Vendredi soir, La Passion selon Saint Matthieu devrait afficher complet. Mais il y a d’autres plaisirs à s’offrir ! Ainsi, samedi, trois rendez-vous sont proposés. A midi, la jeune pianiste italienne Beatrice Rana donnera les Variations Goldberg au Théâtre du Jeu de Paume. A 18 heures, à l’auditorium du conservatoire Darius Milhaud, Maxim Vengerov, Alisa Weilerstein et Seong-Jin-Cho joueront des œuvres de Schumann, Ravel et Chostakovitch. En soirée, à 20h30, l’Orchestre National de France et le chœur de Radio France donneront le Symphonie n°9 de Beethoven sous la direction de Christophe Eschenbach. Il n’y a plus de places pour le concert offert aux Aixois dimanche après-midi à Saint-Sauveur mais il en reste encore quelques-unes pour le concert de dimanche soir (20h30) au Grand Théâtre de Provence. On retrouvera Christoph Eschenbach, musiciens hors norme, capable un soir de diriger orchestre et de se lancer le lendemain au piano dans un concert de musique de chambre. Avec Renaud Capuçon, il interprète Le Printemps de Beethoven, l’une de ses sonates les plus enjouées. Rejoint par Alisa Weilerstein, violoncelliste virtuose venue de New York et par Gérard Caussé, invité régulier du festival, ils font vibrer les sons enchantés du Quatuor pour piano et cordes n°1 de Mozart, au discours volubile et aux couleurs moirées. Enfin, ces musiciens d’exceptions se réunissent autour de La Truite de Schubert, chef-d’œuvre joyeux d’un compositeur âgé de 22 ans à peine.
Réservations: 08 2013 2013 – festivalpaques.com