Publié le 17 novembre 2017 à 18h30 - Dernière mise à jour le 9 juin 2023 à 21h51
Le nom des Malacarne est indissociable de l’histoire du Ruhl-Plage, car depuis sa création en 1920, un membre de cette famille a toujours géré cet établissement.
La rencontre
Henry Ruhl, un Suisse, naturalisé britannique, arrive à Nice en 1900 à l’âge de 18 ans. C’est la belle époque où l’on peut investir facilement par le recours à l’emprunt. En 1913, il inaugure le fameux hôtel de 200 chambres, l’un des plus luxueux du moment et lui donne son nom. Il en confiera la gestion à son directeur, Monsieur Martinez.
En Italie à Piacenza, Alfred Malacarne, fils de maçon, est obligé de quitter le pays après avoir séduit une fille d’une noble lignée. En ce temps-là, on ne badinait pas avec la mixité sociale. Le voilà donc expatrié à Nice où il exerce l’activité de ce que l’on nomme en niçois un «Bocha», c’est-à-dire un apprenti maçon. Il pratiquait la lutte gréco-romaine à un haut niveau. En tant que sportif, il avait créé en 1904, avec son frère Charles et une bande de copains, l’OGCN, plus communément appelé le GYM, Robert Malacarne, son petit-fils, nous montre un porte-clefs en or, cadeau du club pour la commémoration des cinquante ans. Mais très vite, d’autres aspirations professionnelles le motivent et il décide de changer de métier pour devenir portier au palace de l’Hôtel Ruhl. Une véritable révolution promotionnelle. Le «patron» de l’hôtel, Monsieur Martinez, propose à Alfred Malacarne d’ouvrir la première plage d’hôtel: «le Ruhl-Plage».
L’investisseur
Monsieur Martinez, estimant cet établissement peu rentable décide de céder la plage. En 1923, Alfred se porte acquéreur. Mais, le prix à payer est de 20 000 francs de l’époque. Sa femme, Carmen vend son bistrot «La Cave Niçoise» au 5, rue Masséna, pour devenir propriétaire. C’est la période de la transformation de la Promenade des Anglais et de la structure de la plage. Mais, la guerre met fin à cette belle aventure, les Allemands réquisitionnent, son fils, Alphonse, négocie 48 heures pour tout débarrasser. La plage devient un dépôt de munitions que les occupants font sauter lors de leur départ.
Alphonse, le fils : le Maître d’œuvre.
Après la guerre, la relève est assurée par le fils Alphonse qui achète les Bains de la Plage pour le franc symbolique, puis le Gallion et l’aquarium. C’est l’époque où la famille Malacarne gère en permanence au moins 2 plages. Dans les années 50-55, Alphonse qui exerce le métier de constructeur se porte acquéreur du Ruhl-Plage, avec son associée, Mademoiselle Émery, pour un million de francs mais, l’État exerce son droit de préemption et la transaction n’aboutit pas. Alphonse abandonne le métier de constructeur pour prendre la suite de son père et développe le Ruhl-Plage en le modernisant et en créant le restaurant. C’est l’époque de l’attribution des plages de gré à gré.
Claudine et Robert, les petits-enfants : la continuité
Robert, à son retour du service militaire, dans les années 75, rejoint son père et Claudine, sa sœur qui n’a jamais quitté la plage. Avec le père, ils forment un trio exigeant pour la satisfaction de la clientèle. Alphonse, arrive toujours le premier sur la plage, il a l’œil et rien ne lui échappe du haut de son fauteuil. Mais comment s’affirmer, alors que le père est omniprésent. Un matin, Robert décide d’arriver avant son père et continuera ainsi, jusqu’au moment où son père accepte l’idée que la relève est assurée. Aujourd’hui, Robert et Claudine sont bien conscients, qu’ils ne sont pas propriétaires, puisque, depuis la loi sapin, ils doivent satisfaire les exigences de la DSP tous les 15 ans. La prochaine aura lieu en 2019 et Les Malacarne, avec leur relève, espèrent fêter les 100 ans du Ruhl-Plage en 2020.
La Relève : Les arrières petit fils
Même si Claudine et Robert sont toujours les gardiens du temple, l’épouse de Robert, Marie-Jo et leurs 3 enfants Fabien (27 ans), Thibaud (21 ans) et Romain (14 ans) assurent la relève. Notamment Fabien qui travaille dans la finance à Paris, se préoccupe du développement de la plage en s’orientant dans la direction des congrès.
Les anecdotes
Robert et Claudine sont inépuisables sur les personnalités qui ont fréquenté l’établissement. Ils ont sélectionné trois anecdotes.
Madame Cohen:
Pendant la guerre, la plage était ouverte au public jusqu’en novembre 1943 et un jour la milice est arrivée de façon inopinée pour réaliser un contrôle. Madame Cohen avait pour habitude de vendre des lunettes et pour les exposer, les mettait sur ses bras tout en déambulant sur les galets. Pour elle, la milice, c’était le désastre. Elle ne savait que faire, était terrifiée et transpirait à grosses gouttes. Alphonse, le père de Robert, n’écoutant que sa fibre patriote, lui enleva toutes les lunettes, la prit par le bras et ils sortirent tous les deux sous le regard inquisiteur des miliciens. C’est alors qu’Alphonse eut cette réplique salvatrice : «Hé bien messieurs, vous avez fait peur à ma femme, vous voyez dans quel état vous l’avez mise !» Longtemps après, Madame Cohen a souvent raconté cette histoire à Robert et Claudine avec beaucoup d’émotion.
Le tigre peureux
Comme le casino Ruhl est à proximité de la plage, l’un des responsables avait eu la bonne idée promotionnelle de faire un tour sur la plage avec un tigre et des danseuses tout emplumées. Arrivée majestueuse sur la plage avec le tigre tenu en laisse pas son dompteur. C’était sans compter sur la présence d’un chat qui avait élu domicile dans l’établissement et qui entendait bien défendre son territoire. À la vue de ce chat, le tigre prit peur, échappa à la vigilance de son maître et rejoint la plage. Panique à bord ! C’est ainsi que Robert et son père figés, virent passer devant eux le tigre qui finit son escapade en haut des escaliers où le dompteur l’attendait.
La première plage de la Côte d’Azur aux seins nus.
Dans les années 70, Saint-Tropez avait lancé la mode du Topless. Mais ce qui était toléré dans le village de prédilection de Brigitte Bardot n’avait pas encore franchi les limites du Var. Un jour de l’année 1972, trois jeunes filles se posent sur les transats de plage et enlèvent le haut de leur maillot. Alphonse Malacarne, regarde avec intérêt la scène et téléphone au Maire de l’époque pour lui narrer la situation. Jacques Médecin lui répondit: «Si c’est beau, laissez-les !» C’est ainsi que le Ruhl devint la première plage de la Côte d’Azur à accepter les seins nus. Claudine Malacarne ajoute que Jean Pierre Marielle et Michel Constantin, qui tournaient un film à la Victorine, sont arrivés sur la plage et leur première question fut : «Où sont-ils ?». Les Malacarne sont intarissables. Ils ont toujours, comme principe, le respect du client avec un service irréprochable, le tout teinté d’une attention toute particulière pour ceux qui choisissent leur plage. C’est leur recette, depuis presque un siècle !
Rhul Plage – 1, promenade des Anglais – 06000 Nice – France
Tél: +33 4 93 87 09 70 – Plus d’info: ruhl-plage.com