Publié le 16 novembre 2017 à 20h45 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 17h47
Alice Zeniter : enfin la victoire ! Avec cinq nominations sur les listes des prix littéraires les plus prestigieux, le Goncourt, le Renaudot, le Femina notamment, Alice Zeniter partait dès les premières sélections vers une victoire. Elle vient d’avoir le prix Goncourt des Lycéens, dont elle se réjouit « car, dit-elle, ces lycéens ont la réaction que j’ai eu à leur âge, je voulais comme eux m’approprier un passé sur lequel planait des non-dit. Toute personne a droit à l’histoire de sa famille« .
Fille de harki de troisième génération, Alice Zeniter dit avoir elle-même « cherché lorsqu’elle était adolescente la signification du mot harki dans le Larousse, faute d’avoir de ses proches une explication claire. C’était en 1990, pendant la décennie noire. » Cette quête de l’authenticité est le moule dans lequel s’est construit son livre « L’Art de Perdre« , superbe fresque familiale qui cours sur trois générations. Des montagnes arides et sauvages du fin fond de la Kabylie dans les années 1930 elle court jusqu’au Paris d’aujourd’hui déroulant, en trois temps, sa force romanesque sur 500 pages addictives. C’est l’histoire d’une femme Naîma, jeune citadine, qui s’interroge sur l’histoire de sa famille, sur le sens du mot « harki », sur la vie qui a été celle de son grand-père Ali, de sa grand-mère, sur les non-dits qui entourent toutes ces vies aujourd’hui disparues, bringuebalées par les remous de l’Histoire, de ces hommes qui ont dû un jour faire un choix. Il y a chez Alice Zeniter un talent éclatant pour construire cette fresque qui reste lumineuse malgré toute la rudesse de la guerre, des temps passés, des épreuves traversées.
Christine LETELLIER
Avec 400 000 livres vendus en moyenne, ce prix littéraire est le plus convoité sur la période
Le choix des lycéens signe la trentième édition de ce prix qui, au départ, était un simple challenge : comment redonner le goût de la lecture aux jeunes, aux lycéens démotivés? Sans surprise, les sondages de l’éducation nationale montraient une désaffection notoire ! A ce constat s’est ajouté celle des libraires. Et c’est finalement tous ensemble avec l’accord de l’Académie Goncourt qu’a été créé le prix Goncourt des Lycéens qui ouvre, chaque année, à 2000 d’entre eux, en différentes régions et villes, l’opportunité de donner leur opinion, leur « note » aux livres de la première sélection faite par le jury du Goncourt, soit 15 livres cette année.
Durant deux mois les élèves de 56 lycées de plusieurs villes et régions ont planché, ont eu la possibilité d’échanger avec des auteurs lors des rencontres organisées par la Fnac. Il ont finalement choisi pour cette trentième sélection Alice Zeniter. En trente ans, ce prix est devenu un vrai succès au point d’être l’un des plus convoité parmi les Prix de la rentrée. Et pour cause, un Goncourt des Lycéens, c’est en moyenne 400 000 milles livres vendus ! Les lycéens en sont les premiers heureux : « C’est formidable la responsabilité et la confiance qu’on nous donne ; élire un auteur dont le prix va changer sa vie, c’est pas rien », résume une lycéenne. Il y a aussi dans ce prix littéraire, un côté stimulant pour les lecteurs-acheteurs qui regrettent souvent que tel ou tel livre n’est pas été primé. Cette année, avec une sélection de quatre femmes auteurs, les lycéens ont clairement affiché qu’il était temps de donner aux femmes leur place dans ce marathon des Prix de la Rentrée, les quatre plus prestigieux ayant récompensé des hommes.
Ch.L.