Vieux Nice: la fin des pépins avec la Maison Bestagno

Publié le 11 décembre 2017 à  18h47 - DerniÚre mise à  jour le 28 octobre 2022 à  17h50

Avec un brin de nostalgie, nous nous sommes rendus dans cette institution Niçoise qui est appelĂ©e Ă  fermer ces portes dans quelques jours. C’est la Maison Bestagno qui depuis 1850 est la rĂ©fĂ©rence en matiĂšre de parapluies, ombrelles et cannes. Avec une extrĂȘme gentillesse, Henri Bestagno, dit Gino, nous accueille dans son temple situĂ© dans le vieux Nice, au 17 rue de la PrĂ©fecture.

C’est avec l’ñme d’un conteur que Gino nous Ă©voque son passĂ©

Henri Bestagno, dit Gino devant son temple situé dans le vieux Nice (Photo PRO)
Henri Bestagno, dit Gino devant son temple situé dans le vieux Nice (Photo PRO)

Cela fait 50 ans qu’il a repris le flambeau de cette famille, crĂ©ateurs de parapluies. Pour faire bref, l’histoire ne remonte pas Ă  l’an pĂ©pin, mais en 1850, du temps oĂč Nice n’était pas encore française. Son grand-oncle, Felipe Colombo, venait Ă  pied du lac majeur jusqu’à Nice pour vendre des parapluies. Il Ă©tait un « ombrellaio ambulante », ce devait ĂȘtre un homme d’affaires remarquable puisqu’il achĂšte, en 1850, les quatre Ă©tages du 17, rue de la prĂ©fecture. Mais l’appel de l’aventure est plus fort que tout, il part en Argentine et c’est sa femme, une fille Bestagno, qui prend le relais. Ce relais sera passĂ© successivement, en 1900, au neveu MattĂ©o qui le transmet Ă  son frĂšre Augustin en 1929, pour le donner en 1967 Ă  Gino.

Depuis l’ñge de 7 ans, il en a fabriquĂ© des parapluies, Gino. Cela se dĂ©roulait au premier Ă©tage, avec deux ou trois employĂ©s et faisait Ă©galement travailler de nombreuses familles Ă  domicile. Mais, les coĂ»ts de production deviennent trop importants et en 1970, Gino dĂ©cide d’arrĂȘter l’atelier et de se fournir dans les deux principales usines françaises. À Saint-Claude dans le Jura, la Maison Vaux fondĂ©e en 1920, par Pierre Vaux dont le slogan est l’Art de l’élĂ©gance fait main et Ă  Aurillac, dans le cantal, chez Piganiol qui, depuis 1884, transmet des gestes de fabrication et un savoir-faire sĂ©culaire. À ce titre, le ministĂšre de l’Économie lui a d’ailleurs dĂ©cernĂ© depuis 2012 le label : « Entreprise du Patrimoine Vivant ».

Depuis l’ñge de 7 ans, il en a fabriquĂ© des parapluies (Photo PRO)
Depuis l’ñge de 7 ans, il en a fabriquĂ© des parapluies (Photo PRO)

La fabrication du parapluie n’a pas trop Ă©voluĂ©, l’objet est travaillĂ© comme Ă  sa crĂ©ation: d’abord couper le tissu, assembler les pointes, assurer plusieurs phases de piquage, rĂ©unir tous les Ă©lĂ©ments et ensuite donner la forme, grĂące Ă  un fer vapeur spĂ©cial, toute la nuit. Chaque matin, le premier travail des ouvriers consiste Ă  fermer les parapluies. Donc la fabrication requiert de nombreuses opĂ©rations manuelles, le seul changement, c’est la dĂ©coupe au laser.
Dans le temps, on comptait comptait 4 magasins Ă  Nice et tout le monde travaillait, mais les Chinois et les grandes surfaces ont plombĂ© le marchĂ©. Les vendeurs Ă  la sauvette sortent comme les escargots les jours de pluie et aujourd’hui, le commerce traditionnel est en train de mourir. Par voie de consĂ©quence, ce n’est pas quand il pleut que Henri Bestagno vend le plus de parapluies. Heureusement, la clientĂšle Ă©trangĂšre est toujours prĂ©sente pour le beau parapluie. La Maison est connue dans le monde entier. Pendant notre visite, un colis partait pour Chicago avec quatre parapluies.Gino a servi de nombreuses cĂ©lĂ©britĂ©s, parmi elles : Galabru, Belmondo, Brigitte Bardot et du temps de la Victorine, c’était fabuleux.

Un regain pour les ombrelles

Gino a confectionné toutes les ombrelles pour le mariage du Prince Albert (Photo PRO)
Gino a confectionné toutes les ombrelles pour le mariage du Prince Albert (Photo PRO)

Les dermatologues recommandent Ă  certains de ne pas s’exposer au soleil d’oĂč l’ombrelle, fabriquĂ©e avec un tissu anti UV. C’est le mĂȘme principe que le parapluie, mais en plus petit. Gino a confectionnĂ© toutes les ombrelles pour le mariage du Prince Albert. MichĂšle Laroque lui a demandĂ© de rĂ©aliser les ombrelles pour son dernier film qui se dĂ©roule Ă  Nice. Gino a crĂ©Ă© des parapluies aux motifs originaux comme la Baie des Anges, le vieux Nice ou les chaises bleues et l’on peut commander un parapluie personnalisĂ©.
Les chaises bleues (Photo PRO)
Les chaises bleues (Photo PRO)
La baie des anges (Photo PRO)
La baie des anges (Photo PRO)

La maison Bestagno ne fait pas de publicitĂ© car elle est connue dans le monde entier. En 167 ans, cette maison a fait valoir la qualitĂ© française et notre belle ville de Nice. C’est avec un pincement au cƓur, que Gino tire sa rĂ©vĂ©rence en mettant un terme Ă  sa passion. Sa satisfaction c’est que ce local de 30 mÂČ continuera d’ĂȘtre occupĂ© dans une autre activitĂ©, un artisan devrait s’y installer… Nous n’en saurons pas plus.
Son plus beau souvenir, indique-t-il: «La gentillesse des clients dans le monde qui sont devenus des amis.» Pendant notre rencontre, une charmante dame, avec l’accent anglais, est venue pour offrir un prĂ©sent Ă  Gino : une reproduction de la devanture.
Quant Ă  nous, nous pensons que Gino a dĂ» ĂȘtre un bon fournisseur pour le « Paradis», car il nous revenait en mĂ©moire la chanson de Brassens : «Un p’tit coin d’parapluie/Contre un coin d’ paradis.» Alors, un conseil, si vous souhaitez faire un beau cadeau de NoĂ«l, il suffit de se rendre au 17, rue de la PrĂ©fecture. la Maison est encore ouverte jusqu’à la fin dĂ©cembre.
|Le plus grand modĂšle : Le parapluie du berger ou du charretier.
(Photo PRO)
(Photo PRO)

Voici ses caractĂ©ristiques : une tige en bois de hĂȘtre, 130 centimĂštres de diamĂštre, constituĂ© par 9 baleines en jonc. Il est fabriquĂ© artisanalement pour s’abriter du soleil, de la pluie et surtout il est anti foudre, son coĂ»t 185 €, il ne casse jamais. De toutes les façons, si vous avez un pĂ©pin, la rĂ©paration est gratuite pour tous vos achats.|

Paul OBADIA correspondant Ă  Nice pour Destimed

Et comme Gino connaßt le vieux Nice nous lui avons demandé de nous indiquer ses lieux de bouche préférés.
-Acchiardo : 38, rue Droite, 06300 Nice téléphone : +33 4 93 85 51 16
-Marcel Bistrot Chic : 11, rue de l’Abbaye 06300 Nice +33 (0)4 97 20 14 84
-Le Maquis : 7, rue de L’Abbaye, 06300 Nice +33 4 93 01 27 05
-Les Grandes Caves Caprioglio : 16, rue PrĂ©fecture, 06000 Nice tĂ©lĂ©phone : +33 4 93 85 66 57. Maison Bestagno 17, rue de la PrĂ©fecture 06300 Nice 04 93 80 33 13 ouvert jusqu’à fin dĂ©cembre 2017

La devanture de la Maison Bestagno revue par une artiste-peintre (Photo PRO)
La devanture de la Maison Bestagno revue par une artiste-peintre (Photo PRO)

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