On a vu au Grand Théâtre de Provence à Aix : Urbanski, Lisiecki et l’Orchestre de Lyon en accord majeur

Publié le 10 février 2018 à  22h28 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  13h46

Le chef d’orchestre polonais Krzystof Urbanski  © Caroline Doutre
Le chef d’orchestre polonais Krzystof Urbanski © Caroline Doutre
C’était le samedi 26 mars 2016, lors du Festival de Pâques d’Aix-en-Provence. A la tête du NDR de Hambourg, le chef d’orchestre polonais Krzystof Urbanski achevait son concert qui avait débuté avec Thomas Hampson, par une 10e Symphonie de Chostakovitch qui fit chavirer de bonheur et d’émotion le Grand Théâtre de Provence (GTP) archicomble d’ailleurs pour l’occasion. Perfection sonore, dialogues de tous les pupitres, les spectateurs découvraient un jeune artiste d’exception qui, né en 1982, ne cesse depuis de mener une carrière internationale. Retour aixois pour le chef, ce vendredi soir, dans le même GTP. L’orchestre national de Lyon remplaçant cette fois les musiciens allemands, la soirée s’annonçait tout aussi festive. L’Ouverture de «La flûte enchantée» proposée en début de concert (c’est une tradition chez la formation lyonnaise de commencer un concert par un prélude d’opéra), confirmait la précision déjà observée avec laquelle Urbanski conduit généralement les débats. Puis, ce fut l’instant que tout le monde attendait avec l’arrivée aux côtés du chef de Jan Lisiecki, pianiste canadien d’origine polonaise que les Provençaux ont déjà applaudi plusieurs fois à la Roque d’Anthéron. Un phénomène lui aussi, car, né en 1995 il s’est imposé d’emblée comme l’un des plus doués de sa génération. Yannick Nézet-Séguin, Vladimir Jurowski, Christian Zacharias, Daniel Harding, Sir Antonio Papano -ne s’y sont pas trompés- l’ont fait travailler sur des répertoires très différents. C’est avec celui de Chopin dont il maîtrise toutes les nuances, qu’Urbanski a dirigé Lisiecki en ce vendredi soir. Au programme le Concerto N° 2 pour piano et orchestre dont on ne compte plus les versions enregistrées au disque de par le monde. D’emblée l’attaque assez tranchante montre que l’orchestre un peu raide au demeurant a choisi de faire sonner l’œuvre de manière éclatante. Lisiecki emboîtant le pas aux musiciens frappe assez fort si bien que jamais son piano ne se retrouve couvert par les instruments. Puis, la magie opère sur le «Larghetto» du deuxième mouvement et l’Allegro vivace concluant l’œuvre, Jan Lisiecki offrant un son d’une pureté absolue et surtout interprétant alors la fin du Concerto avec une poésie associée à une virtuosité sans failles. Puis vint le rappel, et là, comme l’avait fait dimanche dernier dans ce même GTP un Nikolaï Lugansky en état de grâce, Jan Lisiecki a offert la «Rêverie» de Schumann, morceaux extrait des «Scènes d’enfants» et dont Vladimir Horowitz avait fait un de ses envois finaux fétiches. Lisiecki, grand connaisseur de ce compositeur privilégie un rythme assez lent, plus lent que dans la manière dont Nicholas Angelich par exemple s’attaque au morceau. C’est beau et prenant, et écouté par les spectateurs dans un silence absolu.

Lustoslawski en deuxième partie

Après une première partie de facture classique après l’entracte l’Orchestre de Lyon et son chef d’un soir Krzysztof Urbanski s’attaquait au Concerto pour orchestre de Witold Lutoslawski (1913-1994), une œuvre qu’il connaît sur le bout de la baguette puisqu’il l’a déjà gravé avec le NDR de Hambourg. La prise de risques est donc plus grande aussi avec ce Concerto atypique où l’orchestre dialogue en permanence d’un pupitre à l’autre. S’inspirant de la musique populaire de son pays, le Polonais Lutoslawski offre dans sa partition une large palette de couleurs et on sent l’influence de Stravinsky dans l’agencement des sons des cuivres, des flûtes et des violons. Dire que Urbanski est à l’aise est un faible mot. Il rayonne et avec lui l’Orchestre de Lyon tout entier, concluant de manière flamboyante cette belle soirée aixoise.
Jean-Rémi BARLAND

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