Publié le 9 avril 2018 à 20h33 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 18h41
Il est ambitieux et se coordonne avec son grand frère national, aujourd’hui parvenu dans sa phase 3 : le Plan cancer de la Région Sud-Provence-Alpes-Côte d’Azur se dote jusqu’à la fin du mandat de Renaud Muselier de 25 M€. Il sera structuré en cinq volets d’actions fondamentaux. Le détail.
Il s’agit d’un «engagement financier historique», selon les termes du président de Région, Renaud Muselier. En effet, le plan cancer régional, coordonné en tout points avec son homologue national (il s’inscrit dans l’avant-dernière année du Plan Cancer 3 couvrant la période 2014-2019), va mobiliser un budget global de quelque 25 M€. Soit 8,6 M€ déjà engagés pour des projets en cours, 5 M€ pour la lutte contre le cancer en 2018 et 11,4 M€ supplémentaires jusqu’à la fin du mandat, sur les trois prochains exercices budgétaires. Aux côtés de la région, l’Europe a déjà mobilisé 4,5M€ de fonds européens, «qui ont été investis dans ce plan, sur six projets fondamentaux ». Un acte politique fort donc, mais il faut dire que la cause le vaut bien, à la lumière des derniers chiffres relatifs au dit fléau : «Première cause de mortalité prématurée sur le territoire régional», rappelle le président, il représente encore en Paca «223 000 personnes prises en charge pour un cancer actif ou sous surveillance». Et pour lutter contre cette pathologie, «pas de plan usine à gaz, plein de propositions nouvelles inapplicables, mais un plan ambitieux fondé sur l’expérience du territoire», annonce Renaud Muselier. Il se structure en cinq volets d’actions fondamentaux, dont, pour commencer, un soutien accru à la recherche.
Prêter main forte à la recherche
Première nécessité en effet, pour combattre les cancers, «il faut les comprendre». D’où l’importance du soutien à la recherche, à même de faire reculer la maladie via l’innovation, la découverte de nouveaux traitements ou de moyens de dépistage. Et il faut dire qu’elles s’activent sur le territoire, les pépites positionnées par exemple sur l’immunothérapie, à l’instar d’une Innate Pharma ou d’une Im Check Therapeutics, investies toutes deux dans la recherche d’anticorps efficients contre les cellules tumorales. D’autres se concentrent sur le diagnostic, comme Halio DX, conceptrice d’un « immunoscore » ou test de comptage de certains lymphocytes permettant d’orienter le traitement contre le cancer du colon. Des exemples d’entreprises parmi d’autres… C’est donc tout un écosystème qu’il faut soutenir, et en premier lieu le Cancéropole Provence-Alpes-Côte d’Azur à hauteur de 1M€ en 2018. L’entité jouit «d’une importante visibilité internationale», rappelle son président Jean-Marc Gambaudo. «Nous avons la chance d’avoir un secteur recherche clinique très développé, un énorme potentiel d’enseignants chercheurs», mais aussi des financements, un accompagnement «pour que les patients profitent plus vite des avancées de la recherche. L’excellence, ça s’organise. C’est l’une des missions du cancéropole», martèle-t-il encore. Entre autres mesures, la Région apportera aussi son concours au projet Fight Cancer de l’Institut Paoli-Calmettes à hauteur de 3,3 M€ (2,5 M€ de fonds régionaux et 800 K€ de fonds européen), au projet Pemed-PCV à Nice, plateau d’exploration expérimentale en médecine personnalisée cancer et vieillissement, pour 1,1 M€ (250 K€ euros de fonds régionaux et 900 K€ de fonds européen). Mais elle s’inscrit aussi dans l’amont, par le biais de son investissement dans la médecine prédictive. Elle prévoit ainsi de soutenir les entreprises positionnées sur ce segment (1M€ jusqu’à la fin du mandat), à l’instar de BilhiGenetics, anciennement Genepred Biotechnologies, conceptrice d’un test permettant d’identifier les prédispositions majeures aux fibroses du foie et donc à de possibles cancers.
Le dépistage, «pour sauver des vies»
Mais lutter contre le cancer, cela passe aussi par des actions à même de favoriser le dépistage et la prévention de la maladie. Or, en Paca, la marge de progression est conséquente et il importe de rattraper le retard par rapport aux performances nationales, elles-mêmes pas forcément glorieuses, selon le type de cancer ciblé. La preuve par les chiffres, notamment ceux relatifs au dépistage du cancer colorectal : le taux national est de 29,3%, il baisse à 22,4% en Région… «Ce cancer est dilué sur les deux sexes, donc personne ne se sent vraiment concerné. Or, il peut être à la fois dépisté et prévenu, ce qui n’est pas le cas de tous. A titre d’illustration, on peut prévenir celui du poumon, arrêter le tabagisme, mais on peut difficilement le dépister. A l’inverse, on dépiste facilement celui du sein, mais quant à ce qui est de la prévention… c’est beaucoup plus flou», détaille Jean-François Seitz, président de la Fédération francophone de cancérologie digestive. Là encore, la Région entend apporter sa pierre à cet édifice. «Nous lancerons une grande campagne de dépistage et de prévention au cœur de nos maisons régionales de santé. C’est un point très important pour moi», annonce Renaud Muselier, précisant que cette mesure est estampillée Priorité Déserts Médicaux, dans la mesure où elle se déploiera sur l’ensemble du territoire régional, et non pas sur les seules villes centres. Sud Paca soutiendra également le Comité Régional d’Éducation par la santé (280 K€ par an) et portera, entre autres, le plan régional santé-environnement avec l’ARS (300K€ par an). Autre volet, la Région s’investira aussi dans l’accompagnement des familles et pour ce faire, il va travailler avec les comités départementaux de la ligue contre le cancer, non seulement en direction des malades et de leurs proches sur l’ensemble du territoire… mais aussi au sein même de la collectivité. «Je veux montrer l’exemple ! Le bien-être au travail est capital, et nous allons donc construire un partenariat autour de priorités claires : la sensibilisation de nos agents au dépistage, des campagnes de bénévolat actif auprès des malades et un suivi personnalisé et anonyme pour les patients qui demandent à être soutenus dans leur maintien au travail », a précisé Renaud Muselier, signataire le jour de la présentation du plan d’une déclaration d’intention commune avec les représentants de la Ligue. Outre ces mesures, la plan prévoit également de doubler l’enveloppe dédiée aux associations d’aides aux malades et à leurs familles (100 K€ par an) et de lancer un programme d’actions cancer dans les Maisons régionales de santé (100 K€ par an), avec «une expérimentation nouvelle dès octobre 2018 de protocoles de soins entre les professionnels de santé, dans une maison par département».
Des équipements innovants
Aider ceux qui ont fait le choix du care, c’est aussi une priorité, la quatrième définie dans ce plan cancer. Il s’y emploiera notamment par le biais de l’achat d’équipements à la pointe de la technologie. Illustration avec l’acquisition d’un accélérateur IRM régional à l’Institut Paoli-Calmettes, pour un montant de 275K€ par an. «En matière d’équipement médical, la Région n’a aucune compétence. Elle n’intervient pas sur l’achat d’appareils d’imagerie ou de traitement. Et en 2 ans, nous n’avons fait qu’une seule exception. Nous l’avons faite parce que cet accélérateur IRM, pour lequel nous nous sommes engagés aux côtés de l’IPC, est de dimension régionale », appuie Renaud Muselier. Un soutien sur lequel revient Patrick Viens, directeur général de l’IPC, évoquant le haut niveau de technologie de l’institut : radiothérapies innovantes, IRM embarqué… «Nous avons mis en place une médecine personnalisée depuis plusieurs années. Le dernier défi à relever, c’est celui de l’intelligence artificielle. Avec une volonté, faire en sorte que le patient puisse de plus en plus rester chez lui», précise-t-il. Autre mesure innovante, l’extension aux questions de cancer des expérimentations en télémédecine menées en partenariat avec l’URPS-Médecins libéraux. (300 K€ par an). «Pour répondre à l’enjeu des déserts médicaux, nous avions lancé fin 2017 une première expérimentation en télémédecine menée par 40 médecins généralistes et 4 médecins spécialistes en dermatologie. Ce partenariat entre le premier syndicat des médecins libéraux et la Région est une première nationale», rappelle Renaud Muselier. Le lancement d’un appel à projet «rénovation des équipements d’accueil dans les hôpitaux publics de la région» (300K€ pour 2018, renouvelé jusqu’à la fin du mandat), pour rompre avec «des conditions d’accueil indignes», et le soutien du projet d’archivage commun et de partage d’imagerie à l’échelle régionale font également partie des mesures inscrites dans ce quatrième volet.
C’est enfin aux cancers de l’enfant que le Plan cancer régional entend s’attaquer. «En France, 2 500 enfants et adolescents sont diagnostiqués d’un cancer chaque année. 500 en meurent. Depuis 30 ans, le nombre de ces cancers est en augmentation. J’ai donc voulu personnellement ajouter cette brique à l’édifice que nous construisons dans la lutte contre le cancer», explique le Président. Une brique qui se met donc en œuvre par le doublement de l’enveloppe consacrée aux associations de soutien aux enfants malades (désormais 80 K€ par an). Enfin, chaque année à partir de 2019, la Région contribuera à construire, équiper ou aménager un lieu d’hébergement pour les familles d’enfants hospitalisés pour un cancer ou une maladie grave. «Combien de familles se retrouvent en grande difficulté de logement alors qu’elles voudraient rester aux côtés de leur enfant malade ?», soulève enfin Renaud Muselier. Recherche, dépistage, accompagnement, soutien à la formation, dotation en équipements innovants, c’est donc un véritable plan de bataille que livre la collectivité, prenant donc le parti de cerner la maladie de tous côtés. Pour le mener à bien, elle s’entourera d’un comité d’experts, composé pour l’heure de 14 personnalités du monde médical investies dans la lutte contre le cancer [[Plan Cancer : Composition du Comité d’experts Ici ]].
Carole PAYRAU