Publié le 28 mai 2018 à 22h38 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h46
C’est au moyen du «Mégaphone» que l’Association pour le droit à l’initiative économique (Adie), qui fête ses 30 ans, compte faire entendre la voix des TPE, ces «invisibles». Le Mégaphone, c’est tout d’abord un document recensant les besoins et les attentes de ces dernières en 18 propositions. C’est aussi une tournée nationale, du 28 mai au 1er juin, juste avant que les débats parlementaires ne soient lancés sur le sujet de la simplification de l’accès à la création d’entreprise. Ils vont s’amorcer tout prochainement.
L’imminence des débats parlementaires autour des réformes relatives au régime social, à l’assurance chômage et l’accès à la formation des entrepreneurs cristallise forcément les attentes de ceux dont l’Adie se fait aujourd’hui le porte-voix. Ils sont majoritairement micro-entrepreneurs et du fait de la taille de leur entreprise, se sentent parfois quantité négligeable au quotidien. «C’est désagréable, je considère pourtant avoir ma place dans le paysage économique, autant que si l’on a une entreprise de mille salariés ou une start-up», s’exprime Sophie, créatrice d’une boutique de cadeaux basée dans les Vosges. Non, il n’y a pas que des grands comptes dans l’Hexagone, et loin s’en faut, puisque Sébastien Chaze, directeur Paca de l’Adie rappelle que le tissu économique français compte 2/3 de TPE, voire même que «plus de la moitié des entrepreneurs français se lancent avec moins de 8 000 euros». Et c’est bien pour cette raison que l’association a décidé de faire entendre la voix de ces invisibles. La démarche consiste à lancer au national une grande consultation auprès de quelque 40 000 micro-entrepreneurs sur leur vécu, leurs attentes, en tirer un recueil de 18 propositions à transmettre auprès des politiques. Parmi les problématiques abordées, la complexité des démarches administratives, le droit à la formation professionnelle, les difficultés d’accès à l’assurance chômage en cas d’échec de l’entreprise, ou encore à une indemnité en cas d’arrêt consécutivement à une grossesse, ou encore une maladie…
Une écoute de Bruno Le Maire
… et elles ont visiblement su capter l’attention des politiques. Puisque à la suite de premiers échanges entre des entrepreneurs venus de tout l’Hexagone et le ministre de l’Économie Bruno Le Maire, celui-ci a annoncé l’intégration au Pacte (Plan d’action pour la croissance et le développement des entreprises) d’une série de mesures issues du Mégaphone, avance Sébastien Chaze. «Quatre à cinq de nos propositions ont eu une bonne écoute. Parmi les avancées acquises, il y a notamment la suppression de la limite d’âge pour les entreprises pouvant avoir accès au microcrédit». Pour mémoire, le seuil était jusqu’ici de sept ans. Autres points qui ont reçu un accueil favorable du ministre, l’incitation des banques à orienter les porteurs de projets n’ayant pas accès au crédit bancaire classique vers une solution de microcrédit, la suppression du stage préparatoire à l’installation et la suppression de l’obligation d’un compte bancaire dédié pour les plus petits micro-entrepreneurs. «D’autres points restent plus complexes à prendre en compte, comme ceux qui gravitent autour de la formation professionnelle ou de l’ouverture de droits au chômage», observe le directeur régional, assurant que «l’Adie restera attentive aux futurs textes de loi et travaillera avec persévérance pour que les quelques mesures retenues par le ministre entrent en application». Parallèlement à la tournée lancée sous l’égide du Mégaphone, l’association lance une série de rendez-vous en région visant à encourager le passage à l’acte vers la création d’entreprise, ateliers, web-conférences, portes ouvertes… ou Facebook live, afin de discuter on-line avec des créateurs d’entreprises passés par l’Adie.
Partenariats à venir
Il faut dire que celle qui a dépassé en 2017 le cap des 1 000 projets financés entend continuer à battre des records dans les années à venir. Et pour multiplier le nombre des bénéficiaires du microcrédit accompagné, le mieux est d’unir ses forces à celles d’autres institutions ou décideurs… Les partenariats couvent actuellement dans les tuyaux. Ainsi Lionel Canesi, Président du conseil régional de l’ordre des experts comptables (Croec) Paca , évoque-t-il «une volonté d’accompagnement de l’Adie par la mise à disposition d’experts-comptables, puisque la loi Pacte, ce n’est pas pour les grandes entreprises». Philippe Vittel, élu du conseil Régional Paca, parle quant à lui de l’organisation d’une semaine de l’entrepreneuriat populaire. Enfin, Fabrice Alimi et Sabrina Roubache, tous deux élus de la CCIMP, ont annoncé la signature imminente d’une convention avec l’Adie, «pour passer de 2 000 à 1 0000 entrepreneurs accompagnés». Pour ce faire, c’est la mise en place d’une véritable chaîne de valeur qui va s’opérer entre la Chambre de commerce et d’industrie Marseille Provence et l’association régionale. «Pour illustration, nous pouvons envoyer vers l’Adie davantage de jeunes créateurs venant pousser les portes de la CCIMP. Et puisque nous mettons en place le Hub Mentorat, l’Adie à son tour peut nous renvoyer ceux qui ont besoin d’être épaulés sur des questions précises», détaille Fabrice Alimi. Autre partenariat en cours de conclusion, celui avec Renault, «afin de développer des offres de leasing adaptées, pour permettre aux créateurs d’entreprise qui ont besoin d’une voiture dans l’exercice de leurs fonctions de pouvoir en acquérir une», illustre enfin Sébastien Chaze.
Les Success stories de l’Adie
De nouveaux accords profitables au parcours des futurs bénéficiaires de microcrédits, espérés sont donc de plus en plus nombreux. Et pour donner l’envie d’entreprendre à ces derniers, l’Adie ne manque pas de mettre en avant les parcours inspirant de ceux qui ont poussé un jour la porte de l’association. Celle de Tom Darmon par exemple, un étudiant en école de notariat qui a décidé de suivre sa passion, à savoir la restauration. «J’avais noté pendant mes études secondaires que l’offre en termes de restauration destinée aux lycéens était assez pauvre. Parallèlement, j’ai cherché l’idée qui fonctionnait le mieux, à savoir les food-trucks. J’ai acheté mon premier camion grâce à un microcrédit accordé par l’Adie, de l’ordre de 10 000 euros, et obtenu un premier emplacement par la Mairie aux abords du lycée Jean Perrin». Ne reste qu’à se lancer… après avoir affiné son concept: proposer du fait maison, bio et local. Tacos, wraps, bagels et autres salades se partagent donc la vedette sur la carte, avec succès. «Aujourd’hui, j’ai six employés, quatre camions en propre et des franchisés en Espagne, à Lloret de Mar et Marbella, puisque outre les lycées, nous visons aussi les stations balnéaires. Mon objectif est de constituer un réseau de franchises, quinze sont intéressés, quatre ont déjà signé». Autre projet en ligne de mire, la mise en place d’un laboratoire sur Marseille afin de pouvoir livrer les franchisés… Le site a d’ores et déjà été trouvé, dans le 9e arrondissement de Marseille. In fine avec l’Adie, «nous avons réussi à démontrer que tout le monde peut créer une entreprise », conclut Said Ahamada, l’une des chevilles ouvrières de la naissance de l’association à Marseille. Et l’ancien trader converti au bénévolat, aujourd’hui député des Bouches-du-Rhône, a assuré qu’il portera la voix de l’Adie à l’Assemblée nationale, se faisant ainsi le relai du fameux Mégaphone.
Carole PAYRAU
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