Publié le 13 juin 2018 à 9h44 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 18h51
Est-ce la présence de trois femmes au jury final : la comédienne Isabelle Vitari ainsi que deux Miss venues du froid, Natalia Shapovalova et Reda Karosiene, toujours est-il que cette finale des 8èmes rencontres gourmandes de Vaudieu a penché in-extremis du côté de la douceur. Douceur du dessert concocté par Hugo Loridan Fombonne, le jeune chef de l’Hostellerie des Fines Roches à Châteauneuf-du-Pape qui se retrouvait en concurrence directe avec l’entrée toute de saveurs et d’explosivité réalisée par Julien Diaz chef du restaurant « Les Saisons » à Marseille. Une entrée face à un dessert, après que le plat réalisé par Grégory Brousse, chef du Mas de Peint au Sambuc (filet de canette rôti, derniers petits pois en mousseline, haricots verts en filaments, courgette acidulée et amande de Provence) ait été écarté, souffrant d’une faiblesse aromatique face à laquelle l’accord mets-vin avec la cuvée Perséides 2016 du Château Juvenal ne fut d’aucun secours. Autre handicap du plat : la bestiole arrivait derrière l’entrée boostée de saveurs de Julien Diaz, un ravioli de tartare de Saint-Pierre à la moutarde de poivron, aubergine fumée aux sarments de vigne, poutargue et lard de Colonata. Tout le feu du sud dans une seule assiette reflétant la personnalité de ce chef hors du commun qu’est Julien Diaz : de la passion à revendre, un tantinet chien fou, les yeux qui brillent lorsqu’il cuisine et une générosité naturelle de tous les instants… Alors qu’a-t-il manqué à cette entrée pour qu’elle ne termine pas à la première place du concours ? La réponse viendra du chef doublement étoilé des Terrasses de l’Uriage, Christophe Aribert. «Il manque le poisson ! il aurait suffit d’une aiguillette jusque snackée, peau croustillante à côté des raviolis et le tour était joué.» Pan dans le mille ! On n’est pas doublement étoilé pour rien… Car effectivement le tartare de Saint-Pierre, s’il était là, manquait de présence gustative. Nul doute que Julien Diaz en fera ses choux gras la prochaine fois ! Deux mots sur Christophe Aribert, qui présidait le jury. Pour la première fois, ou presque, un chef de renom n’a pas hésité à commenter dans le détail, une après l’autre, les réalisation des trois participants au concours. Des propos fort appréciés par les impétrants mais aussi par l’assistance. Et l’accord mets-vin, me direz-vous ? Pour la circonstance, le maître des lieux, Laurent Bréchet, avait exhumé une pépite de sa cave du Château Vaudieu, un Clos du Belvédère blanc 2009. Un vin exceptionnel sur des arômes de miel et de cire encaustique, avec des nuances minérales, qui prouve, si besoin en était, la capacité de vieillissement des blancs de cette grande maison castel papale. Pour accompagner le dessert, c’est un autre vin d’exception qui était proposé avec la cuvée «La Route» du Domaine des Bosquets. 100% de syrah pour cette cuvée parcellaire servie dans son premier millésime, 2016, et qui laisse entrevoir une évolution splendide dans quatre ou cinq ans. Encore une belle réalisation de Julien Bréchet. A notre avis, l’accord fonctionnait bien avec les fruits rouges du dessert ; un peu moins avec le chocolat dont la dégustation était contrariée par la vivacité du vin. Cela dit, le dessert de Hugo Loridan Fombonne était superbe, intelligent et inventif avec un dressage des plus originaux. C’était craquant et, finalement, pour quelques millièmes, le jury a craqué pour la douceur… Il ne lui en sera pas fait reproche ! Cette huitième édition des Rencontres Gourmandes de Vaudieu fut d’un très haut niveau, tant en ce qui concerne les qualifications que la finale. D’ores et déjà, Laurent Bréchet nous confirmait que d’autres améliorations seraient apportées en cuisine pour la prochaine édition… De quoi titiller dès maintenant les neurones de chefs et les papilles des dégustateurs.
Michel EGEA