Publié le 16 mars 2013 à 1h00 - Dernière mise à jour le 10 août 2023 à 10h39
Un quartier qui n’en peut PLU de l’ANRU
Une centaine d’habitants de la Soude s’est mobilisée ce samedi 16 mars pour dénoncer le projet ANRU qui prévoit sur le périmètre la construction de cinq nouveaux immeubles. Ce qui porterait atteinte à leur cadre de vie via la destruction d’espaces verts et la disparition de la place Fernand Benoit, un des rares lieux de vie du quartier.
Un espace décoré où une centaine d’habitants s’était rassemblée pour un après-midi rythmé par nombreuses animations à destination des enfants comme des plus grands, et agrémenté par la musique du groupe « SOS Blues », qui avait pris place sur la scène dressée pour l’occasion : la place Fernand Benoit, dite de « La Barquière », a revêtu ses habits de lumière ce samedi 16 mars. Comme pour mieux démontrer à quel point cette place située au cœur du quartier de la Soude, dans le 9e arrondissement au sud de Marseille, peut être un lieu de vie dans un secteur qui en manque cruellement. Mais c’est aussi un espace appelé à disparaître dans le cadre du 14e projet ANRU (Agence nationale de renouvellement urbain) qui prévoit d’y édifier pas moins de trois nouveaux immeubles.
Une solution inacceptable pour les habitants qui avaient distillé des messages à travers les panneaux installés autour du lieu : « Stop au béton à la Soude » ; « Place publique lieu démocratique » ; « Ville béton, ville prison. Ville verdure, ville moins dure ». Car ce samedi l’heure était à la mobilisation à l’appel d’un collectif qui réunit l’association SOS Nature Sud et les deux associations de locataires de la Soude, la Confédération syndicale des familles (CSF) et la Confédération générale du logement (CGL), une initiative à laquelle s’était joint le comité d’intérêt de quartier (CIQ) de Mazargues. L’objectif ? Se faire entendre des élus et dénoncer ce projet ANRU qui prévoit de les priver des espaces verts dont ils disposent. « Ici, c’est l’une des dernières résidences à Marseille où il y a un rapport équilibré entre espaces verts et immeubles. C’est un poumon vert que l’on est train de faire disparaître », dénonce Roland.
Le projet, qui s’étend sur la Soude et les Hauts de Mazargues, prévoit l’édification de cinq nouveaux immeubles, abritant environ 300 logements en accession à la propriété. Outre les trois qui seraient érigés sur la place de la Barquière, deux autres doivent voir le jour au bout de l’avenue Martheline et devant la résidence les Ajoncs.
Non à la « privatisation » de la place de la Barquière
Une bétonisation qui porterait préjudice au cadre de vie du quartier de la Soude alors que, comme ne manque pas de le relever Annick Tajan, présidente de l’association SOS Nature Sud, « un des objectifs de l’ANRU est pourtant d’améliorer la vie des habitants ».
Les habitants dénoncent cette « privatisation » de la place de la Barquière tant sur le fond que sur le forme. Dans le cadre du Plan local d’urbanisme (PLU) – qui reprend une grande partie du projet ANRU que les habitants dénoncent – elle aurait en effet dû faire l’objet d’une enquête spéciale en tant que place publique. Ce qui n’a pas été le cas… Et Jacques Assada de résumer la position du CIQ de Mazargues : « Non au déclassement de la place, non aux prochains immeubles sans desserte collective correcte c’est-à-dire tant que le boulevard urbain sud n’aura pas été construit. Or, il a été renvoyé sine die à 10 ou 15 ans. » Au nom du collectif, Annick Tajan va même plus loin : « Nous refusons toutes nouvelles constructions même quand il y aura le boulevard urbain sud. Dès qu’il aura été mis en service, il sera saturé et on reviendra à la même situation qu’aujourd’hui. »
Un dossier sur lequel les habitants de la Soude dénoncent aussi « l’absence de concertation ». Si des réunions ont bel et bien été organisées en présence de l’association Robin des villes, qui a pu faire remonter l’opposition au projet, il ne s’est agi aux yeux des habitants que de « réunions alibi » et parcellaires car ne portant que sur des lieux précis et pas sur l’ensemble du projet. « Il est hors de question que cette place soit détruite. On a fait des propositions qui n’ont pas été entendues. On est écouté mais pas entendu », souligne Djamila de la CGL. Parmi ces propositions, le souhait que la place de la Barquière accueille à nouveau un marché, comme c’était le cas jusque dans les années 1980.
Une mobilisation pour se faire entendre des élus
Alors pour attirer l’attention des élus et se faire notamment entendre du maire de secteur, Guy Tessier (UMP), du président de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole (MPM), Eugène Caselli, et du président du GIP Marseille Rénovation urbaine, Nicolas Binet, la centaine d’habitants présents a défilé ce samedi dans le quartier pour dire « Stop au béton ». Une manifestation qui a sillonné les 11 lieux impactés par le projet ANRU.
Une mobilisation capitale car le temps presse. Le premier rapport sur les 17 000 avis collectés dans le cadre de l’enquête publique sur le PLU doivent en effet être remis ces jours-ci à MPM. Dans le même temps, les habitants sont quant à eux toujours dans l’attente de la tenue de la réunion de restitution de la concertation menée avec les Robins des villes. « Nous avons réécrit à Nicolas Binet qui nous a dit que la réunion allait venir dans le cadre du protocole de l’ANRU », indique Annick Tajan sans avoir plus de précisions sur le calendrier.
« Le projet est bien en cours même si les permis de construire ne sont pas là », confirme David Larriven, secrétaire de la CSF à la Soude. Des permis de construire que le collectif ne manquera pas d’attaquer en justice dès qu’ils seront édités. Mais en attendant le combat juridique, pas question de rester l’arme au pied pour les habitants. « Nous voulons construire un mouvement sur la durée pour montrer qu’ici il y a des habitants qui ne comptent pas se laisser faire. Il faut que cette place soit régulièrement occupée avec les beaux jours pour démontrer qu’on peut en faire un lieu de vie qui ratonnerait jusqu’à Mazargues et Bonneveine », insiste David Larriven. Une mobilisation Et Annick Tajan de marteler à nouveau les revendications du collectif dans un ultime message adressé aux élus : « Il faut que cette place publique reste publique et que les espaces verts demeurent afin que la Soude reste aérée. Nous ne voulons pas d’un banc d’immeubles devant nous. »
Serge PAYRAU