Publié le 26 mai 2023 à  12h28 - DerniÚre mise à  jour le 8 juin 2023 à  20h55
Un public nombreux se pressait au sein de l’HĂŽtel de ville de Marseille, Ă l’occasion de la remise du prix Robert Mizrahi Ă Naomie Dahan par le maire, BenoĂźt Payan et Lionel Stora, prĂ©sident du Fonds Social Juif UnifiĂ© (FSJU) Marseille-Provence.
Pour sa troisiĂšme Ă©dition, le prix Robert Mizrahi pour la transmission de la mĂ©moire a Ă©tĂ© remis le 8 mai, tout un symbole, Ă Naomie Dahan, une jeune Ă©tudiante de 22 ans. Ce projet, ouvert aux Ă©tudiants de 18 Ă 25 ans, a pour objet de travailler sur lâhistoire du peuple juif et la transmission de la mĂ©moire. BenoĂźt Payan devait, Ă cette occasion, Ă©voquer la figure d’Albert Cohen «qui raconte comment il a Ă©tĂ© jetĂ©, enfant, sur le mur de lâantisĂ©mitisme. Il raconte comment, dans les rues de Marseille, un camelot lâavait humiliĂ©, agressĂ©, comment il avait fait disparaĂźtre lâinnocence de ses yeux par lâinsulte et le mĂ©pris. Parce quâil Ă©tait Juif. NĂ© Ă Corfou, Albert Ă©tait un enfant de la France, un enfant de ce pays quâil aimait et quâil chĂ©rissait». Une violence que Robert Mizrahi, enfant, a connu, rappelle BenoĂźt Payan: «Elle vous a pris vos parents un soir de mars 1944, un de ces soirs de guerre oĂč tout semble basculer. Ce soir-lĂ , la Gestapo Française vous a arrachĂ© Ă ceux qui vous ont donnĂ© la vie, guidĂ©e par les ordres des nazis qui voulaient vous faire disparaĂźtre».
«Faire de notre ville la terre dâaccueil des exilĂ©s du monde»
Marseille, souligne le maire, se souvient et «par son souvenir elle offre une sĂ©pulture Ă ceux qui nây ont pas eu droit». «Ce prix, qui porte votre nom, que nous remettons aujourdâhui, poursuit-il, est le flambeau que vous cĂ©dez chaque annĂ©e Ă des dizaines de jeunes Marseillais». Une mĂ©moire pour «construire ensemble une ville, une sociĂ©tĂ©, un monde dans lequel la haine, lâexclusion, la division, nâauront plus jamais leur place. Câest la leçon de Marseille, et câest la voix que nous voulons porter ensemble. Faire de notre ville la terre dâaccueil des exilĂ©s du monde, la rendre ouverte, accessible, populaire, joyeuse, la rendre belle parce quâelle est plurielle : câest notre tĂąche devant lâhistoire, câest notre tĂąche devant les plaies bĂ©antes de notre passé».
« Lâoubli, câest le plus beau cadeau que nous puissions faire aux tyrans»
Et de remercier ici le Fonds Social Juif UnifiĂ© «qui agit depuis tant dâannĂ©es pour que jamais les cachots de lâoubli ne se referment sur nous. Parce que lâoubli, câest le plus beau cadeau que nous puissions faire aux tyrans. Lâoubli, câest la premiĂšre marche de lâindiffĂ©rence, câest la premiĂšre marche du mĂ©pris, et câest la premiĂšre marche du chemin qui nous mĂšne Ă la division». Et de conclure son propos en remettant Ă Robert Mizrahi la mĂ©daille de la ville.
Lionel Stora Ă©voque Hannah Arendt (politologue, philosophe et journaliste allemande NDLR) «pour qui l’Ă©ducation doit permettre d’entreprendre quelque chose de neuf dans un monde plus vieux» et de rendre Ă son tour hommage Ă Robert Mizrahi: «qui a passĂ© sa vie Ă militer pour la mĂ©moire, qui a ĆuvrĂ© au FSJU, Ă Yad Vashem, l’Institut international pour la mĂ©moire de la Shoah, qui a Ă©tĂ© Ă©lu Ă la ville de Marseille». Pour Lionel Stora : «Albert Cohen serait heureux de voir ce que nous accomplissons sous le regard bienveillant de Robert». Patricia Mizrahi, la fille de Robert, remercie le FSJU et la Ville pour ce prix «remis du vivant de mon pĂšre».
En ce qui concerne le Prix, l’historienne RenĂ©e Dray-Bensousan explique le choix du jury: «le travail de Naomie Dahan sur Samuel Caraco rĂ©pond Ă toutes nos attentes sur la rigueur historique et il est rĂ©alisĂ© dans un style alerte». Tandis que Naomie Dahan avance: «Ce travail m’a beaucoup apportĂ© tant sur un plan affectif qu’intellectuel». Et de remercier RĂ©gine MĂ©chulan, fille de Samuel Caraco, avec laquelle elle a pu rĂ©aliser ce travail.
Michel CAIRE