Publié le 9 mars 2013 à 8h00 - Dernière mise à jour le 10 août 2023 à 10h29
Totems sans tabous
Bernard André de Mersseman propose à l’espaceculture, depuis le 1er mars et jusqu’au 25 de ce même mois, L’arrivée à Marseille, premier volet de Mère Méditerranée. Il est des films qui offrent plusieurs niveaux de lecture, il en va de même avec l’installation de cet artiste qui sait capter le public dès le premier regard, par ses totems, ces photomontages numériques, ses vidéos, ses odeurs, pour les emporter au sein de l’histoire de la Méditerranée, sa richesse.
L’artiste explique : « Avec Mère Méditerranée, inspirée par la thématique de Marseille Provence 2013-Valeur et croyance- j’ai essayé de respecter l’esprit des rencontres d’Averroès ». Mission accomplie tant ce travail, parce qu’intégralement artistique, peut devenir parfaitement pédagogique. « dans cette mise en espace, j’emploie des matières naturelles ou manufacturées laissées à l’état brut côtoyant plusieurs techniques, traditionnelles comme actuelles : odeurs naturelles et composées, peinture sur bois, résine… ». Odeurs donc : « car, enfant, je venais en famille du Nord en vacances dans le Sud, et, la première chose qui me marquait, c’était les odeurs de garrigues, c’était les fenêtres que l’on ouvrait pour respirer à pleins poumons l’odeur des vacances ».
L’artiste, ainsi, s’intègre à son travail sur la Méditerranée, à sa mise en espace : « Mon attirance pour la matière et la couleur en est le ciment. Mon attirance pour la diversité en est le fondement. Par la diversité des moyens d’expression, j’ai voulu donner la notion du temps et de la liberté. J’ai essayé de restituer la richesse des sociétés quand elles tissent des liens entre les époques et jettent des ponts entre les différentes cultures ».
Cette Arrivée à Marseille propose ainsi 23 peintures totemiques symbolisant les pays de la Méditerranée. Trois peintures totémiques symbolisant les 3 civilisations du monde méditerranéen dans leur devenir, elles sont comme habillées par des panneaux transparents sur lesquels on peut lire la Déclaration universelle des droits de l’Homme. On se rapproche et l’on découvre qu’une partie du texte est inversée « afin que le futur puisse le lire », explique joliment l’artiste. Trois compositions murales symbolisent les 3 civilisations de la Méditerranée : Byzance, Islam et Occident Chrétien. Là, encore, l’abord est aisé, afin de mieux plonger dans un univers de symboles. Avec Byzance, on pense à Klimt « le dernier peintre byzantin ».
Une vidéo invite à un voyage dans la Méditerranée, au fil du temps, des philosophes, des langues, les grues sont là, symbole des migrations, plus fortes que toutes les frontières. Et si un rideau de fer tombe, l’espoir est là puisque tout recommence.
Bernard Jacquier, le président de l’espaceculture, ne cache pas sa satisfaction d’accueillir une telle exposition, labellisée Marseille Provence 2013. « Mère Méditerranée, réalisée spécialement pour cette année capitale, c’est plus de 2 ans de travail. C’est une réflexion sur le temps et l’espace qui fait référence à l’histoire et qui, par l’utilisation des totems, évoque ce qui m’est le plus cher : l’unicité de l’esprit et de l’art méditerranéen. C’est une œuvre, de plus, troublante qui me fait penser à Freud qui, dans Totem et tabous, pose la question de la culture en rapport avec la psychanalyse, établi un lien entre le primitif et l’homme moderne à travers l’enfance. Nous sommes donc là face à une exposition qui est tout sauf innocente, qui est intellectuellement très forte ».
Après cette première étape, Mère Méditerranée, déclinera son deuxième temps, Le voyage du 7 au 21 avril, dans les salles voûtées de la Mairie de Cassis. La troisième étape se fera à Marseille, quai de la Tourette en juin, pour Un retour à Marseille.
Luc CONDAMINE
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