Patrice Chocholski qui est directeur de l’Institut catholique de la Méditerranée à Marseille revient sur les missions de l’ICM, le dialogue interreligieux en Méditerranée «qui est la voie nécessaire et vitale pour construire un avenir ensemble», la venue du Pape François à Marseille «laboratoire d’expériences de dialogue et de fraternité»… Entretien
Pouvez-vous nous présenter l’Institut catholique de la Méditerranée, l’ICM, son histoire,
son organisation, ses activités ?
L’Institut Catholique de la Méditerranée est un Institut d’enseignement supérieur au sein duquel se trouve l’Institut de sciences et théologie des religions à Marseille, fondé il y a 30 ans par celui qui depuis est devenu le Cardinal Jean-Marc Aveline archevêque de Marseille, et l’Institut universitaire Saint Luc à Aix-en-Provence. Divers départements assurent cours formations, sessions, conférences, laboratoires de recherche. Il s’agit à la fois de penser la foi chrétienne en dialogue avec les cultures et les religions, mais aussi en dialogue avec les
questions que se posent de manière très concrète nos contemporains au sein des entreprises, des établissements scolaires, des associations, autour de l’identité, la prise en compte du fait religieux, la laïcité, les frontières, l’altérité…
Comment définiriez-vous l’expertise de l’ICM dans son environnement marseillais et méditerranéen ?
L’ICM est un institut d’enseignement et de recherche ancré dans la vie marseillaise et méditerranéenne car il est né de questions posées au départ par les chrétiens de Marseille. Si une pensée s’y élabore c’est une pensée nourrie de l’expérience du terrain dans un échange fécond avec les expériences vécues par les uns et les autres, les liens tissés dans la diversité. C’est cette expertise-là qui peut être mise au service du plus grand nombre.
l‘ICM est un acteur engage du dialogue interreligieux en Méditerranée. Comment ce processus de dialogue et d’échange se développe-t-il et quels en sont les résultats ?
Le dialogue interreligieux en Méditerranée s’inscrit dans un processus. Il suppose un réseau, des liens, une longue patience et un apprivoisement réciproque. C’est parce qu’il s’inscrit dans une histoire et une longue écoute que des amitiés ont pu naître que les échanges peuvent se vivre dans le respect des différences et jusqu’au bout de celles-ci et dans la vérité de l’identité de chacun, sans crainte de ce qui pourrait nous opposer. Nous croyons, savons aujourd’hui qu’il est possible de penser dans ces conditions une théologie non pas commune
mais en dialogue.
Le Pape François est à Marseille. Quelle est pour vous la signification de cette visite et qu’en attendez-vous ?
La visite du pape François est à la fois une reconnaissance de ce qui se vit déjà à Marseille depuis de nombreuses années, comme un laboratoire d’expériences de dialogue et de fraternité et aussi une invitation à aller plus loin encore sur cette route. Le pape invitait ces jours-ci les Marseillais à faire de leur ville un « port de l’espérance ». C’est un signe prophétique qu’il vient poser et dans lequel il veut inscrire le plus grand nombre. Le signe n’est pas un point final mais un jalon pour donner courage et continuer la route malgré les écueils et les tempêtes.
Est-ce que l’ICM a proposé des activités spéciales dans le cadre des « Rencontres méditerranéennes » organisées à l’occasion de la venue du Souverain Pontife ?
L’ICM a proposé diverses manifestations durant cette semaine, tables rondes, conférences, visites de lieux de culte. Ainsi que la rencontre du réseau de théologiens et théologiennes méditerranéens qui , étape dans le processus initié il y a quelques années pour mettre en œuvre une théologie depuis la Méditerranée. Cette rencontre a donné lieu lors d’une table ronde à la diffusion d’un manifeste le 21 septembre au soir.
Marseille est une ville complexe tandis que la Méditerranée est une région du Monde pour le moins compliquée. Dans ce contexte de contraintes et d’incertitudes, pensez vous que le dialogue interreligieux puisse apporter des réponses, voire des solutions ?
Dans le contexte à la fois complexe et tourmenté de la Méditerranée il nous paraît évident que le dialogue interreligieux est la voie nécessaire et vitale pour construire un avenir ensemble. La méditerranée est le berceau des trois religions monothéistes comment pourrait-on ne pas entendre leur voix ni leur permettre de s’accorder ensemble pour répondre aux cris qui montent de cette humanité blessée sur ses rives ?
Propos recueillis par Bertrand Valdepenas
Patrice Chocholski est né en Moselle le 12 mai 1966 de parents d’origine suisse, americano-polonaise, lorraine et alsacienne. A près des études de philosophie et théologie en Italie, Pologne, Palestine et Israël, il a obtenu une Maîtrise à l’Université Catholique de Lyon avec le P. Jean-Marc Aveline. Il a publié à nouvelle Cité : « Aux sources de la Miséricorde, perspective philosophique et plurireligieuse » (2014) . Secrétaire des Congrès Mondiaux de la Miséricorde, dépendant du Vatican : Latran (2008), Cracovie (2011), Bogota (2014), Manille (2017), Apia (2023) – Il est le directeur de l’ICM et Président de « Chemins de Dialogue » depuis 2020.