Publié le 8 octobre 2023 à 10h57 - Dernière mise à jour le 10 octobre 2023 à 22h41
On connaît le noir absolu des tableaux de Pierre Soulages, moins sans doute les repas dans le noir absolu. Le concept est né voilà une vingtaine d’année. 14 villes dans le monde possèdent ce type de restaurant. Il arrive à Marseille dans les sous-sols du restaurant Le République.
Décupler les sensations
« En temps normal 80% de l’information passe par la vue», commente Aurore Lépy, directrice des opérations et de la communication au sein de «Dans le noir international». Dîner dans une salle plongée dans le noir offre une expérience originale. Elle décuple les sens : l’ouïe, le goût, l’odorat, le toucher. « On redécouvre ses sens avec un menu 100% surprise qu’il faut essayer d’identifier. On peut aussi manger avec les mains si on veut mieux appréhender la texture et on découvre les gens autrement » ajoute-t-elle.
Inverser les rôles
Mais dîner dans le noir a un autre objectif. Cela permet d’inverser les rôles. Ici ce sont des déficients visuels qui servent de guides et le client est totalement dépendant d’eux. « Il faut une grosse concentration pour savoir où se trouvent les tables, où est le client. Cela suppose de bien mémoriser la structure », indique David Dortu, guide formateur. « Ici on a créé une maquette en Lego où on a reproduit la salle pour que les serveurs puissent venir toucher l’ensemble, trouver leurs repères. L’intérêt de « Dans le noir » est qu’on inverse les rôles. Habituellement quand je suis dans les transports publics ou dans une gare c’est un valide qui vient m’aider. Ici c’est moi qui l’accompagne. Je renvois l’ascenseur en quelque sorte».
Une mission inclusive
Depuis près de deux ans le restaurant « Le République » associe inclusion et diversité. Il accueille des personnes en insertion et réserve une partie des tables à des familles en situation de précarité qui peuvent déjeuner pour un euro. Le partenariat avec « Dans le noir » s’est opéré sans difficulté. « On avait des locaux, leur projet inclusif recouvre le nôtre donc cela allait de soi qu’on travaille ensemble. Cela se passe au République mais c’est d’abord à Marseille », annonce fièrement Sébastien Richard le fondateur. Environ 15% des 48 couverts que compte la salle de « Dans le noir » seront réservés aux personnes précaires.
Création d’emplois
« Il a fallu qu’on s’adapte et intégrer dans l’équipe existante sept déficients visuels », ajoute Sébastien Richard. Les bénéficiaires de ce partenariat sont en tout cas ravis. Jean-François Annaloro était sans emploi, là il acquiert un vrai métier de guide serveur. Il estime « faire l’affaire car il est mal voyant. Très souvent on n’est pas prioritaires dans les emplois, là c’est l’inverse ». « Ici on met en avant nos compétences », souligne Chabane Zegaoui, guide serveur dans d’autres structures auparavant. « On a toujours un retour positif des clients sur la mise en avant des sens mais aussi sur l’autre vision qu’ils ont du handicap et l’aventure humaine que cela leur a procuré». « Les sens des déficients visuels sont très développés », assure David Dortu qui ajoute: « J’ai noté que vous aviez de bons sentiments envers moi lors de cette expérience ».
Reportage Joël BARCY
Ouverture de « Dans le noir » Marseille, le jeudi 12 octobre.