Publié le 20 novembre 2023 à 7h30 - Dernière mise à jour le 12 mars 2024 à 22h03
Dans le contexte actuel, qui polarise l’esprit de bien des Français, la sortie du film « Monsieur le maire » est quasiment passée inaperçue. C’est regrettable car cette réalisation a le mérite de mettre en lumière la vie communale de nos maires, de nous faire prendre conscience des charges qu’ils doivent assumer, à l’heure même où ces élus se trouvent confrontés, de plus en plus, à l’incivilité ambiante, à la vindicte de certains.
Le maire est l’élu de proximité par excellence. Il vit au milieu de ses administrés, les croisent dans la rue, chez les commerçants, lors de différents événements. Il est donc facilement abordable, ce dont ne se privent pas les habitants quels qu’ils soient. Au moindre problème survenant sur le territoire communal, le maire est sollicité, de jour comme de nuit, quand bien même il n’a pas la compétence pour le résoudre, parce que d’ordre privé ou du ressort de l’intercommunalité.
Aujourd’hui, trop souvent, le citoyen auquel le maire explique ne pas être à même d’intervenir a une réaction d’incompréhension virulente, convaincu que le premier officier municipal élu est le patron dans sa commune et doit donc, derechef, résoudre la moindre préoccupation de ses administrés. En fait, il n’en est rien car au fil des ans la quasi-totalité des compétences, à commencer par la voirie et l’enlèvement des ordures ménagères, a été transférée des communes aux intercommunalités. Cette incompréhension se traduit de plus en plus par des insultes, incivilités, agressions verbales et physiques, harcèlement sur les réseaux, quand ce ne sont pas des atteintes à la vie privée et familiale.
Chacun a encore en mémoire la mort tragique du maire de Signes, écrasé le 5 août 2019 par un camion dont le chauffeur venait de décharger des gravats en pleine nature, ou bien l’attaque avec une voiture-bélier du domicile du maire de l’Haÿ-les-Roses le 2 juillet 2023. Hier, la croix gammée taguée sur le domicile du maire de Saint-Mandrier-sur-Mer.
Fin septembre dernier, 72% de maires avaient été victimes de menaces ou d’agressions, selon l’Association des Maires de France. Preuve que ces intimidations en tous genres sont, hélas, entrées dans le quotidien de nos maires. Veillons à ce que ces actes malveillants ne deviennent une banalisation inquiétante.
Si la critique est légitime en démocratie, les intimidations, les menaces, les règlements de comptes en ligne, et plus encore les agressions sont inacceptables et bafouent la démocratie, la République. Ces faits doivent être sanctionnés sans faiblesse.
Ciblé par les violences, croulant sous les tâches administratives, confrontés aux casse-têtes juridiques qui entravent leurs actions au quotidien, ainsi qu’au manque de moyens, pénalement responsable, être maire devient un véritable sacerdoce. Face à cette situation, à ce climat oppressant, à ces mises en cause virulentes, et au fait que le statut d’élu s’avère si peu attractif, nombre d’entre eux rendent leur écharpe tricolore.
Selon les derniers chiffres communiqués en avril par le ministère de l’Intérieur, 1 293 maires ont démissionné depuis les dernières élections municipales de juin 2020. Un chiffre qui, depuis avril, a dû augmenter… Ce phénomène n’est pas anodin et doit interpeller chacun d’entre nous. La violence n’est jamais une solution. Les maires sont profondément attachés à la cohésion de notre pays et ils y contribuent chaque jour en agissant au plus près de nos concitoyens. Mais si nous n’y prenons garde, à terme qui voudra encore concilier vie privée et professionnelle avec un engagement municipal, source de soucis journaliers, de tracas administratifs et de violences gratuites ?