Le département des Bouches-du-Rhône et la métropole Aix-Marseille-Provence annoncent agir «pour soutenir les agriculteurs, changer les modes de production, favoriser les circuits courts et la consommation de produits locaux, de manière à assurer un revenu équitable aux agriculteurs tout en préservant l’environnement.»
Les Bouches-du-Rhône, avec une surface agricole qui couvre près d’un tiers du territoire et compte de forts enjeux agro-environnementaux, est un département rural. L’agriculture est donc un secteur clé du développement du territoire. Premier département français pour la production de tomates, de salades, de courgettes, de riz, d’olives, les Bouches-du-Rhône possèdent des cultures ancestrales. Et pourtant aujourd’hui, la production locale est exportée à 90 % et 90 % de ce qui est consommé est importé. Une situation qui pousse la présidente des deux institutions, Martine Vassal, à inviter les consommateurs « à mieux regarder les lieux de production ».
Le Département et la Métropole accompagnent les jeunes
Le Département accompagne les jeunes qui souhaitent s’installer en facilitant les démarches de développement durable sur leur future exploitation. 161 projets de création ou de reprise d’exploitation ont été financés pour un total de 1, 41 million d’euros, soit 8 788€/exploitation. 106 projets d’aide aux investissements pour une évolution du modèle productif ont été recensés, soit un budget total de 2,35 millions d’euros avec une moyenne de 22 217€/exploitation.
La Métropole pour sa part dispose d’une couveuse-pépinière agricole, située à Pertuis. Ce dispositif permet à des agriculteurs non immatriculés de tester leur projet d’entreprise agricole en conditions réelles sans supporter les risques. 7 futurs agriculteurs porteurs de projet en ont bénéficié. La Métropole installe des agriculteurs sur son foncier disponible : après l’implantation de 6 agriculteurs dans la périphérie marseillaise, elle affectera 5 nouveaux agriculteurs en 2024 sur des terrains métropolitains situés à Saint-Victoret, Les Pennes-Mirabeau et Cuges-les-Pins, sur au moins 10 hectares. Elle accompagne également les communes à sauvegarder les terres agricoles par la création de zones agricoles protégées en coordination avec le Département.
La reconquête des friches agricoles
Le Département souhaite mobiliser le foncier improductif en raison de la forte pression foncière sur le territoire. 810 projets ont été financés à hauteur de 15 millions d’euros, soit 68 % du coût d’investissement de la reconquête agricole et pastorale pour un total de 18 518 €/exploitation. 4 735 hectares agricoles ont été reconquis, soit 3,2 % de la surface agricole utile (SAU). Depuis 2015, une moyenne annuelle d’un projet sur deux, permet de créer ou de conforter l’exploitation d’un jeune agriculteur dont 40 % en agriculture biologique.
«Grâce au financement de la création et de l’entretien de coupures agricoles et pastorales en piémont et cœur de massifs pour se protéger contre le risque incendie : 44 projets ont été aidés à hauteur de 823 000€ soit la création de 98 hectares de coupe-feux cultivés ou pâturés depuis 5 ans.» La mobilisation d’un crédit global de 500 000€ pour financer des mesures agroenvironnementales et climatiques à vocation « Défense de la Forêt contre les Incendies » (DFCI) pour encourager l’entretien par le pâturage d’environ 2 500 hectares contractualisés.
La Métropole porte depuis cinq ans, en partenariat avec la Chambre d’agriculture des Bouches-du-Rhône, une action de reconquête des friches agricoles en zone de défense des forêts contre les incendies (DFCI). L’objectif étant de «redynamiser l’agriculture afin qu’elle joue à nouveau son rôle de pare-feu. Cette action de reconquête sur terrains privés est une démarche au long cours qui devrait aboutir à l’installation de producteurs intéressés par la vigne, la pistache et d’autres cultures adaptées au changement climatique.»
Gestion de l’eau
Dans un contexte marqué par l’impact croissant du changement climatique, le Département s’engage à garantir l’approvisionnement en eau des exploitations agricoles en modernisant les réseaux d’irrigation. À cette occasion, il espère pérenniser l’alimentation des milieux humides et des nappes phréatiques tout en économisant la ressource.
Dans le cadre du programme départemental d’hydraulique agricole, le Département a engagé 6,4 millions d’euros (soit 35 % du montant total), depuis 2015 pour moderniser les grands canaux de transports et de régulation de la distribution de l’eau. Soit une économie de 5 à 8 % des volumes tout en garantissant la desserte des exploitations. Grâce au lancement en septembre 2023 du schéma départemental d’hydraulique agricole, piloté par la Fédération des structures d’irrigation, le Département s’est engagé à réorganiser la gouvernance de l’eau, trop complexe avec plus de 150 gestionnaires de réseaux d’irrigation dans le département. Il s’engage également à identifier les investissements à réaliser (exemple : 125 millions d’euros pour le schéma régional Prohydra, susceptible de générer 33 millions de m3 d’eau), tout en repensant les modalités et les outils de financement mobilisables.
Dans l’objectif de changer les pratiques dans un contexte de changement climatique, la Métropole s’est engagée pour sa part dans plusieurs démarches : Accompagner les associations d’irrigants à maîtriser les ressources en eau ; cofinancer les projets durables de développement ou d’extension des réseaux d’irrigation. Des projets sont en cours sur Cassis et Pertuis ; innover et développer des alternatives en mobilisant, par exemple, l’eau traitée issue des stations d’épuration pour irriguer. Un projet est en cours de test pour la plaine agricole de Cuges-les-Pins ; former des agriculteurs à l’utilisation de sondes capacitives pour une meilleure maîtrise de l’irrigation. Dix agriculteurs seront formés en 2024.
L’évolution des modes de production
Le Département souhaite faciliter la conversion des exploitations en agriculture biologique sous la forme d’aide aux investissements. Par ailleurs, il espère également inciter les exploitants en production conventionnelle à s’engager dans la démarche « Haute Valeur Environnementale »(HVE). Depuis 2016, 310 projets d’investissement ont été accompagnés pour équiper les exploitations en agriculture biologique, soit 10 297 €/exploitation pour un budget total de 3,19 millions d’euros. Avec 51 000 hectares agricoles en biologique ou en conversion, soit 35 % de la surface agricole utile (SAU), le département des Bouches-du-Rhône se place en première position des départements biologiques dans la région en 2023. Il participe à la prise en charge partielle du coût des prestations proposées par la Chambre d’agriculture pour certifier les exploitations en HVE (diagnostic, formation), à hauteur de 35 000€/an. 655 exploitations des Bouches-du-Rhône ont été certifiées HVE soit 16 % au total dont 1/3 en fruits et légumes. 2 millions d’euros vont servir à la création d’unité de transformation alimentaire à Miramas qui va rayonner sur un pôle de 50 000 habitants. Il s’agit de remettre en culture bio près de 400 hectares de terres agricoles. Les cultures seront ensuite transformées sur place, en repas pour les crèches, les écoles ou encore les Ehpad. Il s’agit d’une première nationale dans cette dimension.
Valorisation des produits en circuit court
Le Département s’engage pour la promotion des produits emblématiques du territoire et la réduction de l’empreinte écologique de la production locale tout en sensibilisant les jeunes à l’importance d’une alimentation saine. Il organise ainsi de grands événements en offrant notamment une véritable vitrine pour les producteurs des Bouches-du-Rhône avec le Salon des Agricultures de Provence (65 000 visiteurs en 2023), la Cuvée départementale (concours de sélection des vins AOP et IGP), les Grappes d’or (opération de valorisation des acteurs de la filière viticole auprès d’acheteurs potentiels). Il est également à noter la création et l’animation, avec le soutien de la Chambre d’agriculture, du marché des producteurs de l’esplanade Saint-Just à Marseille qui fêtera ses 10 ans en fin d’année ; toujours en partenariat avec la Chambre d’agriculture, la création de la plateforme et de l’application mobile ‘Treize envies’ pour recenser et promouvoir l’offre locale des produits du terroir vendus en direct. 620 exploitations sont déjà inscrites…
Projet alimentaire territorial
Le projet alimentaire territorial « Cultivons le bien manger en Provence » et le plan de souveraineté alimentaire visent à préserver, renforcer et développer la diversité des circuits de distribution du territoire (marchés de demi-gros en circuits courts, marchés paysans, vente directe, épiceries, magasins de producteurs, paniers, Amap…). Le succès des Halles de producteurs « Terres de Provence », proposées au grand public sur deux sites (sur la grande zone commerciale de Plan de Campagne et sur la gare TER de Marseille-La Barasse dans le 11e arrondissement), l’illustre.
En 2023, les Halles de producteurs ont accueilli près de 110 000 visiteurs (en hausse de 8 % par rapport à 2022) et permis la vente de plus de 1 000 tonnes de produits locaux pour un prix moyen du panier avoisinant 45 € . Une 3e halle de producteurs locaux « Terres de Provence » va voir le jour à Marseille. Cette dynamique visant à rendre accessibles des produits locaux, frais et de saison aux habitants se poursuit avec la mise en place d’un point de vente les mardis, mercredis et vendredis soir sur le pôle d’échanges multimodal Krypton à Aix-en-Provence.Et, l’installation de marchés en cœur de quartier à La Ciotat, ou encore à Berre-l’Étang, sur un parking du Département. Une occasion pour près de 60 agriculteurs d’être en contact direct avec les consommateurs. La charte « Cultivons le bien manger en Provence » permet d’accompagner des projets alimentaires dans toutes les villes du territoire. Née en 2021, elle favorise un accompagnement individuel et une mise en réseau des communes signataires, volontaires pour coconstruire un projet agricole et alimentaire en cohérence avec le PAT.
En 2023, 26 communes se sont engagées dans cette collaboration. Pour la majorité, les projets concernent la restauration scolaire en circuit court, le foncier agricole et l’accessibilité aux productions locales. Afin d’élargir la commercialisation de produits locaux en circuit court, la Métropole participe à une expérimentation de la Chambre d’agriculture du Vaucluse sur Pertuis pour l’installation de distributeurs automatiques de produits fermiers présentant des paniers composés à des prix compris entre 10 et 25 €. Ce système propose des produits frais disponibles 7j/7 et 24h/24. Un collectif d’agriculteurs s’est d’ailleurs constitué afin de proposer de nombreux produits sur la commune de Pertuis (légumes, fruits, produits laitiers, miel, œufs, viande…).
La Provence dans mon assiette
Il est également souligné que le Département propose le dispositif « La Provence dans mon assiette » aux collèges des Bouches-du-Rhône. «Ce mécanisme permet aux établissements de bénéficier d’une aide du Département pour l’achat de fruits et légumes frais, de saison, produits localement ou issus de l’agriculture biologique. C’est un moyen de valoriser les producteurs locaux et de proposer aux adolescents une alimentation saine, équilibrée et locale. »
Le Département a également mis en place la Charte de la restauration scolaire. «Cette Charte engage les collèges et notre collectivité sur plusieurs points et notamment une sélection rigoureuse des produits et le recours aux circuits courts. En juin dernier, le Département a créé une centrale d’achat pour mutualiser l’approvisionnement des collèges, notamment en produits frais, qui pourrait permettre de changer l’échelle et de structurer les filières locales d’approvisionnement.»
Le réseau « Nos cantines durables » de la Métropole, en lien avec l’application de la loi EGalim, se décline pour sa part en formations, visites, échanges et retours d’expérience entre les différents acteurs. «Au total en 2023, plus de 370 agents et élus ont pu bénéficier de cette montée en compétence collective. La coordination permet de réaliser des études et des projets expérimentaux innovants.» En 2022, plus d’une tonne de produits locaux a été commandée grâce à une mutualisation des commandes entre plusieurs établissements : riz de Camargue IGP, taureau de Camargue AOP, moules bio de Carteau… Enfin, « l’équipe du Projet alimentaire territorial propose un accompagnement individualisé et gratuit des communes pour rédiger, entre autres, des marchés publics de denrées adaptés afin que les agriculteurs locaux puissent répondre.» De même, afin d’accompagner les plateformes de producteurs, la Métropole participe au capital de la SCIC Manger bio en Provence spécialisée dans les produits en agriculture biologique issus de producteurs locaux à destination de la restauration collective. Elle a également mis en place des outils pour sourcer les produits locaux par filière, notamment le catalogue de fournisseurs en produits locaux destiné aux professionnels de la restauration.
Paniers bio à prix réduit pour les plus démunis
Le Département et la Métropole soutiennent l’agriculture des paniers bio à prix réduit pour les plus précaires. Les associations Les Paniers Marseillais et les Amap de Provence ont lancé, respectivement depuis 2018 et 2021, des paniers bio solidaires pour permettre à des familles en difficulté de bénéficier d’un panier hebdomadaire de fruits et légumes frais à prix réduit. La participation des familles est de 3 à 7 € pour un panier dont la valeur moyenne avoisine les 20 €. L’écart de prix est compensé par la solidarité des adhérents des Amap ainsi que par le soutien des collectivités locales, dont la Métropole. Cette initiative permet de mettre agriculture et alimentation de qualité au service de la solidarité. Une évaluation conduite par l’association « Action contre la Faim » montre que « la démarche porte ses fruits puisque trois quarts des familles interrogées affirment avoir changé leurs habitudes alimentaires grâce à ces paniers. Une centaine de familles bénéficient de ce dispositif sur le territoire de la métropole.» À venir : « la distribution de 20 000 Paniers solidaires composés de produits locaux acquis auprès des agriculteurs à destination des revenus les plus modestes : nos étudiants et nos personnes âgées.»
L’aide à la pêche artisanale et à la conchyliculture
Le Département accompagne les pêcheurs, conchyliculteurs et aquaculteurs dans la modernisation des moyens de production ainsi que le développement de la vente en circuit court. 8 ports départementaux de pêche et de commerce, soit plus de 270 navires de pêche et 430 marins-pêcheurs ainsi que 34 conchyliculteurs et une ferme aquacole sont soutenus. La collectivité soutient la création d’une organisation de producteurs « OP du Levant ». 75 projets de modernisation des navires ont été financés depuis 2018, soit 5,4 millions d’euros d’investissements.
Soutien à un élevage raisonné et économe
Le Département met également en œuvre une stratégie de consolidation de l’élevage, « une filière économiquement fragile qui contribue pourtant à valoriser et protéger notre territoire.» Une aide a été fournie pour le rachat en 2019 de l’abattoir de Tarascon par la Communauté d’agglomération Arles Crau Camargue Montagnette (ACCM) à hauteur de 2,92 millions d’euros (soit 80 % du coût de l’opération) en vue de son exploitation par un groupement d’éleveurs. Un programme de santé animale (ovins, bovins, caprins, cheptel apicole) est déployé en partenariat avec le LDA 13 sous la forme d’une prise en charge des frais d’analyses et d’interventions sanitaire à hauteur de 650 000€/an.
Michel CAIRE