Nice: Exposition « le bikini invisible » de Hippolyte Hentgen du 17 mai au 10 novembre au Mamac

Publié le 14 avril 2019 à  8h16 - DerniÚre mise à  jour le 28 octobre 2022 à  23h38

L’exposition «Le bikini invisible » de Lina Hentgen et GaĂ«lle Hippolyte est Ă  dĂ©couvrir du 17 mai au 10 novembre Ă  la galerie contemporaine du Mamac de Nice. Une proposition ponctuĂ©e de grandes toiles, films, sculptures et installations. Entre esprit fantasmatique et rĂ©surgence pop, cet univers Ă©voque un dĂ©cor de fiction, en attente de son activation.

Hippolyte Hentgen, B-R-E-E-K, 2018 Assemblage de tissus cousus et imprimés 250 x 238 cm © A. Mole Courtesy Semiose, Paris.
Hippolyte Hentgen, B-R-E-E-K, 2018 Assemblage de tissus cousus et imprimés 250 x 238 cm © A. Mole Courtesy Semiose, Paris.

Le bikini invisible
 Le titre sonne comme l’amorce d’une improbable enquĂȘte qui nous mĂšnerait sur les traces d’un bikini Ă©garĂ© en des lieux exotiques. A moins qu’il ne s’agisse d’une affaire d’attentat Ă  la pudeur dans une citĂ© balnĂ©aire Ă©crasĂ©e sous le soleil d’étĂ© ou d’un super-pouvoir accordĂ© Ă  un banal accessoire. L’intrigue qui s’esquisse lĂ  semble jouer des rĂ©miniscences du polar de gare, autant que des bandes dessinĂ©es qui bercent l’enfance ou des comics underground. DissĂ©minĂ©es dans l’espace, les crĂ©ations d’Hippolyte Hentgen surgissent comme autant d’indices et d’amorces narratives qui alimentent le mystĂšre. Des mains, jambes et pieds dĂ©mesurĂ©s, dĂ©sincarnĂ©s de tout corps ou personnage, flottent dans l’espace, se dĂ©ploient au sol ou pendent, flapis, sous leur propre poids. Leurs couleurs outrĂ©es, les ongles nacrĂ©s et la prĂ©ciositĂ© de leur prĂ©sentation sur des portants cuivrĂ©s, dĂ©samorcent l’inquiĂ©tude possible de ces corps-ilots flottants. Le fantasque et le burlesque l’emportent. Ces membres Ă  l’existence autonome, grotesques par leurs formes et leur abandon mou, prĂ©cieux par le soin des coutures et des dĂ©tails, semblent en effet tout droits sortis de cartoons, comme Ă©chappĂ©s des personnages aplatis, Ă©tirĂ©s et pulvĂ©risĂ©s avec jubilation par Tex Avery. Ces formes fondues, Ă©mancipĂ©es du destin bidimensionnel que leurs rĂ©servent dessins d’animations et bandes dessinĂ©es, jouent Ă©galement de rĂ©miniscences pop. Comment ne pas penser aux sculptures molles de Claes Oldenburg ou aux silhouettes de vinyle de ses contemporaines Teresa Burga ou Kiki Kogelnik, face Ă  cette parade de corps informes et d’objets triviaux (cigarettes, journaux). Cette Ă©vocation pop est renforcĂ©e par la prĂ©sence de tentures mĂȘlant Pin-up plantureuse et onomatopĂ©es.

Au centre de l’espace et au cƓur de l’intrigue, une grande baigneuse allongĂ©e dĂ©voile son corps sans visage. VĂȘtue du fameux bikini et bottĂ©e, cette crĂ©ature Ă©voque les jambes dĂ©mesurĂ©es des hĂ©roĂŻnes sexy des comics des annĂ©es 1960-70, notamment les amazones de Trina Robbins. Contrariant cette planĂ©itĂ©, des mains potelĂ©es, voire hypertrophiĂ©es dansent dans l’espace, animant des Ă©crans de leurs ballet de doigts. Ces mains pataudes de Mickey miment une icĂŽne de la danse contemporaine : le Hand Movie de la chorĂ©graphe Yvonne Rainer, filmĂ© en 1966 par William Davis. Hippolyte Hentgen joue de ce mĂ©tissage de langages, de cette hybridation d’univers non destinĂ©s Ă  se cĂŽtoyer. Dans son musĂ©e imaginaire, les productions de l’avant-garde, la bande dessinĂ©e, le dessin d’animation, l’illustration populaire ou le dessin de presse se mĂȘlent sans complexes, faisant surgir un univers fantasque et jubilatoire affranchi des scories des hiĂ©rarchies de genres. L’artiste Arnaud Labelle-Rojoux parle Ă  cet Ă©gard de phĂ©nomĂšne de « pollinisation » Ă  partir de ce qui constitue notre culture visuelle. Dans cet univers fĂ©cond oĂč se mĂ©tissent le grotesque et le raffinement, l’organique et l’inorganique, le dessin se dĂ©ploie dans tous ses Ă©tats. Ce bikini invisible composĂ© au Mamac est bien sĂ»r un clin d’Ɠil acidulĂ© et dĂ©bridĂ© Ă  la Riviera, Ă  ses corps alanguis et Ă  ses stĂ©rĂ©otypes ; un prĂ©lude Ă  une fiction que le visiteur est libre de construire. C’est aussi une actualisation polissonne, effrontĂ©e, follement pop et dĂ©libĂ©rĂ©ment malicieuse des Ɠuvres des grandes figures qui ponctuent les collections du Mamac.

Biographie
Lina Hentgen et GaĂ«lle Hippolyte ont Ă©tudiĂ© Ă  la Villa Arson entre 1998 et 2006. De leur rencontre est nĂ©e une collaboration Ă  quatre mains sous le nom d’Hippolyte Hentgen.
Hippolyte Hentgen a bĂ©nĂ©ficiĂ© d’une rĂ©sidence Ă  la prestigieuse Villa Kujoyama (Japon). Le travail a Ă©tĂ© montrĂ© dans de nombreuses expositions solo ou de groupe, notamment au Printemps de Septembre Ă  Toulouse en 2018 ; au MusĂ©e de l’Abbaye Sainte-Croix, Les Sables-d’Olonne ; Ă  la Synagogue de Delme ; au Crac Occitanie Ă  SĂšte ; au MAMCO Ă  GenĂšve ou encore Ă  la Villa Arson.

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