Publié le 16 avril 2019 à 14h09 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 23h39
La phase de bêta-test a commencé pour « Shop in Sud ». Née de la volonté de Fédération Commerce en 13 (FC13), cette solution digitale communautaire est destinée à redynamiser un secteur à la peine, à reconnecter entre eux (et avec leurs clients) des commerçants bien trop souvent isolés. Consulter leur catalogue, commander, se faire livrer : ce sera désormais possible avec l’application, qui a pour ambition de mettre tout le centre-ville dans la poche de l’utilisateur.
C’est une application qui incarne on ne peut mieux ce que communautaire, collaboratif veut dire. Shop in Sud, c’est son nom, est une initiative de Fédération Commerce en 13 (FC 13), regroupant près de 64 associations et quelque 6 200 commerçants basés sur le département des Bouches-du-Rhône. Et son objet, on le devine : connecter entre eux et avec leur clientèle des professionnels bien trop souvent isolés les uns des autres, reclus dans leur boutique. Et surtout loin, bien loin du monde digital. «Ils manquent de temps, d’outils, de soutien et de représentativité. Dans ce contexte économique en pleine transformation, que l’on soit commerçant de centres-villes, de noyaux villageois ou de centre commerciaux, nous devons impérativement nous fédérer autour d’un projet commun et pour un même territoire», martèle Audrey Lucchinacci, présidente de FC13. Restait à savoir à quelles problématiques devait répondre ce projet, en l’occurrence l’application Shop in Sud. Pour ce faire, «Nous avons élaboré un lourd cahier des charges», revient la présidente. Celui-là dicté par des constats. La Fédération a ainsi mis en lumière les freins à la consommation locale. Pour dresser le tableau, les clients interrogés déplorent une absence de stationnement pour 72% d’entre eux, une absence de visibilité de la disponibilité en temps réel des produits (80% des sondés), une absence de livraison au dernier kilomètre (48%) et une absence de visibilité des commerces et des market places (65%). Par ailleurs, les clients interrogés ont émis des souhaits. Entre autres, ils aimeraient profiter de ventes privées mutualisées (59%), d’un service VIP et d’une carte fidélité mutualisée (59%), mais aussi voir s’améliorer la propreté et la sécurité (48%). C’est forte de ce constat que la commission Digitalisation de FC 13 a co-construit Shop in Sud.
Start-up et associations à la manœuvre
Et si l’aspect communautaire n’est pas vain, c’est parce que le projet a vu se conjuguer le savoir-faire de divers acteurs pour répondre, à travers l’application, à toutes les problématiques précitées. Le monde entrepreneurial, tout d’abord. «Nous travaillons avec sept start-up, identifiées grâce à Medinsoft ». Elles ont pour nom Shopinzon, E3 Cargo Scoot, HT4, WinBin, Connect Sytee, Ready Park et Yper. «Par exemple, trois d’entre elles répondent au souhait de livraison des clients, puisqu’elles se sont positionnées sur cette problématique. Ce peut être via scooter électrique (ce que propose E3 Cargo Scoot et HT4, NDLR) ou encore grâce à un réseau de shoppers particuliers qui prennent en charge la course. Ce que propose Yper». La seule des sept à ne pas être basée sur le département, mais «elle est la seule à proposer cette solution au national», explique Audrey Lucchinacci. Ready Park, quant à elle géolocalisera les places de parking disponibles aux abords des commerces. Shopinzon implémentera sur l’application des catalogues de produits proposés par les commerçants, offrant aussi la possibilité de savoir quelle pièce est disponible et dans quelle boutique. «Certains choisissent d’y faire figurer tout ce qu’ils ont en stock, d’autres préfèrent cibler une offre particulière», précise la présidente. Enfin, les deux dernières start-up, WinBin et Connect Sytee, seront plus particulièrement chargées de l’aspect propreté. Mais elles ne seront pas seules, puisque Collector, un collectif composé de plusieurs associations chargées de ramassage et de valorisation de déchets ciblés se joignent également au projet. Ainsi Ça cartonne s’occupe des cartons comme son nom l’indique, les Alchimistes, quant à eux, collectent les bio-déchets qu’ils valorisent en compost. «L’association lance cette année son activité à Marseille, elle est basée rue de Lyon. Elle apportera un élément de réponse à une obligation réglementaire européenne, qui sera effective en 2023, et qui imposera de trier à la source. Professionnels, mais aussi particuliers seront concernés», explique Lorraine Guers, des Alchimistes. D’autres associations agissent également sous l’égide de Collector, comme Recyclope, qui recycle les mégots de cigarette. «Nous nous intéressons aux gisements : un déchet trié et valorisé le devient», explique Maxime Ducoulombier, président de la commission Environnement du FC13, actif au sein du collectif. Et la marge de manœuvre est belle, selon lui : «30% des déchets des hyper-centres sont des déchets de commerçants. Si on s’occupe de valoriser ne serait-ce que les cartons et les restes des cuisines, cela représente déjà 50% des déchets des professionnels », illustre-t-il. Pour ce faire, des tournées pré-déterminées ont d’ores et déjà été fixées. Et cela se fera le matin, en complément des passages en soirée des agents de la Métropole. «A terme, l’application permettra aux commerçants qui ont de grosses arrivées de prévenir la plateforme. Ce sera presque un rendez-vous en direct».
Un outil d’optimisation pour les commerçants
Parce que l’application, on s’en doute, ne répond pas seulement aux souhaits des consommateurs. Elle est également conçue comme un outil au service des commerçants, reprend Audrey Lucchinacci. «L’innovation n’est pas dans l’outil, mais dans l’usage. Nous avons fait tomber toutes les cloisons, tous les clivages». Ainsi le commerçant se voit mettre un CRM (Customer Relationship Management ou Gestion de la Relation Client) à disposition, des fichiers clients à jour. «Ils peuvent savoir quelle est leur cible et qui achète sur le site, mettre en place une opération promotionnelle sur certains produits… L’application leur offre aussi la possibilité de partager une publication Facebook à l’ensemble des réseaux sociaux. Elle contient en outre un chat en direct pour échanger entre consommateurs et commerçants… Bref, elle remet de l’humain au cœur du digital». Encore faut-il s’acculturer à ce nouvel outil, ce qui n’est pas toujours simple pour des publics pas forcément geeks. FC 13 l’a aussi prévu. «Des étudiants chefs de projet en digital œuvrent avec nous, ils vont faire des vidéos de sensibilisation, des tutoriels pour les commerçants, afin qu’ils s’approprient l’outil». A terme, l’ambition de Shop in Sud est de faire rayonner cette vitrine virtuelle, même au-delà du territoire… Mais pour l’heure elle passe l’épreuve incontournable du bêta-test, ce jusqu’à la fin du mois de mai. 200 commerces de Marseille centre-ville, Belsunce, Mazargues, Aix en Provence et Plan de Campagne ont été associés à cette première phase. Puis FC 13 fera entrer dans la danse l’ensemble de ses adhérents. «L’objectif premier, c’est d’y faire figurer au cours du premier semestre toutes les marques sur le retail, l’accessoire, le P-à-P… Puis, dans un second temps les métiers de bouche, la gastronomie, les services, afin que tous soient sur la plateforme d’ici fin 2019 ». L’idée, au final, étant de sortir les centres-villes de la spirale de paupérisation dans laquelle ils s’enlisent.
Carole PAYRAU