A Marseille, Bernard Cazeneuve prend le pouls des politiques de sécurité

Publié le 25 avril 2014 à  21h56 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  17h49

Entouré du préfet de police et du directeur départemental de la sécurité publique, le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a fait son entrée dans la cour de l’Hôtel de police de l’Evêché
Entouré du préfet de police et du directeur départemental de la sécurité publique, le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve a fait son entrée dans la cour de l’Hôtel de police de l’Evêché
Bernard Cazeneuve le nouveau ministre de l'Intérieur
Bernard Cazeneuve le nouveau ministre de l’Intérieur
Alors ministre de l’Intérieur, Manuel Valls avait fait onze fois le déplacement à Marseille.
Ce vendredi, son successeur fraîchement nommé, Bernard Cazeneuve, a consacré l’une de ses premières visites de terrain, depuis sa nomination il y a moins d’un mois, à la deuxième ville de France. Et ce, au lendemain d’un énième règlement de comptes venu allonger une liste qui ne semble pas devoir se clôturer de sitôt. Toute ressemblance s’arrête là. Car, comme il se plaira à le souligner lui-même à plusieurs reprises, Bernard Cazeneuve n’a rien d’un « pyrotechnicien» venu faire son spectacle. Ceux qui avaient fait le déplacement dans l’attente d’une annonce tonitruante ou d’un effet de manches seront restés sur leur faim. Le nouveau ministre de l’Intérieur, venu sans escale d’un ministère du Budget secoué par le scandale Cahuzac où il aura eu fort à faire pour tailler dans les dépenses et redresser des comptes alarmants (certains de ses collègues l’avaient surnommé l’homme qui dit « non »), est un bosseur et un besogneux. Une austérité de surface qui peine à cacher un sens de l’humour plutôt fin et très anglais, pour ne pas dire un certain sens de (l’auto)dérision.
C’est donc avant tout pour faire connaissance avec ses «hommes » et estimer, de visu, la réalité du terrain (et son adéquation avec les politiques de sécurité mises en œuvre), que le premier flic de France a fait son entrée dans la cour de l’Hôtel de police de l’Évêché avec 10 minutes d’avance sur le programme annoncé. Entouré du préfet de police et du directeur départemental de la sécurité publique, et après avoir passé les troupes en revue, le ministre se fera à la fois humble et admiratif face « à l’abnégation, l’esprit de service et de sacrifice » de ces hommes et femmes massés face à lui, tout en maintenant fermement le cap des objectifs fixés. Dans son message, un mot, répété à satiété : « respect ». Un mot choisi à bon escient, visiblement, puisqu’il aura fait tilt dans l’esprit des fonctionnaires. Las, témoigneront certains, «des incivilités quotidiennes» qu’ils doivent affronter et qui, de leur aveu, rend le travail bien plus difficile «ici que dans bien d’autres villes» où leur carrière les a menés.

« L’efficacité, c’est ce sur quoi nous sommes attendus »

Revenant sur la politique mise en œuvre par son prédécesseur et qui sera «approfondie» justement sous la direction de celui-là même dont il a pris la suite, Bernard Cazeneuve a insisté sur la volonté «que cette coordination des moyens ne soit pas la seule méthode». Comme «un encouragement à aller plus loin», le ministre de l’Intérieur a voulu voir le verre à moitié plein. Selon les chiffres qu’il a communiqués, les résultats sur Marseille se sont fait sentir sur les atteintes aux personnes (-14%), sur les atteintes aux biens (-8%) et sur le démantèlement de filières avec 174 armes récupérées depuis janvier contre 52 en 2013. Depuis 2012, 300 policiers et gendarmes ont été affectés au territoire marseillais en plus d’une réorganisation des services (brigades VTT, BST, dispositif ninja et unités de forces mobiles). Autant de moyens, soulignera Bernard Cazeneuve, qui doivent permettre d’accélérer le temps de résolution des affaires. « L’efficacité, c’est ce sur quoi nous sommes attendus», ne manquera pas de notifier celui qui fut maire de Cherbourg plus de onze ans. Dans le secret d’une réunion tenue à huis clos avec les acteurs de la sécurité départementale, le ministre, avant de retourner sur le terrain, d’abord au Centre de supervision urbain de Marseille (CSU), où sont scrutées et analysées les images de vidéosurveillance recueillies par les 333 caméras de la ville, puis à la rencontre des élus et des animateurs sociaux de la cité d’Air Bel (11e arrondissement), aura livré sa feuille de route : «Intensifier les saisies des avoirs indûment gagnés, articuler le travail de la globalité des services afin de lutter notamment contre l’évasion fiscale, maintenir la prévention sur les quartiers pour combattre les trafics qui peuvent éventuellement venir alimenter le terrorisme.»
Sur cette dernière question en effet, Bernard Cazeneuve, bien qu’il estime que Marseille ne «soit pas la ville la plus touchée par ce phénomène», a mis au rang des préoccupations, la lutte contre le djihad mené par de jeunes Français en Syrie. «A tous ceux qui estiment que le plan mis en place par le gouvernement pour empêcher ces jeunes de partir, ne se borne qu’à un numéro vert, je réponds qu’ils se trompent et que nous complèterons ce dispositif aussi loin et aussi longtemps que ce phénomène existera».
Paule COURNET

Le Centre de supervision urbain (CSU) : Un outil technologique de coopération entre la ville et l’État

C’est un «petit bijou» technologique qui fait la fierté du maire UMP de Marseille, Jean-Claude Gaudin, et celle des 38 policiers municipaux qui font « tourner la machine », 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Installé face à l’hôpital Européen, dans des locaux flambants neufs inaugurés d’ailleurs par le ministre de l’Intérieur de l’époque, Manuel Valls, le 8 février 2013, le Centre de supervision urbain (CSU) permet de recueillir et suivre en temps réel les images filmées par les 333 caméras de la ville. Un chiffre qui passera à 1 000 avant la fin de l’année, comme le rappelait, ce vendredi, Caroline Pozmentier, adjointe au maire, déléguée à la sécurité et à la prévention de la délinquance. Un outil qui illustre parfaitement la coopération et la collaboration menées sur les questions de sécurité (et outre les couleurs politiques) entre la municipalité et l’État.
De son propre aveu, s’il estime que «c’est par la police nationale que l’essentiel du travail de sécurisation et de recherche judiciaire doit être fait », Jean-Claude Gaudin considère que « l’engagement du maire et de la municipalité est indispensable et doit encore être renforcé ». Dans une politesse et une jovialité non feintes, aussi bien le sénateur-maire UMP que le ministre socialiste reconnaîtront volontiers la part prise par chacun dans cet engagement commun. «Les coûts d’investissement, à hauteur de 12 millions d’euros si on inclut les 600 premières caméras, auront été largement subventionnés par l’Etat, à hauteur de 50%, ce qui est un niveau de financement exceptionnel. Le fonctionnement est à la charge de la Ville et représente aujourd’hui 3 millions d’euros par an», notera encore le maire de Marseille. Des efforts communs qui s’accompagnent de mesures prises pour l’éducation et l’emploi des jeunes ainsi que pour la rénovation urbaine du cadre de vie. Le travail du CSU permet le traitement de 4 000 faits par an et la réquisition de 700 images (elles sont conservées 10 jours, en-deçà de ce que prévoit la loi qui fixe ce délai à un mois).
Rappelant qu’il fut lui-aussi le maire d’une ville portuaire et qu’à cet égard il connaît «la culture et l’esprit de liberté » qui règne dans ces cités, aussi bien qu’il en mesure les atouts et les handicaps, Bernard Cazeneuve a affiché une bonne entente avec celui qui l’accueillait, répondant à la faconde méridionale de Jean-Claude Gaudin par petites touches d’humour : «Si l’épreuve n’a pas été trop difficile pour vous, je reviendrai», s’est-il amusé dans un regard complice. Voilà donc un prochain rendez-vous d’ores et déjà fixé.
P.C.

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