Aix-en-Provence. ‘Trouble fête’ au musée des Tapisseries – Quand Macha Makeïeff convoque ses fantômes

Publié le 13 août 2021 à  13h32 - Dernière mise à  jour le 1 novembre 2022 à  14h53

A l’invitation de Christel Roy, coordinatrice des musées d’Aix-en-Provence, c’est entre les murs des salons du Musée des Tapisseries que Macha Makeïeff a convoqué esprits et fantômes qui peuplent ses rêves et parfois (souvent ?) sa vie pour réinventer Trouble fête. Une exposition inquiétante et fascinante proposée à la découverte jusqu’au 7 novembre prochain. La première installation Trouble fête fut créée en 2019 à la maison Jean Vilar parallèlement à la création du spectacle Lewis versus Alice au Festival d’Avignon.

Macha Makeïeff présente
Macha Makeïeff présente

«Le vrai scandale, c’est d’avoir grandi.» Macha Makeïeff [[Auteure, metteuse en scène, plasticienne et scénographe, Macha Makeïeff dirige La Criée, Théâtre National de Marseille où elle prépare actuellement le décor, la mise en scène et les costumes de son prochain spectacle, «Tartuffe» de Molière qui sera créé en novembre à La Criée.]] le crie et l’écrit ; et retrouve les rêves de l’enfance, les effrois aussi, tout en conviant le visiteur à retrouver les siens de l’autre côté du miroir. Au début était le chaos. L’effondrement de la vieille Russie, traumatisme historique familial enfoui quelque part dans le cerveau de la petite fille. Le chaos puis la fuite… Immense déchirure, effroyable fracture qui ne se résorbera jamais.

Puis il y a les fantômes. Celui de Lewis Carroll en compagnie duquel Macha Makeïeff a vécu une intense relation spirituelle pendant plusieurs mois. Une relation qui a profondément marquée la petite fille. Il y a Georges, aussi, et surtout. Ce jeune frère entré un jour en autisme, générant une foule de sentiments et de questionnements chez sa sœur, la petite fille, dans le cœur et le cerveau de laquelle il est omniprésent. En compagnie de Lewis et de Georges, Macha, 7 ans, nous invite à parcourir un chemin fantasmagorique peuplé d’oiseaux, d’animaux, de jouets, de sons, soit un cabinet de curiosités XXL chargé d’émotions.

Entre les marbres, les tapisseries et les boiseries du musée, cette exposition prend une dimension étrange, souvent fascinante. © Aix-en-Provence.
Entre les marbres, les tapisseries et les boiseries du musée, cette exposition prend une dimension étrange, souvent fascinante. © Aix-en-Provence.

Une salle consacrée au théâtre qui fait renaître la vie à chaque lever de rideau, une «chambre rare» où règne en majesté l’imposant rhinocéros blanc sorti des réserves du Muséum ainsi que quelques autres âmes animales. Sur le socle du rhino, une phrase de Lewis Carroll «aucun homard n’espère l’impossible…» ; suivent une «chambre excentrique» plus personnelle, une volière, un cagibi très particulier…

Comme une psychothérapie

Pour construire cet univers singulier, Macha Makeïeff est allée puiser dans les réserves de son théâtre, mais aussi chez elle, au cœur d’espaces qui entourent son quotidien, pour prélever ça et là des morceaux de rêves, des parcelles de subconscient. Elle a aussi fait son choix dans les réserves du Museum d’Histoire Naturelle d’Aix-en-Provence pour redonner vie, par leur seule présence, à ces animaux qui, selon Lewis, «ont une sorte d’âme qui leur survit après la mort.» Ici Macha Makeïeff a donc réinventé une installation pour entrer en dialogue avec un lieu chargé d’histoire, ses boiseries, ses tapisseries.

Un environnement qui fait partie intégrante de l’exposition. Pour terminer une visite qui peut s’éterniser en fonction du ressenti de chaque visiteur, c’est la voix d’Agnès Varda, un autre fantôme, qui résonne dans le «Cagibi d’Agnès et refusés» cette ultime pièce où Macha Makeïeff a décidé de mettre en scène «les choses qui n’entrent pas dans la ronde» pour les célébrer aussi. Avouons le, il est difficile de ressortir indemne au bout de ce troublant voyage. Chacun peut, s’il le désire, se retrouver face à ses rêves, à ses démons, à ses fantômes… Comme une psychothérapie. Macha Makeïeff donne des outils pour y parvenir. Avec d’autant plus de pertinence qu’elle les a expérimentés bien avant tout le monde…
Michel EGEA

Pratique. «Trouble fête» jusqu’au 7 novembre au Musée des Tapisseries,
au 28, place des Martyrs de la Résistance. Tél. 04 88 71 74 75. Ouvert tous les jours, sauf le mardi, de 10 à 12 h 30 et de 13h 30 à 18 heures. A partir du 15 octobre, de 10 heures à 12 h 30 et de 13 h 30 à 17 heures. Tarif normal : 3,70 €.
Plus d’info: Musee-des-Tapisseries

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