Avignon – Marie-Christine Letort & Xavier Gallais, lumineux dans « Providence » de Neil LaBute au Théâtre des Gémeaux dans le cadre du Off.

Publié le 21 juillet 2019 à  18h48 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  12h05

Marie-Christine Letort & Xavier Gallais dans
Marie-Christine Letort & Xavier Gallais dans

Signée Neil LaBute, auteur américain né le 19 mars 1963 à Détroit, dans le Michigan, «Providence» fait partie de ces pièces courtes assez en vogue aux États-Unis qui mêlent passions intimes et choc sociétal. Par le biais de rapports amoureux l’auteur qui a créé cette œuvre le 26 novembre 2002 au Manhattan Class Company à New York, dans sa propre mise en scène -avec comme interprètes Sigourney Weaver et Liev Schreiber- évoque au lendemain des attentats du 11 septembre 2001 la décision d’un couple adultère de changer de vie et d’identité. Elle, la quarantaine environ, c’est Abby Prescott. Lui, la trentaine s’appelle Ben Harcourt. Marié, deux enfants on devine qu’il a eu la vie sauve par la volonté de rejoindre sa maîtresse plutôt que de se rendre à son travail dans les Tours jumelles. Dans cette chambre d’hôtel coupée du monde, ils échangent leurs impressions quant à une éventuelle possibilité de s’installer ensemble. C’est tout pour l’intrigue. C’est donc fort peu, mais c’est très bien comme ça. L’auteur fait monter la pression lentement, pose en filigrane un regard impitoyable sur la dureté du monde de l’entreprise et brosse le portrait de deux êtres amoureux et démunis qui hésitent entre raison et désir d’ailleurs. Les bruits au dehors, notamment ceux des sirènes de camions de pompiers et d’ambulances ajoutent une tension supplémentaire dans le regard du spectateur. Pierre Laville qui signe le texte français (disponible à l’avant-scène théâtre), offre une mise en scène puissante et serrée, magnifiée par le jeu tout en nuances des deux comédiens. Dans le rôle d’Abby, cette femme rongée par le désir, Marie-Christine Letort n’a rien à envier à Sigourney Weaver. Elle est dans la peau de cette femme prête à un nouveau dépar, bouleversante d’authenticité et d’une présence physique inouïe. Pierre Laville, l’acteur Xavier Gallais le connaît bien puisqu’il l’a déjà mis en lumière dans la version scénique de «Baby Doll», de Tennessee Williams, mise en scène par Benoît Lavigne avec Mélanie Thierry, et Chick Ortega, et que l’on a pu voir au Théâtre du Gymnase de Marseille en mars 2010. Comédien singulier exceptionnel de densité, que l’on peut aussi voir dans le Off au Théâtre Avignon-Reine Blanche avec «Le fantôme d’Aziyadé» d’après Pierre Loti, qu’il a adapté en compagnie de son complice Florient Azoulay (ils ont beaucoup travaillé ensemble), Xavier Gallais se tord physiquement sur scène. Sa gestuelle incroyable, son phrasé syncopé et précis, ses déplacements sur scène sa manière de mettre en valeur sa partenaire de jeu, font de lui l’un des grands acteurs français. Ce dernier et Marie-Christine Letort de donner à la pièce encore plus de puissance que ce qu’elle en a en réalité.
Jean-Rémi BARLAND
Au Théâtre des Gémeaux, jusqu’au 28 juillet à 13h45. 22 €, 15 €, 10 €. Réservations au 09 87 78 05 58. theatredesgemeaux.com

Articles similaires

Aller au contenu principal