CONSEIL GENERAL

Publié le 29 mars 2013 à  4h00 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  16h12

Le budget adopté avec quatre abstentions dans la majorité et celle… de la droite

Marie-Arlette Carlotti, Janine Ecochard, Michel Pezet et Jean-François Noyes, quatre élus de la majorité départementale, se sont abstenus sur le vote du budget primitif, « une abstention qui s’adresse à la gouvernance » dixit Janine Ecochard. Une position qui a aussi été celle de Martine Vassal et du groupe « Avenir pour le 13 », saluant ainsi la réorientation des investissements du Département vers la ville de Marseille.

Le vote du budget primitif était le plat de résistance de la sénace de ce vendredi 29 mars à l'Hôtel du Département. (Photo S.P.)
Le vote du budget primitif était le plat de résistance de la sénace de ce vendredi 29 mars à l’Hôtel du Département. (Photo S.P.)
Martine Vassal et le groupe
Martine Vassal et le groupe
Séance sans encombre pour Jean-Noël Guérini malgré l'abstention de quatre élus de la majorité sur le vote du budget.
Séance sans encombre pour Jean-Noël Guérini malgré l’abstention de quatre élus de la majorité sur le vote du budget.

Le vote du budget primitif 2013 du conseil général des Bouches-du-Rhône était le plat de résistance de la séance de ce vendredi 29 mars à l’Hôtel du Département des Bouches-du-Rhône à Marseille. Il s’agissait de l’ultime délibération des 53 rapports inscrits à l’ordre du jour, les dispositions du budget primitif étant au préalable adoptées dans chaque grand domaine d’intervention, avant donner lieu à un vote sur l’ensemble des orientations budgétaires. Or, plus que le débat, c’est bien la mise aux voix de ce budget primitif qui n’aura pas manqué de réserver quelques surprises. Ainsi, Martine Vassal (UMP) et l’ensemble du groupe « Avenir pour le 13 » (UMP-Nouveau Centre et apparentés) se sont-ils abstenus de la même manière… que la conseillère générale socialiste Marie-Arlette Carlotti, également ministre déléguée aux Personnes handicapées et à la Lutte contre l’exclusion dans le gouvernement de Jean-Marc Ayrault. Des abstentions dont les motivations politiques sont bien entendu très différentes.
C’est le rapporteur du budget Hervé Chérubini qui a tout d’abord dressé les grandes orientations de ce budget primitif 2013 en insistant sur le « contexte contraint pour tous les Départements » dans lequel il avait été bâti. « L’impasse financière vers laquelle s’avancent plus ou moins rapidement les conseils généraux est connue de tous ; elle transcende les clivages politiques. C’est la Cour des Comptes elle-même qui reconnaît, je cite : « la réduction de l’autonomie fiscale due à la récente réforme de la taxe professionnelle » ; ou encore je poursuis : « une compensation des transferts qui n’a pas été opérée, en contradiction avec l’article 72-2 de la constitution ». Au risque de me répéter et de chagriner certains dans cette assemblée, c’est un discours que tient la majorité départementale depuis près de 10 ans, à propos des différentes décentralisations et des réformes initiées par les gouvernements précédents… », tient-il à rappeler.

Un budget « fondé sur une gestion rigoureuse »

Dans ce cadre, le rapporteur du budget insiste sur la nécessité « de défendre toutes les personnes qui bénéficient des politiques menées par le Département », citant notamment les « allocataires du RSA », les « personnes handicapées », les « personnes âgées dépendantes » ou les « enfants issus de familles destructurées ». « On ne doit pas accepter que les plus fragiles d’entre nous, déjà durement touchés par la crise que notre pays traverse, voient à l’avenir les politiques de solidarité s’étioler au moment où elles ou ils en ont, justement, le plus besoin. Sans une profonde réforme structurelle de nos modes de financements, les Départements ne pourront malheureusement bientôt plus faire face à l’augmentation continue de leurs dépenses sociales : la loi sur la prise en charge de la dépendance est une urgence, d’autant plus que le ciel s’assombrit avec la baisse annoncée des dotations de l’Etat. En tant qu’élus locaux, nous avons une responsabilité : celle de nous battre et d’agir pour notre territoire. Nous ne devons pas nous laisser engluer dans la morosité mais au contraire continuer à aller de l’avant ! », insiste Hervé Chérubini.
Et d’estimer que le budget 2013 de 2,5 Mds€ dont près de 560 M€ d’investissement, qui s’inscrit dans une démarche « volontariste et responsable », est « conforme à nos engagements, fondé sur une gestion rigoureuse visant à limiter nos dépenses de fonctionnement courant, tout en assumant pleinement nos missions sociales ». Le rapporteur du budget souligne ainsi que « les charges de personnels sont en évolution raisonnée de +1,6% alors que le moyenne des Départements est d’environ 2% ». Une évolution qui inclut les emplois d’avenir à hauteur de 1,6 M€, « c’est-à-dire qu’à périmètre constant, la hausse n’est que de 1,1% entre 2012 et 2013 ». Les dépenses d’administration générale, services généraux, patrimoine, bâtiments, systèmes d’information et de télécommunication et communication étant de leur côté en hausse de 0,7%, « l’ensemble de nos moyens généraux est en évolution extrêmement mesurée avec seulement +1,1% ».

« Le Département qui investit le plus »

Hervé Chérubini indique que « dans le même temps, nous maintiendrons un haut niveau d’investissement, pour soutenir l’activité et donc l’emploi dans notre département ». Et le rapporteur du budget de citer notamment les 135 M€ alloués aux crédits de paiements de l’aide aux communes, qui sont portés à « des niveaux jamais atteints », les 110 M€ consacrés à la politique de l’éducation dans la construction, la rénovation et la maintenance des collèges du département, les 80 M€ investis dans le réseau routier, les 40 M€ qui abondent la politique des transports ou les 20 M€ inscrits pour développer le logement et l’habitat. « Nous serons encore en 2013 le Département de France qui investit le plus avec près de 560 M€ », précise-t-il.
Et d’en conclure que le budget proposé est « sérieux », qu’il préserve « les équilibres financiers » et « permet de maximiser l’autofinancement », le montant de l’emprunt d’équilibre étant limité à 313,8 M€. Hervé Chérubini le qualifie aussi de « budget anticrise » exprimant « qu’en ces temps de crise, nous avons plus que jamais besoin de la puissance publique ! ». « Ce budget affirme le Département dans son rôle, celui de protecteur, garant du vivre ensemble, de la cohésion sociale ; un Département stratège, animateur du territoire, facilitateur de projets. C’est enfin je le crois, un budget cohérent, réaliste et volontaire », plaide-t-il, estimant qu’il traduit une « gestion rigoureuse et ambitieuse au service des Bouches-du-Rhône ».
Ce discours a « assez peu étonné » Didier Reault (UMP) qui est intervenu au nom du groupe « Avenir pour le 13 ». « On assiste habituellement à une litanie de critiques envers le gouvernement. Que n’avons-nous pas entendu à ce sujet. Et aujourd’hui, rien. J’entends la crise… mais elle n’a pas commencé aujourd’hui ! Vous m’aviez habitué à plus d’honnêteté intellectuelle », lance-t-il à l’attention du rapporteur. « Nous aurions aimé quelques mots sur ce gouvernement », poursuit-il, jugeant que la majorité départementale est passée d’« un discours au vitriol à une potion au Synthol ».

« Le gouvernement ne fait pas mieux que le précédent »

Car dans ce budget, Didier Reault souligne que « manifestement ce sont les concours de l’Etat qui posent problème ». « L’ensemble du manque à gagner est de 134 M€ rien que pour l’année 2013. Sur 10 ans, ce sont 500 M€. Donc la seule année 2013 représente 25% des 10 dernières années », observe-t-il. Ce qui l’amène à en conclure : « Le gouvernement ne fait pas mieux que le précédent ».
Loin de « l’espoir » que certains ont cru voir dans l’alternance politique au plan national, il dénonce au contraire « l’étouffoir » dans lequel sont plongés les citoyens. « On va étouffer l’activité économique car les charges sur les entreprises et les ménages sont trop lourdes » alors que « l’Etat gratte les collectivités locales ». Et d’estimer que « ce sont les classes moyennes » qui paient la note, notamment via la taxe foncière sur le bâti sur laquelle repose « une grosse part de ce budget ».
Hervé Chérubini ne manquera pas de lui répondre sur le thème de « l’honnêteté intellectuelle ». « Qui a mis en place le RMI en 2006, poursuivi par le RSA ? », interroge-t-il, avant de souligner que si « les classes moyennes sont écrasées, ce n’est pas par le Département ». « Nous sommes 72e sur 95 sur les taux de fiscalité et l’un des neuf départements qui n’ont rien changé cette année. L’effort fiscal d’un ménage est en moyenne de 172 € par ménage, il est de 166 € dans le département », rétorque-t-il.
Didier Reault salue en revanche les dépenses d’investissement, « un budget important » dont il se félicite qu’il ait été réorienté sur la ville de Marseille. « Nous ne pouvons que soutenir cet événement même s’il est un peu tardif et que nous aurions aimé qu’il vienne un peu plus tôt », précise-t-il. Et de conclure : « La faillite des collectivités, c’est l’Etat qui la provoque. Ce sont vos amis qui la provoquent. Donc nous nous abstiendrons sur ce budget. » Une abstention qu’Hervé Chérubin qualifiera de « positive ».

« Cet acte III de la décentralisation nous inquiète »

Pour le groupe communiste, Jean-Marc Charrier rappelle que « la réalisation de ce budget se fait dans un contexte dégradé » dans lequel « les collectivités locales ne sont pas épargnées ». « L’objectif du gouvernement est toujours de ramener à 3% le déficit public en 2013 et à l’équilibre en 2017. Cela conduit à une baisse des dotations de 3,3 Mds€ en trois ans et nous oblige à des restrictions. Avec cette obstination d’alignement sur des dogmes libéraux et l’acte III de la décentralisation, on peut s’interroger sur l’avenir du conseil général, particulièrement dans ce département », dénonce le président du groupe communiste.
Pointant « la baisse de 10% de certaines subventions à des associations », il souligne que cela conduit « parfois au licenciement des salariés », indiquant également que « certaines dépenses sociales sont remises en cause » par l’absence de compensations de l’Etat. « Cet acte III de la décentralisation nous inquiète car ce sont les plus précaires qui sont les plus touchés », déplore-t-il. Ainsi, s’il ne regrette pas d’avoir mis fin au Sarkozysme, il observe qu’au vu notamment de la poursuite de « la politique de remise en cause systématique du service public », ses « attentes » restent à ce jour « insatisfaites ». Et d’en appeler à « un moratoire sur toutes les mesures du gouvernement qui vont à l’encontre du rôle de rempart que joue le Département ».
Dans ce cadre, Jean-Marc Charrier se réjouit que « le montant de l’investissement reste élevé, ce qui contribue à l’emploi dans ce département ». Et d’indiquer que le groupe communiste votera donc ce budget.
Mario Martinet, président du groupe PS, juge quant à lui que « le contexte de crise est sans précédent » et que loin de ce que laissait entendre l’ancien président de la République l’an passé, cette dernière « n’est pas derrière nous ». Et de s’adresser à la droite : « Non seulement vous ne l’avez pas vu venir, mais vous avez permis qu’elle s’installe durablement. Vous avez la mémoire courte : ce sont 10 ans de gestion de droite et 5 ans de Sakozy qui ont mis la France à genoux avec 600 M€ de dettes, 500 000 emplois perdus, le bouclier fiscal et l’abandon des services publics. Oui, le gouvernement n’a pas la tâche facile. »

« Non-augmentation des impôts comme c’est le cas depuis 7 ans »

Il juge que « loin de subir la crise, le conseil général a intégré ses contraintes » pour consacrer son budget « à des priorités intangibles et efficaces pour notre département ». « Ce qui a permis de dégager une enveloppe de 553 M€ pour l’investissement avec la non-augmentation des impôts comme c’est le cas depuis 7 ans », insiste-t-il en précisant que son groupe votera ce budget.
C’est le moment choisi par Janine Ecochard pour indiquer qu’elle s’abstiendrait sur cette délibération, « une abstention qui s’adresse à la gouvernance ». Une position qui était également celles, « pour les mêmes raisons », de Michel Pezet et de Marie-Arlette Carlotti, alors que Jean-François Noyes choisissait lui aussi de s’abstenir.
Jean-Noël Guérini souligne pour sa part que « nos choix budgétaires vont vers le social qui représente plus de 60% des dépenses de fonctionnement, soit près de 1,2 Md€ ». Il indique qu’il signera également 150 contrats d’avenir, « une chance énorme pour elles et ceux qui auront l’opportunité d’acquérir de l’expérience et d’apprendre un métier ». Des éléments qui, s’ils donnent satisfaction, seront définitivement recrutés par le conseil général. Et de réaffirmer « la priorité donnée à l’investissement car ce n’est que par l’investissement que nous arriverons à créer de l’activité et de l’emploi ».
Le président du conseil général évoque également « le poids de la décentralisation évalué à 500 M€ en 2012 ». « Tous les départements de France sont concernés, toutes les communes. Dix ans que ça dure », rappelle-t-il. Avant de s’adresser à Michel Pezet. « La différence entre vous et nous c’est que quand nous sommes allés à Paris, nous avons pu inscrire 8 M€ de plus en recettes : c’est un travail de fond mené auprès de deux ministres. Les 500 M€, je vous charge d’aller voir les ministres intéressés pour qu’ils puissent nous les rembourser », martèle Jean-Noël Guérini.

Jean-Noël Guérini salue l’abstention de la droite

Et le président du conseil général d’enchaîner : « Que l’Etat soit hier de droite ou aujourd’hui de gauche, les premiers investisseurs de la Nation sont les collectivités locales. Où en serait sans elles le Grand port maritime de Marseille (GPMM), la SNCM pour laquelle il est indispensable que la Caisse des dépôts et consignations (CDC) assume ses responsabilités ? »
Indiquant que le conseil général va souscrire un emprunt obligataire de 500 M€ sur la période 2013-2017, il assure que cela va permettre de « diversifier nos ressources dans un contexte bancaire tendu » tout en maintenant une « épargne nette confortable avec près de 170 M€ ».
Il saluera ensuite Martine Vassal, présidente du groupe « Avenir pour le 13 », dont il prend acte de la décision de s’abstenir, indiquant qu’il a « du respect pour l’opposition » et que « notre devoir d’élu est d’être à l’écoute des messages de son opposition », et remerciera les communistes « d’être à mes côtés dans les moments difficiles ». Avant de s’adresser à Mario Martinet : « Nous avons fait un très long chemin ensemble et nous le continuerons ».
Enfin, Jean-Noël Guérini martèle que « les débats sur une certaine échéance électorale ne l’intéresse pas. Dieu reconnaîtra les siens en ce vendredi Saint. » Et d’en finir avec une citation : « Remercie celui qui t’a déçu, il te délivre d’un mal que tu ne connaissais pas ».
Le budget sera finalement adopté avec les voix du groupe PS, moins quatre abstentions, et les voix du groupe communiste, sans aucune voix contre.

Serge PAYRAU

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