CPCCAF/ CCI Marseille Provence : La francophonie économique à l’œuvre en Afrique

Publié le 10 juillet 2018 à  9h25 - Dernière mise à  jour le 28 octobre 2022 à  18h53

La coopération économique entre l’Europe et l’Afrique s’est gravée un peu plus dans le marbre, le 25 juin dernier au palais de la Bourse. La Conférence permanente des chambres consulaires africaines et francophones (CPCCAF) et la CCI Marseille Provence ont en effet signé une convention de partenariat industriel et commercial par le biais d’AfricaLink, à l’occasion de la 12e édition des ateliers de la coopération consulaire.

Jean-Luc Chauvin président de la CCI Marseille-Provence et Frédéric Ronal vice président en charge de l'international viennent de recevoir l'Afrique francophone... (Photo CCIMP)
Jean-Luc Chauvin président de la CCI Marseille-Provence et Frédéric Ronal vice président en charge de l’international viennent de recevoir l’Afrique francophone… (Photo CCIMP)
Créer des liens de coopération économique : c’est l’essence de la Conférence permanente des chambres consulaires africaines et francophones (CPCCAF), et toute la visée de la signature, le 25 juin dernier, d’un accord partenarial par le biais d’AfricaLink entre la CCIMP et ledit réseau. Pour mémoire, il compte 31 pays, 130 membres adhérents directs et plus de 600 chambres bénéficiaires indirectes. Et il a vu le jour voilà déjà 45 ans. «Ses fondateurs étaient à l’époque des précurseurs», avance Mounir Mouakhar, vice-président de l’entité et président de la Chambre de commerce de Tunis. Mais c’est surtout depuis la structuration du secteur privé sur la rive Sud de la Méditerranée que cette francophonie économique peut véritablement se mettre en œuvre. C’est ce qu’observe Yves Delafon, président d’AfricaLink, communauté des entrepreneurs d’Afrique, de Méditerranée et d’Europe créée il y a un an à l’initiative de la CCIMP : «L’apparition d’une classe d’entrepreneurs en Afrique était le chaînon manquant, et c’est grâce à cette émergence que la coopération fonctionnera». Mais il faudra d’autres ingrédients pour que la mayonnaise prenne, le premier d’entre eux étant le transfert des compétences et de l’expertise dont sont capables décideurs et institutionnels de la rive Nord. La dynamique en question s’est déjà amorcée, rappelle le président de la CPCCAF, Essohouna Meba : «Le plan consulaire mis en place par le biais de l’AFD (Agence française de développement) est une réussite. Nous sommes en effet accompagnés et notamment nos cadres, dans le but de mieux gérer les chambres consulaires et d’atteindre un niveau d’expertise avéré». Un programme de «compagnonnage» dans lequel la CCIMP a joué son rôle, et qui a déjà produit du fruit, illustre Ahmed Baba Eleya, président de la CCI de Mauritanie. «Grâce au compagnonnage, notre chambre détient une cartographie complète des entreprises du pays. Pour les mauritaniens, c’est un projet concret qui a fait naître d’autres ambitions». Reste à présent à passer à la cadence supérieure, martèle Essohouna Meba : «Notre faiblesse, c’est le manque de savoir-faire. Nous avons donc très soif de la tech. Elle doit voyager, la France doit jouer son rôle. Nous voulons des territoires forts à travers le transfert de compétences. Sans elles, on ne peut rien faire».

Fertiliser aussi le terrain Sud-Sud

Passer la seconde, c’est justement ce qui est prévu, assure Jean-Luc Chauvin, président de la CCIMP. «Depuis 18 mois, nous créons cette francophonie économique. La CCIMP est en train d’en rassembler les intervenants. Le compagnonnage était une première étape, aujourd’hui on a décidé d’aller plus loin ensemble. Ici, on est au cœur d’un écosystème qui permet de l’accomplir». Et le temps presse, pour Mounir Mouakhar : «Si nous ne nous mettons pas à l’œuvre, d’autres puissances qui occupent le terrain pourraient se saisir de cette question de la francophonie». D’autant qu’elle a du sens, illustre Frédéric Ronal, vice-président de la CCIMP aux affaires internationales: «Selon une enquête menée auprès d’entrepreneurs, les deux principaux points de blocages à l’export, c’est d’une part le fait que l’entreprise, notamment la PME, pense qu’elle n’est pas de taille à s’internationaliser, et d’autre part la barrière de la langue». Tel est donc l’un des objectifs de cette coopération : «Se rassembler entre francophones pour faire du business », appuie Yves Delafon. Ce, de façon multidimensionnelle, bilatérale, puisqu’il est également question de relations «Sud-Sud, et non pas uniquement Nord-Sud. Et nous pouvons vous accompagner sur les bonnes pratiques, pour vous faire gagner du temps», précise Jean-Luc Chauvin.

Des formations pour la jeunesse

De façon concrète, le travail de la CPCCAF, «c’est 220 projets concrets au service des territoires», détaille l’élue à la ville de Marseille Maliza Saïd, évoquant par ailleurs «une mandature clairement ouverte sur l’Afrique et le Sud» au sein de la municipalité. Parmi les chantiers bien amorcés, le programme de formations Archipelago, visant à la formation professionnelle et entrepreneuriale dans douze pays d’Afrique, ce pour répondre aux défis de la crise migratoire, la tenue du baromètre annuel des entreprises africaines, ou encore Potamos, projet pour la professionnalisation de l’information économique. Avec la chambre de commerce de Mauritanie, qui elle aussi a signé un accord de partenariat le même jour, la coopération va se formaliser davantage encore dans les années à venir. «Nous prévoyons l’organisation d’une foire, ainsi que la mise en place d’une école de commerce avec Kedge Business School », annonce Ahmed Baba Eleya. Kedge qui a déjà investi Dakar, note Yves Delafon, précisant que « l’AMU, a aussi un rôle à jouer dans la francophonie en tant que facilitateur et accompagnateur». Ce d’autant que l’un des plus gros besoins formulés par Essohouna Meba, il se formalise en termes d’ingénierie de formation, qu’elle soit continue ou professionnelle. «Il faut offrir des métiers à la jeunesse», martèle-t-il. Le président de la chambre de commerce de Mauritanie enfonce le clou : «Les formations que l’on a sont dispensées par le public, puisque le privé n’existait pas jusqu’ici. Et comme il émerge enfin aujourd’hui, il y a de nouveaux besoins. Ainsi ces formations sont-elles inadaptées à l’actuel tissu économique. Le public recrute des enseignants, des administratifs… Maintenant que le privé est devenu un marché, il faut pouvoir orienter vers lui la population. Car une jeunesse sans emploi est une bombe à retardement pour nos pays». Mais cette observation-là est valable partout, quel que soit la rive où l’on évolue, reprend Jean-Luc Chauvin, exhortant à avancer de concert sur ces questions et à «conclure des accords gagnant-gagnant». Le sens de la marche est donc indiqué, ne reste donc qu’à mettre un pied devant l’autre. Les présidents des chambres consulaires africaines sont confiants. « L’organisation de la francophonie avait toujours eu une dimension politique. A présent, l’échelle économique sera également intégrée», conclut Ahmed Baba Eleya.
Carole PAYRAU

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