Chronique cinéma d’Eric Delbecque: Equalizer 2 ou le voyage du bon samaritain…

Publié le 16 septembre 2018 à  10h23 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  13h46

Vous avez des doutes sur le deuxième numéro d’Equalizer ? Vous pensez qu’il sera peut-être moins efficace que le premier ? Soyez rassurés : il mérite vraiment deux heures de votre temps. Denzel Washington se révèle magistral et la mécanique de l’intrigue, bien huilée, ronronne parfaitement. Elle ne brille pas par son originalité : on pourrait même regretter un certain classicisme.

equalizer.jpgMais l’essentiel, on plutôt ce que visait le réalisateur, se trouve ailleurs. Dans l’approfondissement du personnage de Mc Call et dans la nature des perceptions des «gens» du renseignement. Comment pensent-ils, comment voient-ils le monde ? Comment se recyclent les spécialistes d’un appareil de défense et de sécurité? Comment se déforme-t-on à force de voir le mauvais côté de la nature humaine ? Indiscutablement, une introspection des hommes de l’ombre progresse discrètement à travers le film, qui fait très certainement écho aujourd’hui au questionnement structurel des agents de l’État qui s’interrogent sur le sens de leur engagement.

A l’ère de la présidence Trump et de la montée en puissance de la société de surveillance, les combats pour la liberté menés à travers des organismes publics dédiés à la sécurité nationale peuvent rapidement dériver en dévouement pour une machine sans conscience ou tout au moins dénuée de finalité. Comme si l’objectif semblait simplement de protéger un système qui n’a comme ambition que de durer.

Face à cette vaste problématique, le personnage incarné par Denzel Washington tente de retrouver le sens de l’engagement pour les autres. Ayant choisi de devenir un recours pour ceux qui ne disposent plus d’aucun secours, il va enquêter sur l’assassinat de sa meilleure amie et mettre à jour une filière de mercenaires, prêts à toutes les atrocités en échange d’une grosse quantité de dollars.

Ce qui se révèle précieux dans ce film, ce sont les histoires de vie des hommes et des femmes croisés par Mc Call, qu’il va consciencieusement tenter d’aider : un jeune noir en perdition, un vieillard poursuivant son dernier rêve et une fille paumée victime de brutes malsaines. Visage du bon samaritain, il cherche une rédemption et estime devoir payer le prix des choix qu’il a faits pour son pays.

Cette attention aux autres que développe le héros dans une société de défiance fait écho à la crise de confiance que traverse l’Occident. Nous doutons de nos leaders et suspectons nos élites de ne vouloir que leur enrichissement personnel. Comme si plus aucune solidarité ne liait gouvernants et gouvernés. A l’heure où les chefs trahissent les idéaux qu’ils ont promis de protéger, Mc Call s’acharne à réparer les vies brisées et à préserver celles qui menacent de sombrer. A contrario, ceux qu’ils pourchassent piétinèrent leur serment et deviennent les bourreaux de ceux qui plaçaient leurs plus grands espoirs en eux. Un blockbuster plein de sous-entendus astucieux qu’il convient de ne pas rater.

Eric Delbecque est l’auteur de : Les super-héros pour les nuls (First)
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