Emmanuelle Haïm, orfèvre pour des bijoux musicaux de Haendel et Bach, au Grand Théâtre de Provence

Publié le 13 décembre 2017 à  18h42 - Dernière mise à  jour le 28 octobre 2022 à  17h50

Emmanuelle Haïm et les solistes aux saluts devant Le Concert d’Astrée, orchestre et chœur. (Photo M.E.)
Emmanuelle Haïm et les solistes aux saluts devant Le Concert d’Astrée, orchestre et chœur. (Photo M.E.)
Ne demandez pas à Emmanuelle Haïm si elle aime Haendel. La réponse, positive, saute aux yeux lorsqu’on la regarde diriger… Et aux oreilles à l’écoute du résultat ! Prenez le «Dixit Dominus», par exemple, comme mardi soir au Grand Théâtre de Provence plein comme un œuf pour l’événement. Totalement habitée par la musique, la directrice musicale a fait briller comme jamais cette première grande œuvre de jeunesse d’un compositeur âgé de 22 ans. Sa lecture est d’une acuité absolue et permanente pour livrer une interprétation dynamique, puissante et néanmoins nuancée d’une partition follement riche. Il faut dire que la dame, à la tête de son «Concert d’Astrée», orchestre et chœur, sait qu’elle peut compter sur les qualités multiples d’une des meilleures phalanges baroques du moment. Souplesse des cordes, précision des vents, continuo sans faille : le son est magnifique et solide. On peut en dire autant d’un chœur qui semble prendre un énorme plaisir à servir des polyphonies flamboyantes. Les solistes sont à la hauteur avec Emöke Bardth, soprano 1, voix directe, puissante et précise dans les aigus, Lea Desandre, soprano 2, voix chaude et veloutée à la belle diction, Damien Guillon, contre-ténor à la voix bien maîtrisée et d’une grande musicalité, Emiliano Gonzalez Toro, ténor limpide aux attaques franches et à la belle projection et Victor Sicard, agréable basse baroque avec une ligne de chant bien tenue. En deuxième partie, pour le Magnificat en ré majeur de Bach, l’orchestre s’étoffait avec trompettes, timbales et hautbois pour servir la musique du Cantor avec bonheur. Bien différente que celle du «Dixit Dominus» de Haendel, l’architecture du Magnificat de Bach est plus structurée et maîtrisée malgré le côté populaire et joyeux de l’œuvre. C’est du Bach dans toute sa splendeur, solide, charpenté ; ici rien n’est laissé au hasard et le côté foisonnant un peu débridé que l’on pouvait entendre chez Haendel, entre dans des cadres bien déterminés. Pour donner le bijou, Emmanuelle Haïm livre une direction d’orfèvre mettant à nouveau en lumière les qualités des instrumentistes et des voix. Un immense plaisir qui sera prolongé avec deux «bis» : un sublime chœur final de l’oratorio «Theodora», à notre avis le plus beau de Haendel, et un «Alleluia» majestueux avec les solistes qui ont intégré le chœur pour recueillir une part des bravi tonitruants et mérités délivrés par une salle conquise. On en redemande !
Michel EGEA

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