Environnement et Agriculture. ‘4 pour 1000’ : recommandations pour préserver le carbone des sols en Outre-Mer et atténuer le changement climatique

Publié le 21 mars 2023 à  9h00 - Dernière mise à  jour le 6 juin 2023 à  20h58

Coordonnée par le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) en partenariat avec l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE) et l’Institut de recherche pour le développement (IRD), l’étude «4 pour 1000» Outre-mer dresse un bilan inédit des stocks de carbone du sol des territoires ultramarins. Les auteurs formulent des recommandations opérationnelles et de recherche pour préserver ces stocks élevés et répondre aux grands enjeux de l’agriculture face au changement climatique au niveau national et territorial. es résultats de l’étude sont présentés au Salon international de l’agriculture.

Prise et enregistrement d’un spectre infra-rouge pour mesure in situ des teneurs en carbone du sol en Guyane. © IRD, Ernest Kouakoua
Prise et enregistrement d’un spectre infra-rouge pour mesure in situ des teneurs en carbone du sol en Guyane. © IRD, Ernest Kouakoua

L’Initiative internationale «4 pour 1000» vise à mettre en place des actions concrètes pour augmenter les quantités de carbone stocké dans les sols, notamment par des pratiques agricoles et forestières adaptées.

Si le potentiel des sols métropolitains a fait l’objet d’une évaluation en 2019, celui des territoires ultramarins est jusqu’ici méconnu. Dans le cadre de l’étude «4 pour 1000» Outre-mer, un consortium coordonné par le Cirad en partenariat avec INRAE et l’IRD, avec l’appui financier de l’Ademe et le soutien du ministère des Outre-mer dresse pour la première fois un état des lieux des connaissances pour la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, La Réunion, Mayotte, Saint-Martin et Saint-Barthélemy.

Territoires ultramarins: un rôle important malgré leur faible superficie

Le résumé réalisé pour les décideurs souligne deux enseignements. En matière de stocks de carbone dans les sols, les territoires ultramarins jouent un rôle important malgré leur faible superficie (15 % de celle de l’hexagone) : ils équivalent à environ 20 % des stocks de carbone des sols de métropole. Cela s’explique essentiellement par la minéralogie originale de ces sols développés sur roches volcaniques, mais révèle également l’impact de leurs usages (forêt, prairie, canne à sucre…). Deuxième constat : les données sur le carbone du sol dans ces territoires sont incomplètes. Les sols de la Guadeloupe, de la Martinique, de Guyane et de La Réunion sont documentés de façon conséquente mais néanmoins parcellaire. En revanche, aucune information n’existe encore pour Mayotte, Saint-Barthélemy et Saint-Martin. En outre, du fait de l’importance de la forêt guyanaise – équivalant à 46 % de la superficie forestière métropolitaine – le carbone stocké dans la biomasse aérienne de ce territoire a spécifiquement été abordé dans le cadre de cette étude. Il en ressort qu’il équivaut à 120 % du carbone aérien des forêts métropolitaines.

une série de recommandations

Pour répondre aux objectifs de l’Initiative «4 pour 1000» et de la Trajectoire 5.0, lancée en 2019 par le ministère en charge des Outre-mer, l’étude «4 pour 1000» Outre-mer formule une série de recommandations.

Premièrement, il faut préserver les stocks élevés de carbone du sol et de la biomasse aérienne dans les territoires ultramarins et limiter leur diminution.

Recommandation n°1 : intégrer dans la Politique agricole commune la rémunération des services écosystémiques associés aux pratiques agricoles et forestières préservant les stocks des sols.
Recommandation n°2 : lutter contre la spéculation et la rétention de foncier agricole.
Recommandation n°3 : promouvoir les pratiques agroécologiques grâce à des mesures incitatives et à la communication.
Recommandation n°4 : faciliter l’accès aux moyens nécessaires à la mise en œuvre des bonnes pratiques : investissement, coopératives d’utilisation de matériel agricole (Cuma) et formations.
Recommandation n°5 : transposer le Label bas-carbone pour contribuer à l’adoption de pratiques stockant du carbone par une incitation économique.

cinq actions de recherche sont recommandées

Deuxièmement, cinq actions de recherche sont recommandées pour y contribuer

1- Accroître la connaissance des stocks de carbone du sol et des bilans de gaz à effet de serre dans les territoires ultramarins pour mesurer les retombées des politiques publiques de lutte contre le changement climatique.
2-Adapter les méthodes de quantification des capacités de stockage du carbone dans les sols pour transposer le Label bas-carbone aux conditions et cultures tropicales.
3- Renforcer les travaux sur la dimension sociale – à ce jour peu explorée – pour favoriser les innovations et l’adoption de bonnes pratiques.
4- Développer des approches co-construites d’évaluation de scénarios agroécologiques à l’échelle de chaque territoire ultramarin.
5- Créer des espaces de dialogues entre acteurs scientifiques, politiques, agricoles et forestiers, pour mieux intégrer les territoires d’Outre-mer dans les engagements français et européen en matière de lutte contre le changement climatique.

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« 4 pour 1000 », les sols pour la sécurité alimentaire et le climat

L’Initiative internationale «4 pour 1000» incite les acteurs à s’engager dans une
transition vers une agriculture régénératrice, productive, hautement résiliente,
fondée sur une gestion adaptée des terres et des sols, créatrice d’emplois et de
revenus, et ainsi porteuse de développement durable. Elle veut montrer que l’agriculture peut apporter des solutions concrètes au défi posé par les dérèglements climatiques tout en relevant celui de la sécurité alimentaire à travers la mise en œuvre de pratiques agricoles adaptées aux conditions locales : agroécologie, agroforesterie, agriculture de conservation, gestion des paysages…)]

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