Cinéma: Robert Guédiguian présente « Une histoire de fou » au Festival d’automne de Gardanne

Publié le 19 octobre 2015 à  22h51 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  13h44

Robert Guédiguian au Festival d'Automne de Gardanne le 17 octobre (Photo J.-R. B)
Robert Guédiguian au Festival d’Automne de Gardanne le 17 octobre (Photo J.-R. B)
Syrus Shahidi, Robert Guediguian, Ariane Ascaride, Simon Abkarian lors de leur passage à Marseille (Photo Robert Poulain)
Syrus Shahidi, Robert Guediguian, Ariane Ascaride, Simon Abkarian lors de leur passage à Marseille (Photo Robert Poulain)

Dans le film «L’armée du crime» le personnage interprété par Grégoire Leprince-Ringuet posait des bombes. Dans «Une histoire de fou», incarnant le journaliste Gilles Tessier, il en reçoit les éclats d’une lancée contre la voiture de l’ambassadeur de Turquie à Paris, (attentat mené par Aram un activiste arménien combattant l’état turc responsable du génocide contre son peuple). Il en est gravement blessé et se verra secouru dans son calvaire physique et moral par la mère du terroriste qui n’aura de cesse de vouloir faire se rencontrer le bourreau et sa victime. Complexe, refusant manichéisme et simplifications politiques, ce long métrage de Robert Guédiguian est sans doute le plus personnel de sa carrière. Celui où, il a mis le plus de son histoire familiale, de ses engagements citoyens et de ses indignations républicaines. Un film en plusieurs parties, avec un début tourné en noir et blanc qui retrace le procès de Soghomon Thelirian (grand-père d’Aram) qui courant 1921 a exécuté en pleine rue berlinoise Talaat Pacha, principal responsable du génocide arménien et qui fut acquitté par un jury populaire allemand. Puis, la narration se centre sur la préparation du meurtre de l’ambassadeur turc, du départ d’Aram à Beyrouth après son geste vengeur, du chagrin de ses parents, du combat de Gilles pour réapprendre à marcher, de la prise de conscience politique d’Aram, conscient que la violence est une impasse, et dans un final poignant la réaffirmation par Robert Guédiguian des valeurs humanistes seules capables d’apaiser le monde obnubilé par la violence. Et quels acteurs ! Tous bouleversants avec en tête Anne Ascaride, -«Elle est devenue totalement Arménienne», a précisé non sans humour le réalisateur en présentant son film à Gardanne lors de sa venue au Festival d’automne– et Simon Akbarian qui campe un père d’Aram rempli d’une douleur pudique. Grégoire Leprince-Ringuet, sobre à l’extrême donne de son personnage une densité psychologique très subtile mais la palme de l’interprétation revient à Syrus Shahidi qui dans le rôle d’Aram rappelle Omar Sharif jeune. Ample, précis et long (trop peut-être) «Une histoire de fou» apporte autant de réponses qu’il ne pose de questions. On songe aux «Justes» de Camus, aux «Chemins de la liberté» de Sartre où il est montré que l’on a forcément «Les mains sales» quand on résiste à l’oppresseur. Le tout serti d’une musique-diamant signée Alexandre Desplat, compositeur et complice de Robert Guédiguian. Un beau long métrage filmé à hauteur d’homme, sans rouerie ni complaisance mais avec une foi inébranlable dans le cinéma, art que Robert Guédiguian maîtrise avec panache, humilité, foi en ses frères de cœur et un rare sens de la dramaturgie.
Jean-Rémi BARLAND

« Une Histoire de fou » de Robert Guédiguian avec Simon abkarian – Ariane ascaride – Syrus Shahidi – Grégoire Leprince-Ringuet – Razane Jammal – Robinson Stevenin – Siro Fazilian – Amir El Kacem… Sortie dans les salles le 11 novembre 2015

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