Fondation Orange. Entretien avec Vincent Parisot : « Nos maisons digitales, nées en Afrique, sont centrales dans notre démarche »

Publié le 1 mars 2021 à  10h37 - Dernière mise à  jour le 31 octobre 2022 à  14h58

A l’occasion d’une remise de prix à onze associations marseillaises œuvrant dans des domaines soutenus par la Fondation Orange, Vincent Parisot, le directeur de la communication et de la RSE dans le Grand Sud-Est de la société Orange est revenu sur les actions menées. Entretien.

Vincent Parisot, directeur de la communication et de la RSE pour la société Orange dans le Grand Sud-Est (Photo DR)
Vincent Parisot, directeur de la communication et de la RSE pour la société Orange dans le Grand Sud-Est (Photo DR)

Sans maîtriser le numérique correctement, on peut se retrouver complètement sorti du système

Destimed: Quelles sont les missions de la Fondation Orange ?
Vincent Parisot: Aujourd’hui la Fondation créée en 1987 est présente dans 27 pays. Elle a grandi de manière progressive. Nous nous adaptons suivant les pays pour accompagner des sujets plus que d’autres. En Afrique, par exemple, nous avons monté des «villages Orange» où vous avez une école, un espace médical. Nous essayons sur place de positionner les villages à des endroits stratégiques sur le plan géographique pour que l’écosystème autour puisse permettre à des enfants d’aller plus facilement à l’école, comme à des adultes de mieux pouvoir se soigner. En France, le contexte est différent : on s’appuie sur d’autres sujets, comme des projets liés à l’inclusion numérique. Le numérique est un outil extraordinaire, que ce soit pour avoir du contenu, de l’information, aller chercher du travail. Mais sans le maîtriser correctement, on peut se retrouver complètement sorti du système, à une vitesse absolument incroyable…

Un mécénat de compétences

Concernant la question de l’inclusion numérique, comment avez-vous décidé d’agir?
Nous avons monté des ateliers numériques portés par des salariés de l’entreprise, au nombre de 500 dans le pays, dans le cadre d’un mécénat de compétences. Nous avons pu réaliser dans ce cadre, l’année dernière, 10 000 ateliers sur des basiques : Word, Excel… Avec de la connaissance classique sur ce qu’il y a derrière un ordinateur, sur la capacité à faire des rechercher sur Internet. Nous proposons en même temps aux gens aidés de plus en plus de contenus. Pendant la crise sanitaire, on s’est efforcés de nourrir ces contenus, qui ne sont pas souvent très accessibles, avec plusieurs thématiques autour de la culture, notamment. On a voulu rassembler ces contenus dans des espaces particuliers, et l’année dernière ce sont 250 000 élèves qui ont pu accéder à ces contenus.

«Sur Marseille, on a une quantité et une qualité de projets incroyables»

Comment procédez-vous pour choisir d’aider telle association plutôt qu’une autre?
On fonctionne par une logique d’appel à projets sur la région, avec des thématiques données. Nous avons des délégués qui ont en charge d’animer les sujets de la Fondation. Des sujets souvent adressés en direct, ou porter par les associations. Notre travail dans ce dernier cas est de les identifier pour que les associations postulent quand les appels à projets sont ouverts. Sur Marseille, on a une quantité et une qualité de projets incroyables, vraiment. Nous remettons des prix sur les axes qui sont les nôtres : tout ce qui tourne autour de l’autisme, du numérique. Au départ, notre démarche était de fournir aux gens du matériel, des ordinateurs, des ressources humaines pour les accompagner.

Maintenant, cela va beaucoup plus loin, avec de vrais programmes pédagogiques proposés sur une thématique donnée : avec le monde du cinéma pour certains, le théâtre pour d’autres, puis on mixe le numérique, le digital et ces outils. Je pense que sur le plan pédagogique, cela est plus efficace, permet d’aller chercher plus de public et d’autres cibles. Avec la Covid, on a aussi remarqué une plus grande demande d’accompagnement, car beaucoup se retrouvent encore plus seuls devant ces outils.

Les difficultés numériques n’ont pas de frontières

La crise sanitaire a-t-elle justement modifié les priorités de votre Fondation ?
Sur la fin de l’année 2020, on a pris la décision pour 2021 d’augmenter le budget de la Fondation. On s’est dit que cela allait être une année charnière, très compliquée sur le plan économique. Les gens sont allés un peu moins dans des structures classiques et allaient avoir davantage besoin d’être aidés. On est repartis, aussi, sur le mécénat de compétences, avec de nombreux salariés qui travaillent sur une association que l’on a créée : «Orange Solidarité», où des mécènes de compétences en fin de carrière y interviennent entre 18 et 24 mois. A la différence d’un mécène de compétences classique, axé sur une seule cible, ceux qui sont dans cette association peuvent s’intéresser à plusieurs structures.

C’est une transversalité qui peut toucher un de nos techniciens ou vendeurs en boutique. De notre côté, à la direction, cela nous permet de mieux répartir nos forces sur le plan géographique avec le but d’être présents sur tout le territoire régional, car les difficultés numériques n’ont pas de frontières. Nous avons également continué à proposer des offres sur du matériel, car sans ordinateur, vous vous retrouvez coincer aujourd’hui. On a dans ce cadre une offre dans nos boutiques : «Coup de pouce», permettant avec 150 € de pouvoir bénéficier d’un matériel reconditionné en bon état pour avoir accès à internet.

La femme est un régulateur de l’équilibre du foyer

La Fondation a atteint le nombre de 250 maisons digitales dans le monde, comment s’est passé le développement ?
Les maisons digitales sont nées en Afrique et sont centrales dans notre démarche. Nous en avons aujourd’hui 250 dans le monde, avec des espaces plutôt réservés pour les femmes afin qu’elles puissent être accompagnées et accueillies pour monter en compétence sur le digital et la maîtrise du numérique. Ces maisons sont devenues des lieux de vie, où des gens ont besoin à la fois de matériels, ressources humaines. On continue à en ouvrir partout, dont une nouvelle bientôt sur Marseille, à l’Estaque, une autre sur Arles. Ces lieux s’adressent en priorité aux femmes. La femme est un régulateur de l’équilibre du foyer et aujourd’hui on se rend compte que, dans ce rôle, elle n’a pas pu avoir souvent accès au matériel, à la formation.

De nombreuses femmes se sont arrêtées de travailler pendant une quinzaine d’années, et quand elles doivent se remettre à Windows pour reprendre une activité, c’est très compliqué pour elles. Ce n’est pas comme le vélo : quand on arrête de pratiquer l’informatique, il y a un accompagnement nécessaire pour redonner confiance sur ces outils ! D’autre part, il y a eu un double impact Covid : avec le confinement et les demi-classes par endroits où il a fallu aussi accompagner les enfants, avec des mamans qui ont encore plus besoin d’être aidées pour être moins isolées.

Quelle est votre stratégie pour attirer vos salariés vers votre Fondation ?
Pour les impliquer, nous communiquons régulièrement en interne sur ce que fait la Fondation. Et ils viennent facilement vers elle. En général, on a un taux de transformation incroyable, avec des salariés qui se régalent sur le terrain. Et il y a parfois des salariés qui à l’issue de leur période de mécénat de compétences deviennent bénévoles dans ces mêmes associations. Cela ne concerne pas que deux ou trois cas, car ils sont nombreux à avoir trouvé leur voie pour s’épanouir lors de la retraite.

Nous avons encore une autre casquette avec des salariés qui connaissent une association et ont envie de l’aider via la Fondation. Ils viennent alors porter des projets et déposer un dossier. Cette démarche nous permet parfois d’aller chercher des sujets différents du numérique. Elle concerne souvent de jeunes embauchés, qui ne sont pas détachés. Nous avons 7 500 salariés dans notre région, soit 7 500 salariés potentiels qui peuvent ainsi imaginer des projets à soutenir.
Propos recueillis par Bruno ANGELICA

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