Retour sur… Gestion de la qualité des eaux de baignade : avec la phase 2, le Golfe de Fos conflue vers le Contrat de baie

Publié le 1 août 2019 à  11h05 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  12h06

Son périmètre s’élargit, donc ses prérogatives aussi : le contrat de baie 2015-2021, gérant au mieux la qualité des eaux de baignade sur le territoire de la Métropole Aix-Marseille-Provence, maître d’ouvrage en la matière, accueille à partir de cette année le Golfe de Fos dans le dispositif. Une nouvelle dynamique après une première phase de trois ans, dont le bilan est globalement positif.

(Photo Philippe Maillé)
(Photo Philippe Maillé)
Les partenaires et membres du Comité de baie (Photo Mireille Bianciotto)
Les partenaires et membres du Comité de baie (Photo Mireille Bianciotto)
Il est entré en phase 2. Le contrat de baie, couvrant la période 2015-2021, a en effet enclenché la seconde en élargissant son périmètre. C’est ce qu’a annoncé Didier Réault, adjoint LR à la mer de Marseille et vice-président de ce Comité de baie. Pour mémoire, ce contrat a vu le jour en 2015 «sur l’ensemble des bassins versants de la ville de Marseille, afin de mieux gérer la qualité des eaux de baignade». A présent, et c’est la nouveauté, il s’étendra aussi au Golfe de Fos. Les « collègues » de ce territoire «s’étant dit que ce serait une bonne idée, pour eux aussi, de pouvoir rejoindre ce contrat de baie de façon à bénéficier des financements de l’Agence de l’eau». Ils représentent selon les domaines «entre 30 et 50% du coût des infrastructures ou des solutions que nous trouvons». Car on parle, en termes de budget sur cette période (2015-2021), de 260 millions d’euros, dont 120 pour les 3 premières années et 140 pour celles qui viennent. Financements émanant à la fois du public, État, Agence de l’eau, collectivités locales (Région Sud, Département 13 et AMP Métropole, qui est le maître d’ouvrage et financeur principal, des communes concernées dont Marseille) mais aussi des partenaires privés, «propriétaires ou industriels». Et Didier Réault se réjouit justement du renfort des industriels du Golfe de Fos. Car du fait de leurs «connaissances technologiques et d’exigences réglementaires plus importantes, ils se sont dit qu’il serait bienvenue de travailler avec l’Agence de l’eau. Ils ont des solutions assez innovantes (de lutte contre la pollution, NDLR) pour améliorer la qualité de l’eau en mer sur l’ensemble de la baie, maintenant métropolitaine».

2,5% de journées de fermeture sur l’ensemble des plages en juin

Ainsi, alors que dans la première phase, il était question de «travailler sur les cours d’eau, sur la gestion des eaux fluviales et de ruissellement de façon à limiter les apports d’eau en mer et de faire en sorte que cette eau soit moins polluée quand elle arrive», les prérogatives seront dès à présent élargies. Dans la deuxième phase il s’agira donc aussi de «prendre le Golfe de Fos parce qu’on a des enjeux identiques, des pollutions, notamment industrielles». Il est à noter que cette extension ne comprend pas le réseau de lacs, dont l’Étang de Berre et l’étang de Bolmon, à Martigues. Lequel vient de connaître une catastrophe écologique avec une centaine de tonnes de poissons morts, découverts le 30 juin dernier. L’Étang de Berre fait ainsi l’objet d’un contrat de milieu qui lui est propre et pour l’instant, son rattachement au contrat de baie métropolitain n’est pas à l’ordre du jour. Reste à savoir si déjà à mi-parcours, les actions portent leurs fruits… et c’est visiblement ce que met en évidence Didier Réault. «La qualité de l’eau s’améliore, nous avons fait des progrès sur la gestion des eaux fluviales, dans des temps normaux», déclare-t-il. Il nuance toutefois : «Il faut que maintenant que l’on ait plus d’anticipation sur les orages extrêmement forts, qui sont vecteurs de ruissellements avec des poussières. Et qui sont extrêmement polluants». Un état de fait qui a souvent été par le passé à l’origine de fermeture de plages… Toutefois, l’élu se défend sur le nombre de ces fermetures. Elles ne représentent visiblement qu’«à peine 2,5% de journées d’ouverture de plage». En effet, au mois de juin, «sur les 630 journées de plage (soit 21 plages que multiplient 30 jours, NDLR) on a compté seulement 15 fermetures. Il y a encore quelques années, ce taux atteignait les 7 à 8%». Ainsi Didier Réault souligne-t-il les efforts de la ville de Marseille en la matière, notamment la réalisation quotidienne d’analyses, non seulement pour préserver la santé du public mais aussi pour trouver les causes. Et pour remédier au phénomène, il y a des solutions, détaille l’adjoint à la mer : «D’abord travailler en amont sur l’infiltration de l’eau qui tombe du ciel et qui doit être infiltrée le plus près de là où elle tombe. Elle se traitera ainsi à travers la terre et pourra rejoindre les nappes phréatiques. Il faut lui laisser des espaces, dans les cours d’eau, trouver des zones d’expansion de crues. Il est nécessaire également d’identifier des espaces désimperméabilisés et ne pas imperméabiliser les sols qui existent encore. Ce peut être les parkings de supermarché, des digues et des remblais qui ont été créés et qu’il faut absolument retrouver en naturel».
son_copie_petit-377.jpgEntretien avec Didier Réault didier_reault_contrat_de_baie_09_07_2019.mp3

Composer avec le dérèglement climatique

La délégation de l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse s’avère, pour cette deuxième phase, le financeur public le plus important avec 16% du montant total devant Aix-Marseille-Provence Métropole, mettant sur la table 12% de ce budget de 140M€. Sachant qu’elle accompagne et finance quatre types d’actions, explique Annick Mièvre, directrice de la délégation nommée en juin dernier. L’Agence de l’eau se positionne d’abord sur «la reconquête de la biodiversité, au niveau des cours d’eau». Elle s’illustre aussi dans «la préservation des fonds marins, ce qui est lié à la gestion des mouillages par exemple (un travail réalisé en coordination entre les gestionnaires du Parc National des Calanques et du Parc Marin de la Côte bleue, NDLR)». Il y a aussi «toutes les actions qui évitent l’arrivée des eaux de pluie dans les systèmes d’épuration, qui en sont les grands perturbateurs» et enfin, une lutte «contre les pollutions industrielles. Sachant que certaines usines essayent de modifier leur process pour rejeter moins de polluants dans la mer». Et tout ce travail s’opère en tenant compte de nouveaux phénomènes, comme le dérèglement climatique. Car si le volume d’eau n’a pas changé annuellement, il se répartit désormais «dans l’année d’une façon complètement différente : des gros volumes d’eau, des hivers qui ruissellent énormément et ne rechargent pas les nappes et des périodes de sécheresse qui s’étendent». L’Agence aide donc les territoires à s’adapter à ces mutations en opérant des économies d’eau. Elle soutient et accompagne par exemple les actions de ses partenaires publics pour éradiquer les fuites dans les réseaux «un levier très important sur les économies d’eau». Autre axe important, celui évoqué plus haut par Didier Réault : l’arrêt de l’imperméabilisation, notamment des parkings de grandes surfaces. L’Agence encourage ainsi toutes les actions visant à permettre à l’eau de rejoindre les nappes phréatiques, comme ce projet «porté par le syndicat mixte du bassin versant de l’Huveaune, dans le cadre du contrat de rivière, à Aubagne». Son nom : Camp Sarlier, du nom de la zone d’activité qui se chargera de sa mise en œuvre. Son objet : «gérer les eaux pluviales sans aucun tuyau avec des systèmes de noues et d’infiltrations», ce pour permettre de faciliter ce fameux retour aux nappes. L’Agence lance d’ailleurs un appel à projets cette année « pour tous les établissements scolaires, de l’école à l’université visant à désimperméabiliser leurs cours». A savoir qu’avec toutes les prises de conscience opérées, tous les efforts entrepris, «la qualité des eaux en France depuis la directive cadre sur l’eau dans les années 80 s’est largement améliorée», avance Annick Mièvre. Bien sûr, il ne faut pas négliger aujourd’hui la présence «de nouveaux polluants, soit que l’on ne sait pas encore détecter, soit que l’on commence à détecter mais que l’on n’identifiait pas avant et qui sont sources de surveillance et d’étude». Malgré ce, l’amélioration est réelle. Elle est notamment le fait de la généralisation de la mise en place de stations d’épuration, mais aussi de l’adoption «de procédés industriels qui ont fortement évolués. On l’oublie souvent mais, les industriels sont soumis à de nombreuses obligations réglementaires. Et certains sont d’eux-mêmes très volontaristes pour améliorer leurs process». Améliorations que l’Agence finance, «quand cela va au-delà de la réglementation».
son_copie_petit-377.jpgEntretien avec Annick Mièvre annick_mievre_deleguee_gale_agence_de_l_eau_paca_corse_contrat_de_baie_09_07_2019.mp3

A la plage de l’Abri côtier, la nature a repris ses droits

Et puis, entre autres partenaires publics… il y a aussi l’État. Et il apporte son concours à la Métropole dans le domaine de «l’expertise et des contrôles réguliers pratiqués sur les stations d’épuration et les réseaux. Ce pour apporter de l’information qui permet aux collectivités de prendre des décisions d’amélioration», précise de son côté Alain Ofcard, directeur adjoint de la Direction Départementale des territoires et de la mer des Bouches du Rhône (DDTM). Autre outil dont use l’État, l’application de la Loi littoral, avec «la libération de certaines plages qui avaient une occupation trop forte, notamment par des restaurants installés sur une très grande quantité de plages. Progressivement, on a fait en sorte depuis une dizaine d’années de les libérer progressivement», ce pour les rendre aux Marseillais. Cela s’est notamment opéré par le biais des fins d’autorisation d’occupation temporaire… sachant qu’en moyenne, il faut trois ans à l’État pour mettre un terme à l’occupation d’une plage. Des changements «bien accueillis », selon Alain Ofcard. Non seulement par les Marseillais qui ont «plus de surface», mais aussi par la ville de Marseille, «très satisfaite parce que cela lui permet ensuite de mettre en place des concessions visant à redistribuer un certain nombre d’occupations du domaine public maritime pour des restaurants, des activités balnéaires… Mais cela après consultation, après mise en concurrence comme la loi l’oblige à le faire». Illustration récente de l’application de la loi littoral, la plage de l’Abri côtier, qui a connu l’année dernière la démolition du restaurant éponyme. Ce qui «a permis de récupérer à peu près 400 m2 de plage». Fait intéressant, «là où le restaurant avait laissé un trou béant au moment des travaux, la nature est venue reconquérir la plage. Elle a amené, en quelques mois pendant l’hiver et ce, naturellement, deux mètres de hauteur de sable fin », comblant ainsi le trou.
son_copie_petit-377.jpgEntretien avec Alain Ofcard alain_ofcard_dir_adjoint_ddtm_13_contrat_de_baie_09_07_2019.mp3

Des actions «menées dans le bon sens»

Et tout cela s’opère donc à la grande satisfaction des communes… Ainsi Michel Illac, maire d’Ensuès-la-Redonne et élu métropolitain témoigne-t-il du bénéfice du contrat de baie 2015-2019 pour les communes concernées : «Toutes les actions menées l’on été dans le bons sens», affirme-t-il. Ce n’est pourtant pas à ce titre qu’il a équipé sa commune de son réseau d’assainissement, puisqu’il a été conçu et programmé avant le Contrat de baie, avec la communauté urbaine. Ensuès-la-Redonne accusait en effet un retard conséquent en la matière, et il fallait le rattraper au plus vite… et au mieux. Désormais, le maire peut se réjouir d’un «réseau collectif et d’une station d’épuration très moderne, une station membranaire avec des eaux traitées à 97%». Le tout entièrement financé par la communauté urbaine, puis la Métropole, compétente pour l’assainissement. Cela n’a donc rien coûté à la commune. Petit bémol, malgré les 30 ou 40 ans de retard rattrapés, «il nous reste quelques petites artères avec des espaces privés qui ne peuvent pas entrer dans le cadre de ce dispositif. On aurait bien aimé être un petit peu aidé mais ce sera pour plus tard», appuie l’édile, faisant allusion à la baisse de la capacité de financement public subie par les collectivités, et imposée pour beaucoup par Bercy. Or, il faut savoir que le rattachement au réseau collectif coûte très cher… Fort heureusement, des solutions de remplacement, faits d’autres choix technologiques, peuvent être mises en place. «Dans des communes, quand on établit des ouvrages d’assainissement, collectifs ou non collectifs, on fait attention de ne pas dépenser pour dépenser. Il y a des modes d’assainissement autonomes avec des stations d’épuration individuelle qui sont aussi de très bonnes options», conclut Michel Illac.
son_copie_petit-377.jpgEntretien avec Michel Illac michel_illac_contrat_de_baie_09_07_2019.mp3
Carole PAYRAU (Rédaction) Mireille BIANCIOTTO (Son)

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