Grand Entretien. Fabrice Alimi, président du Club de l’immobilier Marseille-Provence : « Comment amener le plus gros secteur économique des pays développés à peser davantage sur l’échiquier décisionnel ? »

Publié le 1 février 2019 à  12h01 - Dernière mise à  jour le 28 octobre 2022 à  20h47

Lancement d’une Fédération nationale, organisation des 5e assises de la transition Écologique, création d’un Think Tank… l’actualité de ce début d’année du Club de l’Immobilier Marseille Provence sera dense. Retour sur cette dernière avec son président, Fabrice Alimi.

Fabrice Alimi, président du Club de l’immobilier Marseille-Provence (Photo Robert Poulain)
Fabrice Alimi, président du Club de l’immobilier Marseille-Provence (Photo Robert Poulain)

Destimed : Vous lancez ce 1er février la Fédération nationale de clubs de l’immobilier… Quelle sera sa feuille de route ?
Fabrice Alimi: L’idée de base, c’est que si nous, acteurs du territoire, nous parvenons à animer et lancer une vingtaine d’événements par an, c’est que nous avons mis au point une boîte à outils qui le permet. Nous sommes le plus gros club de l’immobilier de France, autant en actions qu’en budget. Notre volonté, c’était donc d’échanger les bonnes pratiques et de mettre à disposition cette boîte à outils, de permettre aux acteurs de se les approprier et de travailler sur leur territoire. Ce que l’on a réussi à faire ici, d’autres peuvent l’accomplir. Il y a par ailleurs une deuxième idée : jusqu’ici, il n’ y avait pas de représentation nationale de la chaîne de valeur de l’immobilier sur le territoire avec un raisonnement transverse, permettant d’agréger des compétences pour faire de la prospective, exempte de tout corporatisme… il y aura désormais cette fédération nationale, initiatrice d’une vision panoramique du monde immobilier. Puisque outre les architectes, promoteurs, constructeurs… on compte aussi les paysagistes, les bureaux d’études, les bureaux d’environnement ou organes financiers pour accompagner les projets. Cette fédération nationale, je l’avais dans la tête depuis deux ans. J’en ai parlé préalablement à deux ou trois clubs de ma connaissance…

Ils sont actuellement au nombre de combien, à l’échelle de la France ?
On en compte 12 aujourd’hui, mais il devrait y avoir d’autres créations de clubs en 2019, à Montpellier et à Lyon. Après le chiffre n’est pas figé, les clubs se font ou se défont… Par ailleurs, nous établirons le siège de la Fédération nationale à Paris.

Et donc, l’ordre du jour du 1er février ?
Nous allons peaufiner le mode de cadrage, travailler sur nos objectifs… Nous les mettons en musique, signons nos statuts… Nous actons cette mise en commun et mutualisation d’outils, afin que chacun puisse créer de l’attractivité sur son territoire. Notre industrie, c’est tout ce qui concourt à l’urbanisation, à la ville, à la vie. Tout ce que l’on peut faire prend vie dans un bâtiment. Il nous faut donc amener cette réflexion à l’échelle nationale : comment le plus gros secteur économique du monde, dans les pays développés, a une raison d’être et de peser sur de la réglementation parfois absurde, comme amener un équilibre entre les technostructures et les opérationnels ?

Autre actualité à venir très prochainement, les Assises de la transition écologique, ce 5 février. Après avoir été celles de la transition énergétique, on élargit à présent le prisme ?
C’est effectivement la démarche, après quatre ans de succès autour de cette manifestation. L’énergie était un point de départ fondamental, puisque nous vivons dans une région tendue en termes d’approvisionnement électrique. La première année a été celle d’un état des lieux. Lors de la deuxième, nous avons benchmarké ce qui se faisait ailleurs. Puis avec la troisième, nous avons inventé un mix énergétique, le dispositif Smart Avenir Énergies, dont la vocation est d’utiliser la bonne énergie en fonction de l’usage. La quatrième année, toujours avec ce dispositif, nous avons fait économiser quelques centaines d’euros par an aux acquéreurs, puisque nous avons introduit une banque dans le dispositif (Il s’agit de la Cepac, qui a lancé un produit financier permettant d’accéder à un bien 5 à 6% plus grand, NDLR). Parallèlement nous avons mis en place des indicateurs, un baromètre du prix des énergies. Avec la volonté de donner des indications en dehors des frais annexes, qui rendent les tarifications très opaques. Au final, 10 000 logements ont basculé dans le dispositif Smart Avenir Energies la première année, 22 000 la deuxième : l’effort vert s’est donc poursuivi, ce n’est pas un one shot. Et ce alors que l’effet nouveauté est passé…

De fait, pour rester sur cette lancée, que proposerez-vous lors de cette nouvelle édition ?
Cette année, on se dit que l’on a déjà bien travaillé mais que l’énergie, ce n’est qu’une brique de l’écologie. Nous allons donc voir maintenant comment on peut offrir à nos utilisateurs sans complément de coût un accès à de l’énergie verte. Mais la thématique de base, ce sera la Métropole Zéro carbone. Nous parlerons de la gestion de l’eau, des bâtiments bois, d’hydraulique, de bâtiments durables méditerranéens… Ou encore, du surcoût environnemental, de la biodiversité. Un grand témoin sera invité : l’enseignant chercheur Philippe Pelletier, qui œuvre déjà depuis trois mandats présidentiels sur ces questions. Ces 5e assises auront lieu par ailleurs sous le parrainage de Brune Poirson, ce au Mucem, sur invitation et sur inscription. Ainsi, c’est l’an 1 de la transition écologique… C’est typiquement le genre de sujet qui va être relayé et insufflé à l’échelle de la fédération nationale. Si nos initiatives essaiment, alors le gouvernement se tournera vers la Fédération nationale des clubs de l’immobilier.

Vous projetez également la mise en place d’un Think Tank sur les urbanités. Est-ce pour peser sur le débat politique, à l’aune de la campagne des municipales ?
Peser sur le débat politique, ce ne sera que la conséquence de cette action… pas le but premier visé. Comme on l’a déjà dit précédemment, l’immobilier est partout. Donc nous, professionnels, sommes légitimes pour transmettre des fiches techniques aux politiques sur les sujets de notre quotidien. La question, c’est la suivante : où voudrait-on être dans 30 ans ? Puis, il faut le décliner rétroactivement aux 15 ans, 10 ans, 5, 3, 1 an ou 6 mois… Bref, avec ce Think Tank ou encore Do Tank, puisque l’important, c’est encore d’agir, nous allons donner des outils pragmatiques d’aide à la décision politique. Ces fiches opérationnelles, nous ne les ferons pas seulement avec des membres du club, mais aussi en faisant appel à des experts multiples. Nous allons sélectionner une quinzaine de sujets essentiels, structurants, desquels découleront des actions. On me prête souvent de ambitions relatives aux prochaines échéances électorales, mais moi ce qui m’intéresse, c’est surtout ce que nous allons faire par exemple à travers ce nouvel organe : de la politique d’action.

Peut-on avoir quelques exemples de thématiques possibles ?
Celle de Marseille, capitale méditerranéenne. Un titre qu’on lui adjoint de façon systématique… Mais comment faire de notre ville, au-delà des mots, une véritable porte vers l’Afrique ? Nous discuterons notamment de la possibilité d’organiser un événement majeur, fédérant les acteurs des deux rives. Ou encore, puisque l’on est le deuxième spot de tournage cinématographique après Paris, comment peut-on opérer une montée en puissance spectaculaire de ces industries créatives localement, comment être une référence internationale, et rendre notre territoire véritablement attractif pour les étrangers. Autre sujet : la redynamisation du centre-ville ! Surtout lorsque l’on sait que Ryanair rallie Séville, qui est entièrement piétonnière, en une heure et demi seulement. Quid de notre hypercentre ? D’une part, le DPU (droit de préemption urbain, NDLR) n’est pas assez utilisée. D’autre part, nous devons faire venir des jeunes. D’autant que l’AMU est la première université d’Europe… Alors, comment les fait-on venir, ces étudiants ? Par exemple, en libérant des autorisations afin d’aménager des parcs locatifs étudiants, en leur facilitant la vie. Dernière suggestion, mettre en place des commerces éphémères, libérer le travail. Car le caractère éphémère peut créer du dynamisme… Plus généralement, nous avons l’un des plus beaux pays du monde, mais il n’y a pas d’élément fédérateur… Il nous faut cesser les guerres de chapelle !

Le mal logement est le sujet brûlant du moment. Comment le club de l’immobilier Marseille-Provence s’en est-il emparé ces derniers mois ?
L’an dernier, nous nous sommes interrogés dès le mois de juin sur les possibilités offertes par l’immobilier mutant et solidaire, à l’occasion de la journée de l’immobilier. Nous avons également, lors de ce même événement, annoncé la création de la commission des oubliés, initiée par Thierry Garcin et visant à éradiquer le sans-abrisme, en œuvrant en étroite collaboration avec le Lab Zéro. Nous avons fabriqué six kits citoyen (du «particulier à particulier solidaire» à l’engagement «sur-mesure », en passant par le smart social, les occupations temporaires mixant les usages ou encore la récupération solidaire d’équipement, NDLR), mais il faut reconnaître qu’ils n’ont pas rencontré un succès significatif. Nous travaillons actuellement à la V2 de ces kits, afin qu’ils soient appréhendables, plus lisibles, et que les gens puissent les utiliser. Puis en fin d’année, nous avons proposé un focus sur Coco Velten. Par ce type de visite, on ouvre les consciences. Cela permet de mieux comprendre les espaces partagés, le vivre ensemble… Enfin, nous serons bien évidemment contributeurs lors des futures Assises citoyennes de l’Habitat.
Propos recueillis par Carole PAYRAU

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