Grand entretien avec Jean-Daniel Beurnier: la filière sport un enjeu majeur de développement et d’attractivité

Publié le 25 janvier 2022 à  9h51 - Dernière mise à  jour le 4 novembre 2022 à  11h35

Jean-Daniel Beurnier, vice-président de la CCIR Sud, membre de la CCI métropolitaine Aix-Marseille-Provence, insiste sur l’importance de se saisir des JO 2024 qui verront Marseille accueillir les épreuves de voile ainsi que des matchs de football pour mesurer l’importance de la filière du sport, la développer. Cet entretien a été réalisé avant que Renaud Muselier affiche ses ambitions pour les JO d’hiver.

Jean-Daniel Beurnier est vice-président de la Conférence Régionale du Sport ©Destimed/RP
Jean-Daniel Beurnier est vice-président de la Conférence Régionale du Sport ©Destimed/RP

Destimed: Le monde économique avec la CCI Marseille-Provence et la CCI Provence-Alpes-Côte d’Azur est particulièrement mobilisé pour réussir les JO 2024 qui verra Marseille être ville hôte des épreuves de voile et accueillir des matchs de football. Pourquoi une telle mobilisation?
Jean-Daniel Beurnier: Je dirais pour ma part que je suis passionné de sport et que cela fait des années que je mesure à quel point le sport est un formidable facteur de croissance pour notre économie régionale. Depuis l’échec de l’accueil de la Coupe America, en 2003, l’ambition de voir les mondes sportif, économique, politique, travailler ensemble afin d’être les plus efficaces possibles n’a cessé de croître au sein du monde économique.

Et, nous avons eu la chance de voir le Président Macron se prononcer en faveur d’une gouvernance partagée avec le monde économique du sport. C’est ainsi qu’en tant que représentant de la CCI Provence-Alpes-Côte d’Azur, j’ai été élu vice-président de la Conférence Régionale du Sport, en binôme avec Laurent Bonnet (Métropole Toulon Provence Méditerranée) aux côtés de Hervé Liberman (Comité Régional Olympique et Sportif). Cette structure répond à une volonté partagée d’évolution profonde du modèle sportif français et représente un nouveau modèle partenarial entre l’État, le mouvement sportif, les collectivités territoriales et les représentants du monde socio-économique. La première réunion a eu lieu fin 2021.

Qu’attendez-vous de cette conférence?
Il importe de considérer la filière du sport dans son ensemble et de manière transversale : le sport des grands événements mais aussi le sport du dimanche, celui des loisirs, du plaisir accessible à tout un chacun, un secteur qu’il importe de développer, notamment en favorisant les mobilités douces. Parmi les propositions que nous avons mis en avant nous avons bien sûr insisté sur le fait que les JO représentent une chance unique pour structurer la filière du sport et développer un certain nombre de projets. Il faut pour cela qu’une véritable synergie se mette en place entre tous les acteurs.

Si Provence-Alpes-Côte d’Azur est plutôt bien positionnée au niveau national en termes de sportifs licenciés, d’emplois liés, de chiffre d’affaires réalisé, elle dispose d’atouts, d’infrastructures et d’un environnement naturel encore sous-exploités : des leviers qui méritent d’être actionnés pour aller plus loin et faire de la filière sport un enjeu majeur de développement et d’attractivité. Nous proposons également que soit accompagné le développement de l’économie du sport.

Prenons un exemple, aujourd’hui les piscines représentent un coût pour les collectivités alors qu’il n’existe aucune fatalité pour qu’il en aille ainsi. On peut mettre en place du sponsoring, du naming. Et, actuellement, au mieux on trouve un espace boisson plus ou moins étriqué alors qu’il pourrait y avoir un café, des commerces, bref créer un centre de vie. Et, plus largement, lors de la création d’équipements il faut arrêter de penser en terme de complexe sportif mais de quartier sportif.

Vous évoquez des points forts et des leviers à activer. Quels sont-ils?
Il faut savoir que la CCIR a mené une étude économique approfondie, dès janvier 2020, en concertation avec les acteurs du sport, en région, dans toute leur diversité et sur chaque territoire. Elle montre qu’avec 18 500 emplois, la région se classe au quatrième rang des régions employeuses de la filière (9% du nombre d’emplois au niveau national) derrière Auvergne-Rhône-Alpes, Île-de-France et Nouvelle Aquitaine. L’étude met également en exergue le fait que la région dispose d’un terrain de jeux unique encore sous-exploité, la pleine nature. La région Provence-Alpes-Côte d’Azur dispose d’une superficie considérable d’espaces naturels; les parcs naturels occupent un quart de la surface du territoire.

Sur quoi peut s’appuyer cette économie verte?
L’économie verte s’appuie sur 4 parcs nationaux : les Écrins, le Mercantour, Port-Cros, les Calanques; 9 parcs régionaux : Camargue, Lubéron, Queyras, Verdon, Alpilles, Préalpes, Baronnies provençales, Sainte-Baume, Mont Ventoux. Elle compte 30 000 kilomètres de sentiers dont 10 000 kilomètres balisés GR; plus de 600 parcours VTT référencés FFC (vélotourisme); Près de 500 sites d’escalade répertoriés. La topographie régionale permet la pratique des activités de pleine nature (APN) diversifiée : VTT, cyclotourisme, randonnée, trail, escalade, spéléologie, parapente, sports d’eau vive, etc. Nous avons là un levier de développement pour la Région et les collectivités qui créent des offres spécifiques autour de ces nouvelles pratiques. C’est d’autant plus important que les activités de pleine nature sont en plein essor depuis plusieurs années. Près de 2/3 des Français, soit plus de 28 millions de pratiquants, déclarent avoir pratiqué au moins une activité sportive ou un loisir de nature terrestre au cours des 12 derniers mois.

Qu’en est-il des sports d’hiver?
C’est l’économie blanche. La montagne et les sports d’hiver représentent un poids économique majeur dans l’économie touristique régionale avec ses 68 stations de sport d’hiver, ses 2 500 km de ski alpin, 1 200 km de ski de fond, 15 000 emplois dont 7 000 emplois saisonniers, 756M€ de recettes estimés (2015) 15% des parts du marché français des sports d’hiver. Les stations qui sont de véritables «locomotives économiques» régionales mais qui sont «fragiles» en raison du vieillissement des équipements et des évolutions climatiques. D’importants investissements doivent être réalisés pour renouveler leur positionnement sur un marché concurrentiel et tendre vers des stations d’altitude «smart» durables et 4 saisons. Depuis 2016, la Région Sud a engagé un travail important dans le cadre d’un Plan montagne autour des contrats « Stations de demain ». En février 2021, elle a lancé un plan d’investissement d’urgence pour la relance de l’économie des Alpes du Sud impactées par la crise sanitaire et économique. En janvier Renaud Muselier a annoncé que 200M€ seront mobilisés entre 2021 et 2027 pour assurer l’avenir des stations des Alpes du Sud.

Quel regard portez-vous sur l’économie bleue?
Elle est de première importance pour la Région et représente un atout fort auprès de la clientèle touristique, notamment internationale. Elle regroupe la plaisance (flotte et ports), le nautisme (maintenance, services portuaires, services de loisirs, sports loisirs) et le commerce d’articles de sport. Au-delà des activités balnéaires, le nautisme et la plaisance sont des sources de retombées économiques significatives. La perspective des JO 2024 accélère le développement du secteur et consolide son importance économique. Le Plan Voile et Nautisme 2018 -2024 doté de 21 M€ d’investissements développé par la Région Sud permet d’accélérer le développement et la promotion du secteur. Il faut par exemple savoir qu’aucune de nos agences territoriales n’avaient comme axe de travail la «chasse» des entreprises de sort afin qu’elles viennent s’installer dans la Région alors que nous n’avons pas la chance que peuvent avoir le Nord, la Bretagne ou le bassin aquitain de bénéficier d’une forte filière économique sportive.
Propos recueillis par Michel CAIRE

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