IRD/Institut Pasteur de Bangui: La piqûre diurne des moustiques vecteurs du paludisme sous-estimée

Publié le 30 mai 2022 à  19h16 - Dernière mise à  jour le 6 novembre 2022 à  10h45

Une étude impliquant des chercheurs de l’IRD et de l’Institut Pasteur de Bangui (République centrafricaine) vient de montrer que les piqûres de moustiques au cours de la journée dépassent les estimations précédentes et pourraient réduire l’efficacité des efforts de lutte contre le paludisme.

Moustique anophèle pouvant être vecteur du paludisme ©centers for disease control and prevention
Moustique anophèle pouvant être vecteur du paludisme ©centers for disease control and prevention

Les outils de protection contre les vecteurs, tels que les moustiquaires imprégnées d’insecticide, se sont traditionnellement concentrés sur la réduction des piqûres de moustiques la nuit et à l’intérieur. En revanche, le comportement diurne des moustiques qui propagent le paludisme n’a pas été bien étudié : leur prédation durant la journée a été longtemps négligée. Les auteurs de l’étude ont collecté des moustiques (Anopheles spp.) à l’intérieur et à l’extérieur pendant des sessions mensuelles de 48 heures pendant un an à Bangui. Leurs résultats ont été publiés dans la revue PNAS le 16 mai 2022.

Les chercheurs ont modélisé les événements de piqûre à l’aide de statistiques circulaires, aussi appelées directionnelles : cette méthode permet de mieux appréhender la périodicité des piqûres afin d’évaluer les modèles journaliers complets du rythme des piqûres de moustiques dans un environnement urbain. Les résultats suggèrent que la majorité des piqûres ont lieu à l’intérieur, entre le crépuscule et l’aube.

Cependant, les auteurs ont constaté qu’environ 20 à 30 % des piqûres de moustiques se produisaient à l’intérieur pendant la journée, ce qui suggère qu’une proportion importante de moustiques peut se nourrir lorsque les gens sont peu protégés, échappant ainsi aux interventions de lutte contre le paludisme. Le dépistage de l’agent pathogène du paludisme, Plasmodium falciparum, a montré que les moustiques qui piquent la nuit et le jour avaient des taux d’infection similaires. «Les piqûres diurnes ont lieu à tout moment de la journée», indique Diego Ayala, entomologiste médical et spécialiste de biologie évolutive à Mivegec, et dernier auteur de l’étude. «Faute d’être empêchées, elles pourraient représenter une part substantielle des infections aux paludisme», ajoute-t-il.

Selon les auteurs, les tactiques de contrôle des moustiques devraient cibler également les endroits où des personnes passent du temps à l’intérieur, loin de chez elles, pendant la journée, afin de faire progresser l’objectif d’élimination du paludisme. «L’aspersion intra-domiciliaire, qui consiste à appliquer des insecticides à longue durée d’action sur les murs intérieurs des habitations, pourrait être étendue aux écoles pour mieux protéger les enfants, premières victimes du paludisme», estime le scientifique.

Référence : Claire Sangbakembi-Ngounou, Carlo Costantini, Neil Longo-Pendy, Carine Ngoagouni, Ousman Akone-Ella, Nil Rahola, Sylvie Cornelie, Pierre Kengne, Emmanuel Nakouné, Narcisse Patrice Komas, Diego Ayala, Diurnal biting of malaria mosquitoes in the Central African Republic indicates residual transmission may be « out of control’ » PNAS, le 16 mai 2022. doi.org/10.1073/pnas.

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