Journée de l’Immobilier. « Manifesta » 13 : Winy Maas présente son Grand Puzzle marseillais

Publié le 5 juillet 2019 à  14h24 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  11h59

Retour au source pour cette 13e Journée de l’Immobilier, le Club Immobilier Marseille Provence a entraîné ses 200 invités à la découverte des projets qui transforment le cœur de Marseille. Après avoir arpenté les projets innovants disséminés sur le territoire de la Métropole Aix-Marseille Provence, pour son rendez-vous annuel, le Club choisit de s’intéresser à l’avenir du centre historique de la cité phocéenne, aux enjeux plus que d’actualité et aux acteurs de sa transformation. «Un enjeu qui, explique Fabrice Alimi, président du Club Immobilier Marseille Provence et de la Fédération des Clubs Immobiliers, a trop souvent été délaissé, cette dernière décennie, pour toutes les grandes villes historiques européennes». Puis c’est au tour de Hedwig Fijen, présidente de Manifesta13 de prendre la parole. Manifesta 13 a commandé à Winy Maas l’étude «Grand Puzzle» -étude interdisciplinaire urbaine de Marseille- qui met en perspective Marseille avec d’autres villes du monde de taille similaire. Avec «Grand Puzzle», résultat d’un parcours approfondi, Winy Maas livre un portrait sans concession qui n’a pas manqué de faire réagir, notamment au sein du panel qui, par la suite, a expliqué pourquoi il croyait en Marseille.

De gauche à droite Billy Guidoni, Mattieu Blanc, Guillaume Pellegrin, Christian Brunner, Maxime Tissot, Winy Maas, Fabrice Alimi et  Hedwig Fijen (Photos Robert Poulain)
De gauche à droite Billy Guidoni, Mattieu Blanc, Guillaume Pellegrin, Christian Brunner, Maxime Tissot, Winy Maas, Fabrice Alimi et Hedwig Fijen (Photos Robert Poulain)

Fabrice Alimi présente le Club qui, fort d’une centaine de professionnels, issus de tous les secteurs de l’immobilier, se veut acteur et influenceur sur le territoire métropolitain. «Nous choisissons notre thème de la journée d’une année sur l’autre. Nous avions choisi le centre-ville bien avant le drame de la rue d’Aubagne. Nous nous sommes demandés, après celui-ci, si nous devions garder le même thème. Nous avons fait le choix de poursuivre dans ce sens, en rendant hommage aux victimes». «Avec cette tragédie, poursuit-il, Marseille vient de connaître un épisode catastrophique de son histoire. Mais par rebond, elle peut être exemplaire pour toutes les villes de l’Europe ancienne». Il rappelle également que la CCI Marseille-Provence «porte une attention toute particulière au centre-ville, à ses commerçants durement touchés par le mouvement des gilets jaunes et, entend bien être un acteur de la réinvention du centre-ville».

Marseille mise en scène par Manifesta 13

Hedwig Fijen, directrice de Manifesta évoque cette 13e édition : «Pour sa première venue en France « Manifesta » a fait le choix de Marseille. Tous les deux ans nous explorons ainsi une ville européenne. Nous travaillons sur les enjeux urbains qui créent la dynamique de la ville». L’approche unique de Manifesta consiste à impliquer des architectes et des urbanistes dans son modèle de biennale. Son objectif principal est de créer une analyse kaléidoscopique qui reflète la manière dont les habitants pensent leur ville et ses liens actuels avec le reste de la France, avec le reste de l’Europe. Mais aussi, ses liens avec la Méditerranée et, par extension, ses liens avec la mer en général. Hedwig Fijen considère: «Marseille est une ville exceptionnelle, elle est en mouvement permanent et nous allons, avec Manifesta, la mettre en scène, elle aura le premier rôle avec son architecture, sa complexité, sa diversité, ses récits, à partir de juin 2020». Winy Maas, cofondateur de l’agence néerlandaise d’architecture et d’urbanisme MVRDV et directeur de The Why Factory, institut de recherche sur la ville du futur à l’Université de technologie de Delft, a présenté une sélection de données issues du Grand Puzzle, une étude de recherche urbaine interdisciplinaire de 1 200 pages que l’agence a menée sur Marseille et sa métropole préalablement à la biennale. Les résultats comprennent des analyses sur la ville à travers des entretiens et des données spatiales, donnant lieu à des suggestions pour de potentielles interventions dans l’espace public.

«Marseille subit plus un intra qu’un extra bashing»

Et ses premiers mots ne manquent pas d’interpeller: «Marseille subit plus un intra qu’un extra bashing. Alors que, depuis un an, j’observe une ville qui est plus qu’intéressante». Il indique avoir travaillé avec beaucoup de monde car «tout le monde fait de l’urbanisme, tout le monde est là pour construire cette ville». Il avoue- et il ne parlait pas de politique- avoir été surpris par le nombre d’impasses que compte cette ville «une nouveauté pour moi». En quelques touches, il dresse un premier portrait de la ville. Il constate: «Vous aimez plus les voitures que les autres villes». Note que la Ville est particulièrement bien pourvu avec ses espaces verts et la mer «mais vous ne l’utilisez pas bien». Le constat est le même à propos des énergies renouvelables. Ce travail accompli, il s’agit à présent de contextualiser, analyser et affiner l’étude pensée comme un véritable instrument offert aux citoyens marseillais pour leur permettre d’imaginer les potentiels futurs de leur ville. Le Grand Puzzle servira également d’outil de création pour les interventions artistiques et culturelles en amont et pendant la biennale qui se tiendra sur l’ensemble de la métropole du 7 juin au 1er novembre 2020. Faisant suite au succès de l’introduction de ce modèle lors de Manifesta 12 Palerme, c’est ici la deuxième fois que Manifesta fait la commande d’une étude urbaine. L’objectif est de placer la Ville sous les projecteurs de plusieurs disciplines et d’inscrire, de manière approfondie, les prochaines étapes de Manifesta dans le tissu de la société marseillaise.

«Dans le centre-ville on vit, on travaille et on se divertit…»

Christian Brunner, le directeur général de l’Agence d’urbanisme de l’agglomération marseillaise (Agam) déplore que Winy Maas ne soit pas passé par l’agence. Puis de replacer dans un contexte historique, une ville qui dans les années 70-80 perd 150 000
habitants, 100 000 emplois. «C’est le triomphe de la « modernité ». La voiture est reine, partout en France on transforme les grandes places en parking. Les métropoles deviennent fortes par leur périphérie et faibles par leur centre. L’enjeu, aujourd’hui, est d’inverser ce mécanisme, notamment pour des raisons climatiques. On prend conscience de l’importance du centre-ville avec ses 150 000 emplois. Dans le centre-ville on vit, on travaille et on se divertit. C’est en même temps le lieu où l’on trouve des populations captives, les plus précarisées. Mais une redynamisation est en marche, on revient dans le centre-ville pour y trouver du sens, de l’émotion, de la flânerie, des rencontres». il considère que si les grands centres commerciaux périphériques vont perdurer «ils ont mangé leur pain blanc». Et il ne cache pas être admiratif devant «la réactivité, la maturité des artisans». Billy Guidoni, Modus Aedificandi, invite à penser la ville «comme une masse qui n’est en rien statique». Une ville qui doit être «responsive» et doit répondre aux attentes des cadres non seulement en matière d’emploi mais aussi de transport, de cadre de vie, de culture, d’animation «sous peine de voir cette population partir». Pour lui: «On continue à vendre du mètre carré alors que la ville ce n’est pas cela, c’est du mètre cube, c’est du volume». Maxime Tissot, responsable de l’Office de Tourisme de Marseille met pour sa part en exergue: «Le côté bouillonnant de la cité. C’est l’une des destinations monde préférées des Américains. Nous sommes riches de nos différences, de nos 17 communautés religieuses et la géographie fait de nous un pont entre l’Amérique, l’Europe et l’Afrique».

«Marseille est une destination en pleine croissance»

Matthieu Blanc, président d’Arrelia, est persuadé de l’attractivité de Marseille et cela depuis des années. C’est ce qui l’a conduit, en 2012, à faire le choix d’acquérir, sur la Canebière, à proximité de Noailles, un immeuble pour y réaliser un hôtel. «A part le toit et la façade nous avons tout détruit, tout reconstruit pour réaliser un établissement de 90 chambres et une brasserie de 150 couverts. L’étude de marché que nous avons commandée n’a fait que conforter notre choix puisqu’elle confirme que c’est sur le Vieux-Port que les touristes veulent venir et que Marseille est une destination en pleine croissance». «Nombre de groupes nationaux et internationaux ont voulu venir, ajoute-t-il, nous avons refusé tout ce qui était trop dans le luxe car nous sommes installés dans un quartier populaire avec lequel nous allons travailler. Nous avons fait le choix de Mercure, un groupe qui se renouvelle et se déstandardise». Et de constater à son tour que «le bashing est souvent marseillais». Alexis Benoist, directeur du développement chez «Histoire et Patrimoine», présente le groupe, spécialiste du secteur de l’immobilier ancien qui a forgé son expérience dans les projets de reconversion de patrimoines religieux, industriel, administratif ou militaire, comme dans la rénovation de bâtiments classés Monuments Historiques ou encore situés dans des sites patrimoniaux remarquables classés. Le groupe travaille actuellement sur Marseille une ville dont il vante les mérites «et qui propose le seul centre-ville populaire de France». Guillaume Pellegrin de Tivoli Capital, Marseillais de retour dans sa ville après HEC, Shanghai… croit en Marseille, à son évolution. Fondateur des espaces de co-working, il considère : «On ne veut plus posséder mais utiliser».
Michel CAIRE

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