La boîte à Polars de Jean-Rémi Barland. « Nouvelle Babel » de Michel Bussi, un thriller écologique où l’auteur casse les codes…

Publié le 21 février 2022 à  14h20 - Dernière mise à  jour le 4 novembre 2022 à  15h24

Pourquoi avoir assassiné ces retraités d’apparence paisible ? C’est quoi cette folie ? Un attentat ? Pour revendiquer quoi ? Une vengeance ? Un règlement de comptes ? Un vol ? Mais pour voler quoi ? Le lieu aussi interpelle autant que la personnalité des victimes : en effet Tetamanu, situé en Polynésie dans l’archipel des Tuamotu, passe pour être plutôt un endroit paradisiaque et comme le massacre de ces retraités s’est déroulé sur une île privée, nos enquêteurs donnent leur langue aux gros poissons gloutons de la lagune.

Michel Bussi du côté de Orwell et du meilleur Barjavel. (Photo Philippe Quaisse)
Michel Bussi du côté de Orwell et du meilleur Barjavel. (Photo Philippe Quaisse)

Ils sont trois policiers, (la capitaine Mi-Cha Kim, le lieutenant Bapou Diop et le commandant Artem Akinis), une institutrice s’appelant Cléo Loiselle et une journaliste répondant au patronyme de Lilio de Castro (celle-ci travaille pour l’Independiente Planet), à partir en chasse pour démasquer le ou les coupables. Précisons que nous sommes en 2097 et que c’est l’organisation mondiale des déplacements qui gouverne la terre. Avec comme socle la Constitution mondiale de 2058 «Une seule Terre, un seul peuple, une seule langue» et donc l’idée que la Terre appartient à tous, où dans un monde sans guerre les individus sont libres de circuler tant que cela respecte le taux d’occupation possible de chaque lieu.

On se déplace par téléportation, grâce à un TPC attaché au poignet. Que ce soit pour aller chercher son pain ou faire un footing à l’autre bout de la planète… Le matin à Rio, le soir en Europe, quelques secondes après dans sa salle de bains, la liberté guide le peuple. Alors que le centenaire de cette nouvelle façon de se déplacer va être bientôt célébré, on envisage de téléporter pour quelques minutes l’humanité tout entière dans le plus grand centre jamais construit, à savoir la nouvelle Babel. Mais voilà ! Alors que l’événement approche, des attentats ont lieu…et sans doute le meurtre des retraités a un lien avec ceux-ci.

Vol de billets de foot pour la finale Brésil-Allemagne

Avec stupéfaction Artem Akim va relier entre eux quelques éléments disparates que l’on peut répertorier ainsi : «Dix riches retraités allemands qui ont acheté des places pour la finale de la coupe du monde ; un tueur qui débarque en bateau ; qui assassine tous les habitants pour leur voler cette dizaine de billets ; qui prend le temps de placer en évidence un livre considéré comme potentiellement inspirateur d’actions terroristes ; qui sans doute avant de partir gravera «Pitchipoi» à la pointe de son couteau sur le tronc d’un des cocotiers.» Faire le lien entre tout ça n’est pas simple, mais s’avèrera capital pour saisir l’enjeu du problème.

Ajoutons la personnalité assez trouble de Galiléo Nemrod, élu à la tête de l’Organisation Mondiale des Déplacements, la présence de l’ineffable chat Darn Cat qui perché au-dessus des toits surveille tout avec sa caméra intégrée, ou encore Valéryah Everianov un urgentiste aux méthodes musclées et vous aurez quelques uns des acteurs prériphériques de ce thriller écologique, où l’auteur casse les codes du suspense artificiel pour proposer une réflexion sur les dangers du rêve très orwellien du «Meilleur des mondes». Si Michel Bussi n’est pas à proprement parler un grand styliste il demeure de bout en bout et une nouvelle fois un excellent conteur. Et sa «Nouvelle Babel» de s’imposer comme un roman d’anticipation rappelant « Le grand secret » ou «La nuit des temps» deux polars haut de gamme signés René Barjavel.
Jean-Rémi BARLAND

«Nouvelle Babel» de Michel Bussi. 447 pages, 21,90 € aux Éditions Presses de la Cité

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