La directrice des Baumettes, Christelle Rotach, reçue au Parvis du Protestantisme

Publié le 21 mars 2014 à  19h23 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  17h20

Christelle Rotach, directrice des Baumettes a été reçue au Parvis du Protestantisme (Photo Philippe Maillé)
Christelle Rotach, directrice des Baumettes a été reçue au Parvis du Protestantisme (Photo Philippe Maillé)
La directrice des Baumettes est revenue sur son parcours dans le pénitentiaire, avant de donner son analyse sur les Baumettes, son évolution. «Je suis entrée dans l’administration pénitentiaire en 1996, après mes études en Droit. Cela parce que, pendant mes études, j’avais rencontré un juge d’application des peines qui disait son admiration pour les personnels et nous avait fait visiter des établissements. J’ai débuté à Lyon dans un établissement surencombré. C’était compliqué, avec des rapports emplis de violence. Il y avait 3, 4, parfois 5 personnes dans une cellule de 9 m². On ne sort ni grandie ni très fière d’une telle expérience. Puis j’ai passé 6 ans aux Baumettes à des postes très différents avant d’être secrétaire générale de la fonction pénitentiaire de l’Outre-mer. Puis j’ai été en poste à Fleury-Merogis, avant d’être nommée à la maison d’arrêt des Haut-de Seine. Depuis 11 mois, je suis revenue aux Baumettes».
Puis de se souvenir de son premier poste. «Une jeune femme face à des vieux briscards. C’est un membre du grand banditisme lyonnais qui m’a permis de m’imposer. Il m’a demandé un rendez-vous car il avait un problème à régler. Sa demande était légitime, j’ai pu apporter une solution. Et, à partir de là, il a fait ma publicité». Mais, c’est au sein de l’environnement dur de l’établissement lyonnais qu’elle a connu les seuls déboires de sa carrière : «Un détenu qui avait des troubles importants du comportement m’a cassé le nez. Et, deuxièmement j’ai eu des menaces sérieuses à l’extérieur avec une tentative d’intimidation sur des proches émanant d’un détenu».
Mais ajoute-elle: «Le fait d’être femme permet de désamorcer des situations tendues voire de violence latente». Et de se rappeler d’avoir vu les premières femmes arriver dans les secteurs des hommes. «Elles représentent aujourd’hui entre 20 et 25% des effectifs, sans soucis particuliers. Et les femmes sont de plus en plus nombreuses à occuper des postes de direction».
Des femmes qui, selon elle «sont plus pragmatiques, plus préoccupées par l’organisation. D’ailleurs, je ne crois pas qu’une telle administration puisse se passer d’un cadre de vie, aussi bien pour les personnes hébergées que ceux qui y travaillent. Après, une fois le cadre posé, on peut avoir des fantaisies. Ainsi, il y a quelques années, nous avons accueilli un cinéaste, un chorégraphe, des danseurs professionnels pour monter un spectacle réunissant danseurs professionnels, détenus et personnels, qui a donné lieu à trois représentations».
Puis d’indiquer : «Les Baumettes c’est 2119 personnes écrouées, 1850 hébergés, dont seulement 80 femmes. Nous avons un secteur pour les mineures, nous en accueillons 8. Je dispose de 1090 places chez les hommes et j’en héberge actuellement 1750».
Une personne du public interroge : «La prison a-t-elle une valeur curative ?».
«Nous hébergeons des prévenus et des personnes condamnées à des petites peines, moins de 2 ans, les cas, où la situation a un effet positif, sont résiduels. Nous avons des professionnels de la prison. Mais quelles que soient les conditions d’hébergement, que peut-on faire lorsque nous avons affaire à des jeunes qui gagnent 20 000 euros par mois pour des trafics. Croyez-vous qu’ils vont arrêter pour le Smic, ou, plus certainement, pour devenir demandeurs d’emploi ? Pour que la prison ait un sens il faut que la personne le veuille. Dans les maisons d’arrêt cela me semble compliqué, mais des gens trouvent là un emploi du temps et il en est qui reprennent leurs études».
Construit en 1939, le centre pénitentiaire des Baumettes bénéficie aujourd’hui d’un vaste projet de reconstruction. «Nous avions l’objectif de réhabiliter 300 cellules en 2013, nous n’avons pu en faire que 270 car il y a parfois énormément de travail à accomplir. On refait la peinture, l’électricité, l’isolation, on aménage un coin sanitaire, on pose du mobilier neuf. C’est un travail de tous les jours car les dégradations sont extrêmement nombreuses. Les locaux sont un exutoires, parfois on s’en prend au bâtiment pour ne pas s’en prendre aux personnes».
Ce projet est composé de 4 étapes successives : La première étape, achevée, a consisté à réaménager et sécuriser les porteries du centre pénitentiaire. La deuxième, en cours, porte sur les travaux préalables dits «opérations connexes à la construction d’un futur bâtiment », Baumettes 2; et la troisième sur la construction de l’établissement en tant que tel qui aura une capacité de 573 places. Enfin, le projet s’achèvera sur une dernière étape de restructuration de la maison d’arrêt actuelle. «En parallèle, un programme de 600 places est programmé à Aix ainsi que la reconstruction de l’établissement des Baumettes».
Michel CAIRE

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