Marseille. Apprentis d’Auteuil et Kedge Business School portent « L’École Entrepreneuriale » à destination des jeunes bacheliers issus des quartiers prioritaires

Publié le 19 juin 2020 à  11h02 - Dernière mise à  jour le 31 octobre 2022 à  11h51

Les représentants de Kedge business school et des Apprentis d'Auteuil ont présenté le projet
Les représentants de Kedge business school et des Apprentis d’Auteuil ont présenté le projet

Le territoire marseillais sait être innovant, une nouvelle preuve en est portée par le partenariat entre les Apprentis d’Auteuil et Kedge Business School. Avec des partenaires publics et privés, ils ont décidé de développer les compétences entrepreneuriales et l’employabilité de jeunes issus principalement de quartiers prioritaires à travers un parcours de 3 ans d’études baptisé « L’École Entrepreneuriale ». 20 jeunes font partie de la première promotion et les organisateurs préviennent déjà que le succès de cette opération résidera dans le fait que d’autres territoires, d’autres structures, s’en saisissent. Pour intégrer ce parcours d’excellence, il est nécessaire d’avoir moins de 30 ans, d’être titulaire du baccalauréat et d’être issu d’un quartier prioritaire. Et l’étudiant doit avoir la fibre entrepreneuriale et un projet de création d’entreprise. La sélection est réalisée par des partenaires qui savent identifier «des talents sur des principes totalement différents de l’école traditionnelle». Les dossiers de candidature seront soumis avant le 30 septembre et les sélections se feront à l’issue d’entretiens. Vingt candidats composeront donc la première promotion. Dans un souci d’égalité des chances entre homme et femme, Kedge veillera à respecter la parité. A l’horizon 2022, 80 étudiants seront sélectionnés sur les campus de Bordeaux et de Marseille. Du côté des Apprentis d’Auteuil, SamirTighilt, Responsable Entrepreneuriat, explique: «Historiquement, l’inégalité des chances se jouait entre les bacheliers et les non-bacheliers. il est devenu urgent d’actualiser notre constat. Traditionnellement nous fléchions notre action sur des jeunes non bacheliers. Mais force est de constater que la majorité des dispositifs concernent ce public. Or, seulement 1% des bacheliers issus de la filière professionnelle obtiennent un niveau supérieur à bac+3, contre plus de 40% des bacheliers généraux. Ils sont trop diplômés pour être accompagnés, pas assez pour trouver un emploi». Et une étude de l’Insee, en 2017, révèle que l’effet du diplôme explique à lui seul 50% des écarts de revenus. Ainsi, en France, 6 générations sont nécessaires pour qu’un enfant issu d’une famille pauvre puisse s’élever au niveau de revenu moyen. La pire des situations des pays de l’OCDE, après la Hongrie… Et cela ne va pas en s’arrangeant: d’après la dernière enquête PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves), le poids de l’origine sociale sur les performances scolaires des élèves de moins de 18 ans a augmenté de 33% depuis 2002. 20% seulement des bacheliers professionnels poursuivent leurs études selon une étude réalisée par l’Onisep en 2020 alors que 95% des bacheliers professionnels ont exprimé un vœu de poursuite d’études sur Parcoursup.

660 000€ alloués pour les trois prochaines années

Les données sont là, elles démontrent la pertinence de ce projet, l’importance de la dynamique qu’il peut créer. Un modèle économique inédit constitue le socle du programme. Une bourse d’études et une bourse de vie est décernée à chaque étudiant-entrepreneur, elles sont financées par des mécènes afin de couvrir les coûts de scolarité et les charges de vie mensuelles, soit 20 000€/an par étudiant. Chaque étudiant pourra ainsi se consacrer pleinement à son projet entrepreneurial et sécuriser son parcours de formation. Grâce à la collecte des promesses de dons et à l’engagement des acteurs publics et privés du territoire, Kedge a revu à la hausse et doublé son objectif de recrutement, passant de 10 à 20 étudiants-entrepreneurs la première année. Christophe Mouysset, directeur des Relations Entreprises et de l’Entrepreneuriat ne cache pas que ce projet lui tient à cœur en tant que fils d’instituteur. Il signale que cette action s’inscrit dans une logique de l’établissement en faveur de l’insertion: «Avec Phoenix Égalité des chances, association étudiante de Kedge Business School Marseille plus de 130 étudiants de Kedge œuvrent, chaque année, pour permettre à plus de 300 jeunes issus des quartiers difficiles de Marseille d’accéder à l’excellence». Alors, pour lui, «la création de ce parcours pédagogique d’excellence démontre l’ancrage de notre établissement et sa contribution à l’ouverture sociale, au développement et à l’attractivité du territoire». Il précise que KBS «alloue à cette opération pas moins de 660 000€ pour les trois prochaines années en mettant à disposition des ressources humaines, pédagogiques et matérielles et sa Fondation, sous l’égide de la Fondation de France, abonde à hauteur de 160 000€ afin de pérenniser ce projet d’intérêt général».

«Traditionnellement on part du savoir, là, nous allons partir du projet»

Les cours seront dispensés au sein de l’accélérateur de Kedge : la Business Nursery, au contact d’experts, d’entrepreneurs à succès, un microcosme pour bénéficier d’un coaching dédié. Les étudiants y trouveront également le soutien de stagiaires d’Epitech ou d’autres écoles du digital membres de Code4Marseille afin de développer les produits numériques nécessaires à leur entreprise. Des enseignants, épaulés par des partenaires et des entrepreneurs expérimentés construisent un programme de 400 heures qui répond aux attentes du marché en termes de référentiel de compétences. Et les cours, explique Éric Sirven, responsable du mécénat et du projet École Entrepreneuriale, sont aussi l’occasion pour nous d’expérimenter une autre façon d’enseigner. «Traditionnellement on part du savoir, là, nous allons partir du projet et le savoir sera un outil visant à favoriser la concrétisation de ce projet». Et, à l’issue des trois années, l’étudiant se verra décerné le Titre de «Programme de Management Général» et pourra, s’il le souhaite, intégrer un Master. Si toutefois, son souhait est d’interrompre le parcours, une certification lui sera remise pour valoriser ses acquis. Eric Sirvent reprend: «qu’un jeune suive tout ou partie des 3 ans du cursus et qu’à l’issue de celui-ci, il intègre une entreprise séduite par ses compétences entrepreneuriales ou qu’il fonde sa propre entreprise ; dans tous les cas de figure c’est un pari réussi pour tous. En effet, l’employabilité sera au rendez-vous, grâce à la connaissance de soi, l’expérience d’apprentissage, l’acquisition des savoirs et savoir-être, la certification des compétences, l’intégration à la communauté Kegde et la visibilité nouvelle sur le marché du travail». Enfin, dans le cadre du lancement de l’École Entrepreneuriale et en partant du postulat que celle-ci est un nouveau champ d’expérimentation propice à la recherche, le projet de Chaire sur « l’entrepreneuriat inclusif » a émergé autour de l’importance de l’égalité des chances et de la pertinence du développement des compétences entrepreneuriales. La Chaire « entrepreneuriat inclusif » et l’École Entrepreneuriale s’inscrivent dans une contribution éducative, sociale, intellectuelle, économique aux territoires dans lesquels Kedge s’enracine.
Sarah Soilihi, responsable développement Terres d’Emploi, direction relations institutionnelles et politique Akto, souhaite que: «ce projet qui encourage l’ascenseur social. Il va avoir un impact fort sur le territoire et faire émerger de futurs ambassadeurs qui, je l’espère, tendront eux aussi leurs mains vers les générations de demain». Et Fabrice Alimi, vice-président de la CCIAMP de considérer: «Nous sommes sur une terre de mixité, c’est un terreau extraordinaire pour accélérer les expérimentations»
Michel CAIRE

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