Marseille. Benoît Payan : ‘La France peut compter sur sa grande capitale du sud’

Publié le 3 septembre 2021 à  22h06 - Dernière mise à  jour le 1 novembre 2022 à  14h54

Benoît Payan, le maire de Marseille, est intervenu sur l’esplanade du Pharo -juste avant l’intervention du Président de la République qui s’est exprimé sur l’avenir de Marseille- il a mis en avant les faiblesses de Marseille mais aussi ses forces, ses potentialités, insistant sur la chance que cette ville représente pour la France.

Benoît Payan, maire de Marseille ©Destimed/MC
Benoît Payan, maire de Marseille ©Destimed/MC

Dès les premiers mots Benoît Payan, s’adresse au Président de la République, donnant ainsi le ton de son intervention. «Je voulais vous dire en toute sincérité, au-delà des formes protocolaires de la tradition Républicaine, combien nous sommes sensibles à votre présence qui est la preuve, s’il en fallait une, de votre attachement profond pour la ville de Marseille». «Vous portez sur notre ville, poursuit-il, un regard attentif et ambitieux. Nous faisons le choix d’écrire une nouvelle page de l’histoire de Marseille, main dans la main, l’État et la ville, en dehors de tout clivage politique, au-delà de nos différences, nos histoires, nos choix, portés par l’intérêt général. Nous ne vous attendions pas dans l’idée de recevoir un chèque, mais dans l’espoir de partager une vision et un agenda, de porter ensemble un engagement».

«Marseille n’est pas une extrémité, c’est une porte, un carrefour, un eldorado»

Pour Benoît Payan : «Marseille n’est pas une extrémité, c’est une porte, un carrefour, un eldorado. Marseille peut devenir le premier port sur la méditerranée, le plus grand hub européen de connexions, adossé à la plus grande université francophone du monde, un pôle d’énergies et de liberté, de développement économique, culturel et intellectuel vers la Méditerranée, le Maghreb, l’Afrique et l’Asie». La voie est tracée et c’est en parlant d’histoire qu’il dessine l’avenir qu’il souhaite pour la cité phocéenne.

L’histoire de Marseille, «c’est celle de la rencontre entre une celto-ligure des quartiers Nord de la ville et un navigateur phocéen venu d’Asie Mineure». Benoît Payan évoque une ville qui s’est construite en balcon sur la mer. «Depuis, au fil des siècles, notre ville a développé ses particularités, sa singularité, souvent opposée au centralisme, mais toujours profondément républicaine». «Marseille, poursuit-il, c’est aussi une identité puissante et diverse, qui s’est enrichie par la sédimentation de strates successives de populations venues ici au gré des fracas de l’histoire.».

Avec force il rappelle: «Fuyant la misère ou la guerre, des hommes, des femmes et des enfants ont parcouru les chemins de l’exil pour s’arrêter ici par nécessité ou par choix. En cela, Marseille est à l’image de la France. Quelles que soient nos origines, nos histoires ou la couleur de notre peau, on peut devenir Marseillais à partir du moment où on le décide. C’est l’histoire de cette ville, comme c’est le sens du projet républicain». L’avenir, il le voit inscrit dans le passé de «cette ville incroyable où que l’on soit capitaine d’industrie ou instituteur, médecin ou galérien, on peut se forger un destin et réussir sa vie. Marseille c’est la ville des possibles, celle où les déflagrations de l’Histoire donnent la force de vivre, de créer et d’inventer, de construire et de bâtir».

Une histoire: «faite d’abandon, d’injustice et de gâchis»

Mais c’est aussi, aux yeux de Benoît Payan, une réalité historique «faite d’abandon, d’injustice et de gâchis». Alors, insiste-t-il: «Aujourd’hui, il nous faut regarder par-delà les poncifs, pour Marseille et pour le pays. Monsieur le Président, la méfiance réciproque entre Marseille et Paris, vous et moi en héritons, mais nous n’en sommes pas les héritiers». Marseille, avance-t-il: «a entamé sa transformation pour enfin pouvoir concrétiser des projets, mais nous avons aussi besoin que vous réformiez les aberrations d’une gouvernance territoriale illisible et injuste». Il considère alors que «l’État doit faire à nouveau confiance à Marseille, et parier sur cette ville incroyable».

«il faut répondre à l’urgence»

Puis de considérer: «Aujourd’hui, Marseille est touchée en son cœur par les trafics d’armes, les assassinats et des quartiers abandonnés se referment dans la peur et l’économie informelle aux connexions internationales. Cette situation n’est pas nouvelle disent certains. Peut-être, mais il n’y a pas de fatalité. Pas plus qu’il existe de solution miracle et instantanée. Nous n’aurons pas fini le travail aujourd’hui, loin de là».

«il faut répondre à l’urgence, préconise le maire de Marseille. Il s’agit, selon lui, «de recoudre d’abord une ville fracturée, devenue duale et inégalitaire. De remettre de la justice, et du service public, par une approche globale et systémique des maux qui gangrènent notre ville. De lutter contre les injustices économiques, culturelles, éducatives, sécuritaires, sportives, sanitaires, sociales et spatiales d’une ville qui a trop longtemps oublié une partie de ses enfants».

«Une ville qui assigne à résidence faute de mobilité…»

Benoît Payan explique que «cette ville qu’il nous faut désormais recoudre, rassembler pour la retrouver, et pour la développer. Cela passe par la rénovation urbaine, et par les transports, dans une ville embouteillée, où le dernier projet de métro fût inauguré à une époque où ni vous ni moi n’étions encore nés Monsieur le Président. Une ville qui assigne à résidence faute de mobilité, et qui finit par se scléroser elle-même».

Ce projet d’une ville juste et d’une ville tournée vers l’avenir, passe d’abord par l’école, avance l’édile . «Ce n’est pas l’actualité qui nous a fait prendre conscience des choses. C’est un sujet que nous portons depuis toujours», tient-il à préciser.

«Faire des écoles de la ville une priorité»

Benoît Payan aborde ensuite la question de l’école: «Ce doit être une chance pour les 80 000 petites Marseillaises et petits Marseillais qui chaque année, en école maternelle et en école élémentaire, mettent leur confiance dans le système éducatif public. Mais à Marseille, nos écoles sont sinistrées. Au printemps dernier, nous avons pris un engagement fort, faire des écoles de la ville une priorité. Recoudre la ville, miser sur sa jeunesse et lutter contre les inégalités, elle est là la solution pour relever Marseille».

La maire de Marseille insiste encore: «Nous cherchons à réaliser ce que certains pensaient impossible. Je le dis à nouveau, Marseille est un avenir pour notre pays. Cette ville qui bouillonne est un puissant terrain d’innovation. Les potentiels ne demandent qu’à s’exprimer si l’impulsion politique est au rendez-vous. Et c’est notre ambition. La France pourra compter sur sa grande capitale du Sud».

«Marseille a besoin de l’État. Pas pour demander l’aumône»

Benoît Payan Conclut son intervention : «Marseille a besoin de l’État. Pas pour demander l’aumône mais parce qu’au contraire, nous avons l’incroyable audace de penser que Marseille est une chance formidable pour la France. Par sa situation géographique exceptionnelle, par sa jeunesse, son instinct de survie et son esprit de débrouille, par le dynamisme de sa société civile et son identité singulière, populaire et pionnière, Marseille peut redevenir un moteur, un phare, une terre promise».

Alors que l’on habite Strasbourg, Nice ou Clermont-Ferrand, «on a intérêt à ce que la deuxième ville du pays retrouve la place qu’elle n’aurait jamais dû perdre, celle d’une grande capitale Euro-méditerranéenne. Comme Barcelone en Espagne, comme New York aux États Unis, comme Shanghai, Milan ou Saint-Pétersbourg, il est des villes, loin des capitales, qui portent une part de l’identité, de l’histoire et du dynamisme de leur pays».
Michel CAIRE

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