Marseille Fos. Le port veut faire du développement durable une vague porteuse

Publié le 25 janvier 2023 à  12h00 - Dernière mise à  jour le 8 juin 2023 à  15h28

En 2022, le port de Marseille Fos a investi 60 millions d’euros, porté par une croissance de 16% de son chiffre d’affaires, la hausse de ses trafics et les nombreux projets du port. Des chiffres et des perspectives présentés par Christophe Castaner, le président du conseil de surveillance du port Marseille Fos et Hervé Martel, le président du directoire du port.

Vue du Port de Marseille Fos depuis la Tour La Marseillaise ©Destimed/RP
Vue du Port de Marseille Fos depuis la Tour La Marseillaise ©Destimed/RP

En 2022, le port de Marseille Fos réalise 190M€ de chiffre d’affaires, une croissance de 16%, grâce à la hausse de 3% de son trafic maritime, de 10% de ses recettes domaniales et du retour de l’activité passagers. 77 millions de tonnes de marchandises ont été traitées en 2022, avec de nouveaux records battus notamment sur le conteneur maritime et ferroviaire, le gaz naturel et sur le nombre d’escales de croisière. 60 millions d’Euros ont été investis en 2022, permettant la poursuite ou la réalisation de nombreux projets d’aménagement. 80 millions d’investissement sont prévus en 2023.

«Un moment charnière pour ce port»

Christophe Castaner, président du conseil de surveillance et Hervé  Martel, président du directoire ont présenté bilan et projets du port de Marseille Fos © Destimed
Christophe Castaner, président du conseil de surveillance et Hervé Martel, président du directoire ont présenté bilan et projets du port de Marseille Fos © Destimed

Rien, pourtant, n’était évident rappelle Christophe Castaner évoquant la Covid, la guerre en Ukraine, l’augmentation du prix des matières premières, de l’énergie. «Nous sommes à un moment charnière pour ce port qui s’est construit sur les hydrocarbures. On pourrait se dire que tout est fini. Et on peut sentir chez certains de l’inquiétude, voire de la colère. Mais il faut accepter que la rente du pétrole prend fin. Même si nous avons encore 20 ans. Il faut préparer l’avenir, nous avons de grands investissements pour cela. Il faut répondre aux enjeux environnementaux car ce sont des enjeux sociétaux. La réponse aux enjeux du changement climatique est une feuille de route et c’est une opportunité».

Pour Christophe Castaner : «En véritable outil au service de la souveraineté, le port de Marseille Fos s’affirme en tant que haut lieu des transitions économique, écologique et numérique». Considère que le port est essentiel pour apporter de la richesse au territoire. Il précise: «Avec 190M€ de chiffre d’affaires réalisés en 2022, le port poursuit sa croissance ininterrompue depuis dix ans -excepté en 2020, en raison de la crise sanitaire mondiale-. Ces résultats lui permettent de pouvoir investir de plus en plus fortement dans les projets de transition. Avec la mise en œuvre de tous ses projets, la place portuaire créerait plus de 6 500 emplois en 10 ans.»

[( Quatre records battus en 2022
Le trafic total s’élève à 77 MT de marchandises traitées en 2022, soit +3%
1,53 Million d’EVP [[L’équivalent vingt pieds, ou EVP est une unité approximative de mesure des terminaux et navires porte-conteneurs basée sur le volume d’un conteneur de 20 pieds. On l’utilise pour simplifier le calcul du volume de conteneurs dans un terminal ou sur un navire]] +3% par rapport à 2021. 8,5 Mt d’import de GNL, +2,5 Mt par rapport à 2021 dont 230 000 conteneurs acheminés par train, soit +4% par rapport à 2021. 573 escales de navires de croisière dont 74 GNL.
Le port a géré plus de 9 500 escales (toutes escales confondues) en 2022, soit en moyenne près de 26 escales par jour. Avec plus de 90 lignes maritimes régulières directes, relié à près de 500 ports dans 156 pays à travers le Monde, le port de Marseille Fos constitue la porte d’entrée sud de l’Europe.)]

Le trafic de vracs liquides est en croissance de 5%

Hervé Martel annonce pour sa part que «le trafic de vracs liquides est en croissance de 5% en s’élevant à 45 millions de tonnes traitées en 2022». Le port de Marseille Fos a assuré l’approvisionnement en gaz du pays. «8,5 millions de tonnes de Gaz Naturel Liquéfié ont été importées en 2022.» Concernant le pétrole, «son importation a été perturbée par les mouvements sociaux et des arrêts techniques de certains sites.»

Le trafic de vracs solides s’élève à 11,4 millions de tonnes en 2022 soit – 3% par rapport à 2021. Une filière tirée vers le bas par la réduction d’ArcelorMittal de 8 Mt d’import de matières premières, puis de l’arrêt d’un de ses hauts fourneaux. Hervé Martel tient à rassurer: «Arcelor a des projets ambitieux pour le site de production plus écologique de l’acier. La production va donc repartir mais des travaux sont nécessaires». Concernant la croissance des vracs solides, il précise qu’elle est portée par le terminal minéralier de Fos «qui affiche une progression de 12 % grâce aux opérations spot de stockage et de transbordement de houille en remplacement de la bauxite. Le terminal de Caronte lui aussi affiche une croissance de + 7 % grâce aux imports de ferrailles».

3 millions de voyageurs ont été accueillis en 2022

Hervé Martel annonce que 3 millions de voyageurs ont été accueillis en 2022, soit le double de 2021. 1,51 million de personnes ont voyagé sur les lignes régulières, dont plus de 700 000 à bord des ferries corses et plus de 800 000 à bord des ferries à destination du Maghreb. «Première année pleine sans aucune restriction sanitaire, 2022 est même en croissance de 19 % par rapport à 2019, avant pandémie. Ce sont les traversées algériennes qui ont connu la plus grande progression, avec 27 % de passagers en plus par rapport à 2019.»

Un record d’escales pour la croisière en 2022

La croisière a établi un record d’escales en 2022 : «573 escales de navires, dont 74 propulsés au GNL. Ils ont accueilli 1,43 million de passagers, c’est 400 000 croisiéristes de moins qu’en 2019. Plus d’escales, mais moins de passagers, le marché des croisières se remet progressivement de la crise sanitaire», détaille Hervé Martel

Le train absorbe la hausse du trafic

Dans une logique de développement durable Hervé Martel met en exergue le report modal avec le train qui absorbe la hausse des trafics, faisant ainsi reculer la part de la route. «Le nombre de conteneurs transportés par train a atteint près de 230 000 EVP, un nouveau record, avec une progression de +4% par rapport à 2021 sur les deux bassins. Une situation encore meilleure à Fos où la part modale dépasse 17%, également en constante progression. La part modale ferroviaire s’est améliorée de 0,4 point pour atteindre 16% en 2022 contre 15,6% en 2021». Ainsi, la part de la route, reste, pour la 4e année consécutive, sous la barre des 80%.

Le fluvial poursuit sa baisse

En revanche le fluvial poursuit sa baisse. 660 00 conteneurs ont été transportés par barge en 2022, une perte de 10% par rapport à 2021. Sa part modale passe sous la barre des 5% rapportée aux volumes complets (contre 5,3% en 2021) ; elle s’élève à 5,5% ramenée aux trafics des bassins Ouest seuls desservis par le Rhône.

La réparation navale se porte bien

En 2022, L’activité de réparation navale des navires à flot totalise 114 navires pour 5 500 jours d’occupation soit une hausse du nombre de navires de +12% et une hausse de +307% pour l’occupation des quais par rapport à 2021. Les formes de réparation navale ont traité 81 navires à sec, soit 6% de moins qu’en 2021, mais elles totalisent 1 830 jours d’occupation en cales sèches, 8% de plus qu’en 2021.

Plus de 30 projets d’aménagement structurants

Pour faire face aux enjeux économique, énergétique et numérique, le port, en 2022, a investi 60M€, «soit 100% des investissements prévus». Parmi les investissements dédiés à la mise en œuvre des projets de développement, plus du tiers sont des projets de transition écologique. Pour l’année 2023, le port de Marseille Fos entend accélérer sa croissance : il prévoit 80M€ d’investissement et double l’enveloppe consacrée aux projets de transition écologique. «Plus de 30 projets d’aménagement structurants sont actuellement menés dans l’enceinte portuaire ou en lien avec les activités portuaires. Ils représenteront un investissement total de plus de 6 milliards d’euros, dont 5 milliards portés par le secteur privé.»

Quelque 6 500 emplois seront créés d’ici 10 ans

Avec ces projets, près de 6 500 emplois seront créés d’ici 10 ans», indique Hervé Martel qui rappelle que: «l’excellente dynamique des projets et leur concrétisation, sont l’œuvre d’une communauté portuaire particulièrement engagée, couplée à un domaine portuaire disposant d’une capacité foncière rare».

Concernant la connexion à quai en 2023, «le port poursuit son programme, engage les travaux pour l’équipement du terminal croisière et étudie la possibilité de l’étendre à la grande réparation navale et au futur terminal croisière de petites unités du J4 à l’horizon 2026.» Dans l’objectif de permettre aux chantiers navals de préserver le milieu marin et de s’inscrire dans un développement durable de leurs activités industrielles à Marseille, le port de Marseille Fos «a pris la maîtrise d’ouvrage d’un projet partagé de traitement des effluents de carénage issus de l’activité des chantiers navals dans les formes de radoub.»

Éolien offshore : le port de Marseille Fos structure une nouvelle filière

Parmi les projets, Provence Grand Large est un projet pilote de parc éolien en mer de nouvelle génération. Il se compose de 3 éoliennes, d’une capacité totale de près de 25MW, installées sur un système innovant de flotteurs à lignes d’ancrage tendues. Ce parc produira l’équivalent de la consommation électrique de la population de la ville de Martigues (45 000 personnes environ). Les éoliennes seront installées à 17km de la côte au large de Port-Saint-Louis-du-Rhône. «Le port de Marseille Fos se positionne sur cette nouvelle filière industrielle internationale. L’État s’est engagé à initier les travaux de deux parcs éoliens en Méditerranée. Sur quatre zones propices, deux ont été sélectionnées : l’une en Occitanie et l’autre au large de Fos-sur-Mer. Le projet porte sur une vingtaine d’éoliennes pour une production de 250MW pouvant être étendus pour atteindre 750 mégawatts. La mise en service est prévue en 2030.»

L’État a lancé deux Appels à Manifestation d’Intérêt (AMI), auxquelles «le port de Marseille Fos a candidaté pour l’aménagement d’infrastructures maritimes. Ce projet se réalise dans la continuité de Provence Grand Large.» Il est rappelé que « la concrétisation du parc dans le Golfe de Fos à plus de 22km des côtes reste est soumise aux résultats des enquêtes environnementales». Les lauréats de ces procédures de mise en concurrence seront désignés en 2023. D’ores et déjà, le port de Marseille Fos «a réservé 80 hectares de son domaine pour la création d’un hub, permettant le déchargement et stockage des composants, l’assemblage et le montage sur flotteur, le stockage… mais aussi l’implantation d’une nouvelle zone de fabrication et de mise à l’eau.»

Le port de Marseille Fos, futur hub hydrogène

Le port n’entend pas en rester là en matière d’énergie renouvelable. Il entend aussi être présent sur l’hydrogène. Le port de Marseille Fos, futur hub hydrogène avec les projets H2V et Gravithy…

Le projet H2V: sur une surface de 36 hectares, le site dispose d’un emplacement stratégique alliant un fort potentiel industriel à une activité portuaire maritime de premier plan et au carrefour des réseaux européens de transport de marchandises. Mis en service dès 2026 et par tranches jusqu’en 2031, le site composé de 6 unités de production de 100MW (soit 600MW) assurera la production de 840 00T/an d’hydrogène renouvelable par électrolyse de l’eau et permettra la création de 165 emplois directs et 100 emplois indirects. Il s’agit d’un investissement de 750 millions d’euros dont l’objectif est d’éviter chaque année le rejet dans l’atmosphère de 750 000 Tonnes de CO2.

Le projet Gravithy: a pour objet l’implantation dans la zone industrialo-portuaire, d’une usine de fabrication de minerai de fer pré réduits DRI (DRI Direct Reduced Iron) et HBI (Hot briquetted Iron) à partir de réaction du minerai de fer avec l’hydrogène. GravtiHy vise à réduire l’impact de la métallurgie en produisant et en utilisant de l’hydrogène vert et bas-carbone. L’usine permettra d’économiser 4 millions de tonnes de CO2.

Structuration de la filière numérique

La filière numérique se structure autour de la station d’atterrage de câbles sous-marins dans les bassins marseillais du Port. L’objectif est de disposer d’une infrastructure d’atterrage de 5 à 6 câbles sous-marins (connexion entre la partie sous-marine et terrestre), passant sous la digue du Large, pour se raccorder au réseau de télécommunication terrestre et/ou aux datacenters environnants. «C’est une nouvelle filière pour le port qui témoigne de sa capacité à trouver des relais de croissance et à diversifier ses revenus, en synergie avec le territoire.» En 2022, le port de Marseille Fos a contractualisé avec Cinturion, pour l’accueil du câble sous-marin TEAS qui relie Marseille à Bombay et avec un consortium d’opérateurs dont Vodafone, pour l’accueil de 2AFRICA, le plus long câble sous-marin du monde reliant trois continents : l’Afrique, l’Europe et l’Asie. Le port entend poursuivre la commercialisation des forages de sa station d’atterrage et réaliser d’autres forages si opportuns. «De plus, deux nouveaux projets d’implantation de datacenters sont
à l’étude : l’un flottant, l’autre dans l’ancien silo à sucre qui a fait l’objet d’un AMI fin 2021. Les procédures sont en cours.»
Michel CAIRE

[(

L’ouverture du port sur la Ville et ses habitants

Les liens entre la Ville et le port se sont, au fil des siècles distendus. Une volonté existe de voir des liens se reconstruire. Le port affiche l’ambition de faire «de la ville dans le port» -à l’instar de ce qui a été fait avec les Terrasses du Port ou encore le Cepac Silo- afin de permettre aux Marseillais d’accéder au littoral tout en préservant l’exploitation portuaire. Ainsi le port et les collectivités prolongent la place de la Joliette jusqu’à la mer. «Le port de Marseille Fos va en effet se doter d’un nouveau siège social en lieu et place de l’actuel situé sur la place de la Joliette à Marseille.» Il
s’agira de réaliser un projet d’environ 28 000m², accueillant d’une part le futur siège du port et d’autre part une surface locative de 19 000m², avec la réhabilitation de la Halle J0. «Un projet mixte bureau et commerces, attractif à la fois pour le port, l’investisseur contractant, mais également pour les utilisateurs et le public qui bénéficieront d’un espace ouvert sur la mer et sur le paysage urbain s’étalant de la Joliette au Pharo.» Le projet est donc double : créer un bâtiment pour accueillir le futur siège social du port et d’autres acteurs du secteur maritime et ouvrir cette parcelle sur la ville. «L’ouverture du port serait assurée par la réhabilitation de la halle JO, afin de proposer un prolongement paysager de la place de la Joliette jusqu’à la mer. L’investissement sera de 107 M€, livraison prévisionnelle progressive entre fin
2027 et 2029.
»

Le schéma d’aménagement du Grand Estaque

Le projet « Grand Estaque » poursuit 3 objectifs : celui de valoriser le foncier du port vers des activités loisirs, plaisance, économie bleue, celui de poursuivre l’amélioration et le développement harmonieux des interfaces ville-port et enfin celui de contribuer à l’amélioration de la qualité de vie des habitants, la mobilité, les équipements publics et le développement économique. Le port réalise un schéma d’aménagement allant des plages Corbières jusqu’au port de Saumaty, contribution à l’étude partenariale co-pilotée par la Ville, La Métropole, le GPMM et menée par l’AGAM, afin de faire converger les projets urbains et portuaires en une vision globale, partagée du devenir de la façade maritime Nord. « Après avoir mené les études de programmation en 2022 et en 2023, le port et ses partenaires définiront dès 2023 le schéma d’orientation et son calendrier, et les investissements afférents.»
M.C.)]

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