Marseille. Inauguration de la tour La Marseillaise: « Rassurez-vous elle n’est pas belliqueuse… Elle est en béton mais c’est en béton désarmé »

Publié le 26 octobre 2018 à  14h42 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  13h46

Dessinée par Jean Nouvel, La Marseillaise, tour de bureaux de 135 mètres de hauteur est une prouesse architecturale et technique mais aussi un projet économique et social durable. Elle vient d’être inaugurée ce jeudi 25 octobre en présence de nombreuses personnalités. La Marseillaise, qui abrite 35 000 m2 de bureaux, est née d’une commande directe de Constructa auprès de Jean Nouvel, à qui le groupe de promotion immobilière a fait appel pour donner une identité au bâtiment destiné à accueillir le plus grand ensemble de bureaux de la Métropole Aix-Marseille Provence

La Tour
La Tour
Marc Pietri, le président du Groupe Constructa et l'architecte Jean Nouvel (Photo Robert Poulain)
Marc Pietri, le président du Groupe Constructa et l’architecte Jean Nouvel (Photo Robert Poulain)
C’est par un hommage à Jacques Saadé, fondateur du groupe CMA CGM, que Marc Pietri, le président du Groupe Constructa, ouvre son intervention: «C’est lui le premier qui a eu le courage et l’investissement pour réaliser une tour à Marseille». Évoque la genèse de l’aventure: «Nous partîmes à trois…» avant de mettre en exergue le travail de Jean Nouvel «qui a fait œuvre de magie avec cette tour qui, de la terre, disparaît dans la mer et de la mer disparaît dans les collines». Souligne que l’on peut réconcilier architecture d’exception et rentabilité d’un projet et pour ce faire, considère: «Il faut faire confiance aux architectes, à la créativité, au beau. Ils sont les partenaires indispensables pour créer des projets à même de marquer au sens littéral du terme, un territoire». C’est un succès, la tour affiche complet avant même son ouverture. Et il insiste à ce propos sur les premiers qui ont fait le choix de venir s’y installer cite, entre autres, la métropole Aix-Marseille Provence via une décision d’Eugène Caselli alors président de MPM , La Sodexo, Haribo, la CCIMP … Et dévoile le message que lui a adressé le grand rabbin de France : avec cette tour «Il ne s’agit pas d’aller vers le ciel mais d’aller vers l’Homme».

«Les tours, tout autour de la terre, se ressemblent trop»

Jean Nouvel rappelle: «C’est pour éviter de trop s’étendre, pour limiter les transports quotidiens, que les grandes villes intègrent des tours près de leur centre. Elles utilisent les infrastructures de dessertes et les transports existants et on découvre alors naturellement qu’elles sont durables et urbaines dans tous les sens de ces deux mots». Mais, ajoute-t-il: «Une tour c’est dangereux», déplore qu’elles poussent «comme des clones». «Les tours, tout autour de la terre, se ressemblent trop. Elles paraissent souvent interchangeables et pourraient exister n’importe où. Elles qualifient trop rarement leur ville. Elles sont hautes mais anonymes. Parallélépipèdes lisses elles réfléchissent beaucoup derrière leurs murs rideaux trop brillants. Habité par cette conscience et ces considérations critiques, je propose une tour singulière. Elle a pour ambition d’appartenir clairement à l’épaisseur de l’air marin méditerranéen. Elle affiche ses désirs de jouer avec le soleil, de dessiner des ombres dans le ciel (…) Mais des ombres légères, des géométries simples pour engendrer des jeux mathématiques complexes…». La Marseillaise s’inscrit aux côtés de celle de «la reine Zaha Hadid», conçue pour CMA CGM. «Une tour élancée et longue en même temps comme une robe avec sa traîne. Je me suis dit que j’étais là pour contenir cette traîne, pour avoir un dialogue, comme dans un Paso Doble, les deux jouent ensemble, dans leur différence», décrit Jean Nouvel.

«Elle est en béton, mais c’est en béton désarmé»

Pour cette tour Jean Nouvel s’est appuyé sur l’appartenance l’imprégnation, les couleurs de la ville. «Et je l’appelle « La Marseillaise ». Mais rassurez-vous elle n’est pas belliqueuse… Elle est en béton, mais c’est en béton désarmé -béton allégé, béton de fibres- légère comme un dessin d’architecture inachevé… Celui que l’on peut voir sur les écrans d’ordinateur avec uniquement des traits, des fils… C’est le travail d’un architecte un peu insouciant qui ne saurait comment terminer la chose. Hé oui, la beauté de l’esquisse, celle du tableau qui veut laisser encore voir la toile… Une absence qui devient un territoire de plus pour l’imaginaire… Elle se veut, La Marseillaise, hymne à la lumière : une marche, un escalier, une ascension à des
passerelles vers ou dans le ciel. La Marseillaise sera bien bleu-blanc-rouge, elle remplace le bleu France par le bleu ciel, le blanc royal par le blanc impur de l’horizon ou du rare nuage, le rouge sang par les rouges ocre et brique présents sur les toitures et les murs environnants…
». Et, à ceux qui critiquent les couleurs, il répond en citant René Char: «Tout ce qui vient au monde pour ne rien troubler ne mérite ni patience ni égard». Une tour qui veut assurer des aménagements spécifiques au service du confort au travail à l’ère du numérique, «La Marseillaise favorise l’appropriation de ses espaces de la part de ses occupants, qui auront accès à un restaurant ainsi qu’à une crèche d’entreprise, située au 3e étage. Le confort des locataires a été pris en compte dans la conception de ces services : le restaurant se trouve aux 2e et 3e étages, à une
hauteur de vingt mètres environ et, surtout, face à la mer. Sensible à la métamorphose des habitudes de travail, la tour offre une gamme de lieux qui peuvent être exploités par la même personne selon le moment de la journée
».

Les rares cloisons aménagées dans les espaces sont quasiment toutes vitrées

Le bâtiment offre une grande souplesse d’utilisation : composée de plateaux aménageables selon les besoins des locataires, la structure est conçue pour être très peu contraignante. Le promoteur a requis des plateaux de 1 200 m2 par étage, une taille optimale pour des bureaux. Afin de favoriser davantage le lien entre intérieur et extérieur, Jean Nouvel a conçu des plafonds colorés qui sont la continuité de la façade. Le principe de transparence et de décloisonnement suggéré par la structure de la tour a d’ailleurs naturellement été adopté par les futurs occupants : les rares cloisons aménagées dans les espaces sont quasiment toutes vitrées.
Enfin Marc Pietri signalera que si la Tour La Marseillaise a pris son envol, l’aventure, à l’image d’une pièce de théâtre se jouant en 4 actes, Les Quais d’Arenc sont la symbiose de 4 «acteurs» écrivant, ensemble, une histoire commune : Le Balthazar, La Marseillaise, La Porte Bleue et H99. Premier acte, l’immeuble tertiaire «le Balthazar», puis, le 2e acte, la «Tour La Marseillaise». «La Porte Bleue», quant à elle, sera lancée fin septembre 2019 et signera le 3ème acte, en proposant une offre résidentielle prestigieuse et une résidence hôtelière à hauts niveaux de service. Enfin, le 4e acte viendra finaliser l’ensemble, avec la tour H99, composée exclusivement de logements premium offrant un point de vue exceptionnel sur Marseille. Jean-Claude Gaudin, le maire de Marseille, se félicite d’inaugurer cette tour «symbole structurant du renouveau de Marseille». Déclare toujours craindre que, lorsque des travaux commencent à Marseille : «On tombe sur le fémur de Jules César ce qui ne manquerait pas de bloquer les travaux, le progrès». La manifestation a pris fin avec le dévoilement de la plaque sur laquelle sont gravés les 1400 noms de ceux qui ont contribué à la réalisation de la Tour.
Michel CAIRE

Une Tour environnementale
(Photo Robert Poulain)
(Photo Robert Poulain)

« La Marseillaise » répond aux plus hauts standards environnementaux du moment : climatisation innovante, matériaux réutilisables et durables, peintures qui résistent
au vieillissement, acoustique renforcée grâce à des espaces absorbants, récupération de l’énergie… La tour a été conçue pour répondre aux normes internationales les plus modernes en matière de programmation mais aussi en matière environnementale. Ainsi, elle entend s’affirmer à la pointe du développement durable en visant, pour la première fois en France, l’excellence environnementale, avec les certifications environnementales HQE® Niveau excellent et LEED Gold favorisant une rationalisation des coûts d’exploitation et une vraie compétitivité en matière de coût au poste. De plus, raccordée à la centrale de géothermie marine Thassalia lancée par Cofely, filiale de GDF SUEZ, la tour est le premier IGH ayant recours à ce type de technologie, qui prévoit d’utiliser l’énergie thermique marine pour alimenter en froid le bâtiment. Cette solution moderne, économique et durable permet à La Marseillaise d’être une des tours les plus performantes de France. Bâtiment éco-conçu, équipements à haute performance et matériaux résolument durables sont ses atouts pour garantir une réalisation respectueuse de son environnement. Comme expliqué par Didier Brault, directeur de projet du chantier, «le système de climatisation de la tour est raccordé à une boucle d’eau de mer qui capte l’eau directement de la Méditerranée, ce qui permet d’utiliser l’eau froide déjà existante sans engendrer de consommations excessives d’électricité. Il s’agit d’une innovation pour la ville de Marseille. Pour ce qui concerne le chauffage, le bâtiment est bien isolé. La déperdition de chaleur et d’énergie est limitée au maximum. La tour est également dotée de panneaux solaires permettant notamment d’alimenter le restaurant d’entreprise.» Des matériaux réutilisables ont été utilisés pour le projet de La Marseillaise, notamment des bétons écocertifiés, à savoir des bétons écologiques réalisés par la réutilisation des scories, ainsi que le béton fibré ultra-hautes performances (BFUP) produit par l’entreprise Méditerranée Préfabrication, filiale de VINCI Construction France, dont l’usine de production se trouve à Marignane. Les brise-soleils extérieurs ont été réalisés avec un matériau appelé ductal, développé par le groupe Lafarge (également utilisé à Marseille pour réaliser la résille décorative qui recouvre le Mucem). Il s’agit d’un matériau rarement utilisé sur les façades. Dans le cas de La Marseillaise, ce matériau a été utilisé pour la toute première fois pour réaliser une façade étanche et réfractaire. De nombreux tests ont été réalisés avant que l’utilisation de ces matériaux innovants ne soit définitivement confirmée.
La Tour en quelques chiffres
-135 mètres de hauteur
-31 niveaux
-35 000 m² de bureaux
-3 850 pièces uniques aux teintes différentes de brise-soleil en BFUHP (Béton Fibré à Ultra Haute Performance)
-16 000 m2 de surface vitrée
-15 ascenseurs
-1 restaurant inter-entreprise
-1 crèche de 26 berceaux
-1 stationnement vélo au rez-de-chaussée
-5 commerces situés en pied d’immeuble
-5 terrasses végétalisées sur les toitures des commerces du rez-de-chaussée, aux
niveaux 18,19, 20, 30 et 31
-Surface SHON – 39 560 m²
-Noyau de la tour en béton, planchers collaborant structure mixte acier béton
-Fondations profondes : 83 pieux de 1,5 m de diamètre sur environ 33 m de profondeur
18 800 m3 de béton pour la totalité de la tour
-1 700 tonnes d’acier
-2 450 tonnes de charpente métallique
-600 ouvriers mobilisés au plus fort du chantier
Budget : 113M € (coût des travaux H.T.)
-900 emplois
-9 locataires : Aix-Marseille Provence Métropole, Haribo, Sodexo, Orange, Cepac,
SwissLife, Constructa, SNEF, WTC Marseille Provence

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