Marseille : Les notaires manifestent pour exprimer leur opposition à la réforme des professions réglementées

Publié le 17 septembre 2014 à  21h08 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  18h11

Les notaires et leurs collaborateurs ont manifesté ce mercredi à Marseille devant la Préfecture (Photo Philippe Maillé)
Les notaires et leurs collaborateurs ont manifesté ce mercredi à Marseille devant la Préfecture (Photo Philippe Maillé)
(Photo Philippe Maillé)
(Photo Philippe Maillé)
(Photo Philippe Maillé)
(Photo Philippe Maillé)

Fait exceptionnel, les notaires ont battu le pavé, ce mercredi, à l’appel du Conseil Supérieur du Notariat pour manifester leur opposition à la Réforme des professions réglementées que veut imposer le gouvernement aux Français. Une délégation menée par Maître Gérard Prévot, Président de la Chambre des Notaires des Bouches-du-Rhône, a été reçue en Préfecture à cette occasion. Ce jeudi une délégation sera reçu par Christiane Taubira et Emmanuel Macron. Maître Isabelle Decorps, notaire à Marseille précise : «Ce sera alors la première fois que nous serons reçus par le gouvernement depuis que ce projet de réforme a été lancé par Arnaud Montebourg». Et de prévenir : « Les droits des usagers sont en grand danger si cette réforme, qui touche 37 professions réglementées dont celle de notaires, est votée». Elle note toutefois que c’est avec un certain espoir qu’elle attend cette rencontre avec le gouvernement «tant nous partageons la conception de Christiane Taubira lorsqu’elle indique : « J’ai surtout le souci de l’accès au droit pour les justiciables, j’ai le souci de m’assurer que partout sur le territoire il y a à la portée des citoyens un notaire, un huissier, un avocat et bien entendu, j’ai le souci de vérifier la sécurité juridique des actes qui sont élaborés. C’est cela mon approche, ce n’est pas celle du revenu »».

« Aux États-Unis, modèle que veut imposer l’Élysée, une vente immobilière sur trois fait l’objet d’un procès »

Les notaires ont décidé de prendre à témoin les citoyens en s’adressant à eux pour expliquer ce que sont, à leurs yeux, les enjeux, les risques que comportent cette réforme.«La mission d’intérêt général qui est confiée aux notaires est la reconnaissance par l’État des compétences juridiques acquises dans tous les domaines du droit. C’est aussi l’assurance pour l’usager d’accéder à un service public du droit sur tout le territoire national auprès d’un rédacteur impartial, garant de l’équilibre du contrat qui sécurise et pacifie les rapports juridiques entre les acteurs économiques».
Au-delà des mots, les notaires entendent mettre en avant des faits. Ils précisent à ce propos : «En France, les actes notariés sont judiciairement contestés dans un dossier sur 1 100. Aux États-Unis, modèle que veut imposer l’Élysée, une vente immobilière sur 3 fait l’objet d’un procès. La concurrence existe déjà dans notre profession par la qualité du service rendu, non par son prix. La libéralisation du système notarial fera disparaître la sécurité juridique aujourd’hui garantie par les notaires».
Maître Isabelle Decorps rappelle : «En France, le notaire est nommé par l’État; le coût de l’acte, fixé par l’État, est identique partout et pour tous». Elle avance: «60% des actes (contrats de mariage, donation entre époux, adoption, etc.) établis par les notaires, dans le cadre de leur mission de service public, le sont à perte. Qu’en sera-t-il si la mission de service public disparaît ? Quelle profession sera d’accord pour travailler à perte ? Les couches les moins favorisées de la population seront pénalisée». Et d’ajouter : «Oui, nous achetons nos charges, mais cela, c’est après, au moins, sept ans d’études. Et, pour acheter, nous nous endettons».

«Non, vous ne payez pas des frais de notaire quand vous achetez un bien immobilier»

Puis de se faire l’écho de la lettre aux usagers concernant l’achat d’un bien immobilier: «Non, vous ne payez pas des frais de notaire quand vous achetez un bien immobilier. Sur une vente de 200 000 euros, les frais d’actes comprennent notamment 12 400€ d’impôts (droits de vente et TVA) collectés gratuitement pour l’État. L’étude notariale percevra environ 2 000 € HT quelle que soit la durée de gestion et la complexité juridique du dossier. Et si chaque partie est représentée par son notaire, la rémunération se partage entre eux (pas de surcoût, pas de rémunération individuelle)». Elle n’omet pas de déclarer à ce propos : «Le notaire est collecteur d’impôts pour l’État : 22 milliards d’euros par an».
Elle avoue enfin son incompréhension face à un tel projet : «22 des 28 pays de l’Union Européenne ont un notariat de type latin comme le nôtre, ce qui ne pénalise en aucun cas leur croissance, l’Allemagne en est la preuve la plus éclatante».
Mieux, des pays tels que la Chine, la Corée du Sud, le Vietnam et de très nombreux pays émergents, en Europe de l’Est et en Afrique«ont créé un système notarial copié sur notre modèle, avec l’appui, l’implication du notariat français». «Ces pays ont rejeté le système anglo-saxon que le gouvernement veut nous imposer sans concertation. L’Australie, pays de tradition anglo-saxonne, travaille à la création d’un système similaire au nôtre. Et certains Sénateurs américains ont même appelé à la création d’un notariat aux USA, au motif que cela aurait pu éviter la crise des subprimes en 2008».
Et les notaires de constater : «En revanche, aux Pays-Bas ou au Québec, la libéralisation de la profession a vu une explosion des tarifs pour les petites transactions, pénalisant ainsi les consommateurs les plus modestes». Avant de s’interroger : «Nos dirigeants ont-ils le droit de sacrifier la sécurité juridique des Français sur l’autel de l’ultra-libéralisme ?».
Michel CAIRE

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