Marseille. Rencontre avec le comédien Günther Vanseveren qui joue dans ‘Les vivants et les morts’ de Gérard Mordillat vue au Toursky et reprise au Rond-Point de Paris

Publié le 2 janvier 2023 à  19h59 - Dernière mise à  jour le 5 janvier 2023 à  12h26

Il entre en scène et nous voilà saisis. Dans le rôle de Rudi, un personnage combatif en révolte contre la décision de fermer l’usine où il travaille, Günther Vanseveren marque de son empreinte «Les vivants et les morts » la pièce de Gérard Mordillat que nous avons vue au Toursky et qui sera reprise au Rond-Point de Paris en février.

Günther Vanseveren dans
Günther Vanseveren dans

Comédien voltigeur, cascadeur chanteur, Günther Vanseveren esprit libre et curieux creva les planches dans « Hôtel des deux mondes » la pièce de Schmitt aux côtés de Davy Sardou, Jean-Paul Farré et une mise en scène de Anne Bourgeois. Impressionnant tout au long du film de Jean Adrien, «Bien profond dans ton âme», Günther Vanseveren s’impose également dans «Don Juan est une femme» une comédie d’Olivier Maille où il partageait la scène au Café de la Gare avec Mathieu Coniglio. Écrivain il a également signé deux beaux recueils de poèmes dont nous vous reparlerons bientôt. «De l’encre pour les fauves» tout d’abord paru chez Edilivre-Aparis un recueil de poésies traitant de la passion, de l’imaginaire, de la jeunesse et de sa fougue, sur fond de tribulations générationnelles. «Geysers» ensuite un recueil de poésie sous forme de parcours initiatique retraçant les aventures réelles ou fantasmées d’un jeune homme du XXIe siècle et de son ressenti quant à son époque et sa génération.

«En prose ou en vers, les divers poèmes de l’ouvrage sont avant tout le partage d’une certaine vision du présent. D’une époque à l’autre, tout semble bousculé, mais l’essence humaine demeure intacte. Ici, la notion de temps n’existe plus… Simplement le maintenant rêvé, l’absolu fantasmé, dans une lutte poétique et imaginaire face au concret tour à tour joyeux, déprimant, passionné ou absurde de tout à chacun», nous dit-il via son éditeur Annick Jubien. Jamais là où on l’attend il est Shere Khan dans la comédie musicale «Le livre de la jungle» de Ely Grimaldi et Igor de Chaillé mise en scène par Ned Grujic. Günther Vanseveren a également joué en 2010 dans « Famille d’accueil» et en 2013 dans «Plus belle la vie» montrant par là qu’il est aussi à l’aise dans le théâtre « pointu » que dans les productions populaires. Preuve d’un éclectisme qui est aussi une force artistique.


Entretien avec Günther Vanseveren que avons rencontré au Toursky où la pièce « Les vivants et les morts » a connu un succès franc et massif et ce, avant sa programmation au Rond-Point à Paris.

Günther Vanseveren (Photo DR)
Günther Vanseveren (Photo DR)

Quel est votre parcours?
J’ai commencé mon parcours dans le domaine de la cascade (une passion d’enfance). Cela m’a vite amené à jouer et à y prendre goût. J’ai donc commencé à décrocher des rôles au théâtre. Puis les spectacles devenant de plus en plus pluridisciplinaires j’ai fini par me mettre au chant (une autre passion). Disons qu’une passion artistique en a entraîné une autre jusqu’à les compléter au fil des ans.

Vous êtes un artiste multiforme. Quels sont les domaines artistiques que vous préférez défendre…Théâtre, cinéma, comédies musicales, cascades littérature?
Je me sens davantage dans mon élément à l’intérieur du spectacle vivant en général, surtout au théâtre et dans le musical. Non pas que je ne m’intéresse pas au cinéma. J’ai un profond respect et un réel intérêt pour cet art. Mais simplement mon parcours s’est naturellement dirigé vers le spectacle. C’est la trajectoire qui m’a le plus souvent été ouverte et c’est aussi celle où maintenant je me sens le plus en famille. J’adore écrire aussi. De la poésie et des chansons. Mais ça, c’est davantage une passion solitaire par laquelle je peux m’évader et goûter à une autre forme de créativité surtout.

Comment êtes-vous arrivé sur « Les vivants et les morts » ? Que pensez-vous de cette pièce et comment définissez-vous le travail de Gérard Mordillat?
Je suis arrivé sur le spectacle en passant une audition. Gérard Mordillat était encore en pleine recherche de sa distribution, notamment pour les rôles de Rudi et de Dallas. J’ai interprété un monologue et une chanson et le lendemain j’ai su que j’allais faire le rôle. Cela a été très vite, d’un coup. Pour ce qui est de la pièce en elle-même, j’ai d’abord lu le roman que j’ai trouvé magnifique. Il faut être insensible à mon sens pour penser l’inverse, ou pour du moins ne pas être touché par les personnages et leurs existences.

Dans la continuité de cette œuvre, je trouve que l’aspect théâtral et musical du spectacle alimente de manière originale le thème général. En effet, il y a pas mal de spectacles musicaux de grande qualité, il y en a toujours eu et il y en aura encore. Mais un spectacle musical sur fond de drame « social », et adapté d’un roman à l’univers si marqué, c’est en ça que ce spectacle-là est vraiment une pure création. C’est ce mélange inattendu qui en fait sa particularité et sa richesse. Quant à Gérard Mordillat, au travail, c’est un metteur en scène très visuel. On sent le réalisateur en lui. Il est très sensible à l’atmosphère, à l’ambiance, visuelle comme sonore. Et pour cause, la musique fait partie intégrante du spectacle. Il sait exactement ce qu’il veut puisque c’est aussi un auteur et que cet univers fait partie intégrante de sa personne mais en même temps, il laisse aux acteurs une liberté d’interprétation assez large -tant que cela ne dénote pas du propos évidemment- mais il reste présent sans jamais enfermer ses comédiens. Il demande simplement de vivre la situation avec leur propre ressenti et surtout avec leur personnalité.

Comment vous a-t-il dirigé?
Avec cette même liberté dont je parlais. Il m’a laissé m’exprimer le plus simplement du monde en me laissant évoluer sur scène avec ma propre personnalité, donnant juste certaines clés par moment quant à l’histoire du personnage et son passé par exemple.

Qu’est-ce qu’un bon metteur en scène pour vous?
Il s’agit avant tout de tomber sur quelqu’un qui sait exactement ce qu’il veut. Qui a une idée plus que précise du rendu de ce qu’il attend. Rien de pire que le flou… Il s’agit de précision, d’une vision, d’attentes, de connaître son sujet sur le bout des doigts, de savoir pourquoi on y travaille et aussi, tout de même, d’aimer un minimum le travail des acteurs.

Parlez-nous de votre personnage de Rudi ?
Rudi, c’est avant tout l’histoire d’une enfance tourmentée. Marié assez jeune avec Dallas. Il voudrait vivre ce qu’il n’a pas vécu enfant (une vie de famille ; mais étant passé par des centres éducatifs, il en a été privé). Du coup, il ne s’est pas comment s’y prendre. C’est un chat sauvage, imprévisible, instinctif, potentiellement dangereux. C’est une intelligence brute. Il ne montre jamais de sensiblerie outrancière mais c’est dans la fraternité et l’injustice que sa fragilité et sa sensibilité se révèlent.

Vous et vos camarades de jeu faites partie d’une troupe. Pouvez-vous nous la présenter ?
La compagnie s’appelle : « Les rêves indociles ». Esther Bastendorff et Hugues Tabar-Nouval en sont les fondateurs. Et je dois dire que nous leur devons littéralement l’accomplissement de ce projet. C’est grâce à leur persévérance, leur motivation et leur passion qu’il a pu se réaliser. Les autres artistes du spectacle sont dans le même cas que moi, nous avons intégré la compagnie en rejoignant ce spectacle.

Vous avez également publié « De l’encre pour les fauves » et « Geysers » deux recueils de nouvelles. D’où vient cette passion de l’écriture ?
La passion pour l’écriture, je l’ai depuis gamin. J’ai toujours aimé m’évader en écrivant. En me racontant des histoires. Jouer avec les mots m’apaise. Il s’agit de deux recueils de poèmes écrits à quelques années d’intervalles. Il y a aussi des paroles de chansons dedans puisque j’ai fini par faire mettre en musique certains de ces textes avec l’aide d’un ami compositeur au sein de notre groupe « Accord ouvert ». Mes textes et poèmes sont souvent inspirés de rêveries, de songes. Je note mes rêves sitôt réveillé pour ne pas les oublier.

Vous êtes embarqué sur la comédie musicale « Le livre de la jungle » qui sur des textes d’Ely Grimaldi et Igor de Chaillé propose une mise en scène de Ned Grujic. Vous y jouez Shere Khan votre premier rôle de méchant. Comment définiriez-vous l’ensemble ainsi que votre jeu?
C’est un très joli spectacle. Un grand classique aussi ! On y retrouve tous les héros (et anti-héros) de l’œuvre de Kippling. Avec un ton humoristique et décalé. De la danse, de la chanson, des marionnettes, des duels au bâton. De beaux costumes. C’est très complet, très énergique tout en restant assez artisanal dans l’esthétisme général. Et oui, Shere Khan, c’est un sacré personnage. Comme je ne pensais pas avoir l’âge du rôle à la base ni forcément sa corpulence (nous imaginons toujours un vieux tigre ou du moins un fauve assez imposant), j’ai travaillé avant tout sur le corps et la voix. J’ai fini par trouver une sorte de saturation vocalement pour assombrir le personnage et par lui trouver une démarche particulière. Après je suis aussi aidé par un maquillage et un costume qui permettent d’aller à fond là-dedans.

Quels sont vos projets ?
«Les vivants et les morts» va se jouer au Théâtre du Rond-Point à Paris en février. «Le livre de la jungle» va reprendre en tournée. A côté j’écris toujours. Des textes de chansons mais aussi un spectacle que j’ai en tête. J’ai également quelques concerts en prévision avec mon groupe « Accord Ouvert ».
Propos recueillis par Jean-Rémi BARLAND

« Les vivants et les morts » au Théâtre du Rond-Point de Paris du 14 au 26 février 2023 à 20h30. – Dimanche 26 février – 15h30 – Relâche les 19 et 20 février. Plus d’info et réservations : theatredurondpoint.fr –

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