Mauritanie. Entretien avec Isselmou Ould Tajidine: BCI, une discrète réussite africaine

Publié le 2 novembre 2022 à  9h25 - Dernière mise à  jour le 9 juin 2023 à  20h53

En juillet 1999, la Banque pour le Commerce et l’Industrie ouvrait son premier établissement à Nouakchott. En 2022, la BCI est devenue la première banque de Mauritanie, avec des filiales au Sénégal, au Mali et en Guinée. Au-delà d’une réussite économique, qui n’est unique ni dans la sous-région, ni sur le continent, il est significatif de constater que le développement de l’entreprise a été conduit exclusivement avec des ressources humaines et financières locales, l’actionnariat restant par ailleurs entre les mains de ses fondateurs, personnes physiques. Le très discret Isselmou ould Tajidine, Président du Groupe BCI a accepté de répondre à nos questions.

Isselmou Ould Tajidine, Président de la BCI ©DR
Isselmou Ould Tajidine, Président de la BCI ©DR

Destimed: Vous êtes fondateur et Président du Groupe BCI. Pouvez vous nous dire ce qui vous a poussé à créer la BCI ? Et à destination de quelle clientèle ?
Isselmou ould Tajidine : Il nous est apparu, il y a maintenant 23 ans, que notre Pays ne disposait pas encore d’un secteur bancaire adapté et suffisamment important au regard de la modernisation de l’économie et des besoins accrus des acteurs économiques mauritaniens en matière de services bancaires. C’était aussi bien sûr, et comme toute entreprise, l’opportunité de créer une nouvelle activité dont nous ressentions le potentiel important de développement. Dès l’origine, la BCI s’est tournée vers les entreprises du commerce et de l’industrie, c’est-à-dire le «corporate». Avec une attention toute particulière portée à la constitution d’un réseau de correspondants internationaux qui nous permet aujourd’hui d’avoir une capacité et une ouverture exceptionnelles d’intervention en matière de financement du commerce international. Elle s’est, bien sûr, également inscrite dans le financement des activités de l’État et de ses institutions.

Comment expliquez-vous la réussite de votre Groupe, sa personnalité spécifique, dans un environnement dominé par des groupes importants, souvent internationaux?
Tout d’abord, rappelons que la réussite est toujours relative et jamais définitive. Cela dit, les raisons expliquant la santé, et le développement sous-régional de notre Groupe sont multiples. Il y a tout d’abord le facteur humain, la qualité humaine et professionnelle de nos organes dirigeants, de nos collaborateurs hommes et femmes. Il y a ensuite la conviction que c’est à nous, Africains, d’assurer notre propre développement. Ce dernier, individuel ou national, ne peut plus être exogène, mais impérativement endogène. Nous en avons les moyens et les capacités, nous connaissons nos marchés et leurs acteurs, nous en maîtrisons le contexte, les cultures, les opportunités et les risques. Ceci tout en reconnaissant naturellement nos faiblesses et la nécessité de recourir régulièrement à des partenaires spécialisés dans différents domaines d’expertises. Je tiens d’ailleurs ici à les féliciter, tout comme je remercie nos correspondants bancaires et les Institutions Financières Internationales qui nous font confiance dans de nombreux pays.

Pour le reste, une banque ne peut prospérer sans une extrême rigueur dans l’emploi et la gestion des fonds qui lui sont confiés. Par ailleurs, et il faut le rappeler, le secteur bancaire évolue dans un environnement légal et règlementaire extrêmement contraignant, dont le respect est impératif. Et ceci est une bonne chose, car de sa santé dépend largement l’économie nationale et la sécurisation des fonds qui lui sont confiés. Enfin, et c’est essentiel, la croissance du Groupe BCI est largement portée par celle du continent africain en général, et de l’Afrique de l’Ouest en particulier.

A ce sujet, et si nous pouvons en effet penser que l’Afrique prend une place majeure dans la croissance mondiale, quel regard portez-vous sur les événements qui secouent l’Afrique de l’Ouest en ce moment : en matière de gouvernance bien sûr, mais aussi la persistance d’actes de terrorisme…?
Je ne me prononcerai pas sur des événements politiques se passant dans des pays voisins et frères. Si ce n’est pour souhaiter le calme et à la paix civile. Cela est essentiel, tant sur le plan humain qu’en matière de stabilité et de développement social et économique.

Quant au terrorisme, je ne peux que le condamner, d’où qu’il vienne et quels qu’en soient les motivations. La BCI, comme tout le secteur bancaire, déploie des politiques et des procédures nationales et internationales précises et déterminées de lutte contre son financement et contre le blanchiment d’argent. Nous avons été parmi les premiers à nous engager dans ce sens il y a plusieurs années, et le département «conformité » est au cœur de toutes nos activités. Nous sommes convaincus de la nécessité de la transparence des transactions financières et bancaires, en Afrique, comme dans le reste du Monde.

Le monde sort d’une crise sanitaire majeure qui a fragilisé l’économie, et compromis la croissance. Quel en a été l’impact sur le Groupe BCI ?
Outre des comportements différents, et des frais additionnels (dans l’exercice de nos métiers, mais aussi liés à nos soutiens directs aux populations), le Covid a freiné l’activité de nombreux clients et nous avons dû adapter certains de nos concours. Il n’y a toutefois pas eu de conséquences dramatiques pour le Groupe. Et ceci pour plusieurs raisons : nos engagements ne portaient pas significativement sur les secteurs les plus touchés, nos Directions Générales nationales ont été extrêmement engagées et réactives, les banques centrales ont mis en place des actions significatives pour amortir le choc de la pandémie. Il n’en demeure pas moins des fragilités sectorielles qui méritent toute notre attention.

Dans un contexte international complexe et incertain, comment envisagez-vous l’avenir du Groupe BCI ?
Avec confiance ! Tout d’abord parce que nos fondamentaux, comme nos résultats sont bons. Et nous avons des équipes remarquables et motivées dans chacun des pays où nous sommes présents. Cela nous permet d’envisager, pour 2023, notre implantation dans un nouveau pays, puis de poursuivre dans d’autres.

Quel sera donc ce prochain pays d’implantation ?
Vous l’apprendrez le moment venu ! Merci de votre intérêt pour notre Groupe.
Propos recueillis par Michel CAIRE

[(Isselmou ould Tajidine est Président du Groupe Banque pour le Commerce et l’Industrie SA (BCI) – Président de l’Association Professionnelle des Banques de Mauritanie – Administrateur de l’Union Maghrébines des Banques)]

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