Publié le 28 février 2020 à 9h01 - Dernière mise à jour le 31 octobre 2022 à 9h47
«Nous ne voulons pas un changement, nous voulons une rupture», lance Yvon Berland, candidat à la mairie de Marseille soutenu par LREM, en ouverture de la présentation de son programme pour transformer Marseille». Un document qui comprend 129 propositions, 6 urgences, 6 grands projets et 7 engagements «pour donner à Marseille un nouveau destin, offrir un nouvel horizon aux jeunes comme aux moins jeunes dans cette ville aujourd’hui en grande difficulté». «Tous les candidats ont des programmes, poursuit-il, nous aussi mais, en plus, nous proposons une nouvelle gouvernance avec des élus compétents, des mairies de secteur qui auront plus de pouvoirs avec des contrats d’objectif et des moyens adaptés à chaque secteur. Et notre projet s’appuie aussi sur les citoyens qui disposeront de budget participatif. Tandis que nous remobiliserons le personnel en lui redonnant le sens de sa mission et en mettant en place des formations adaptées».
Le programme porté par Yvon Berland présente des urgences, des grands projets avec en tête: la mauvaise santé financière de la ville. «Ce qui m’inquiète c’est de savoir dans quel état nous allons retrouver cette ville. Lorsque l’on voit les documents de la Chambre régionale des Comptes on ne peut que se dire que cette gestion a été répréhensible au moins sur un plan moral et éthique. Mais, dans tous les cas, nous avons trois priorités parmi les priorités sur lesquelles nous avancerons: l’habitat, la sécurité et les écoles. Nous nous sommes résignés à ce que des Marseillais vivent dans l’insalubrité. Retrouvons notre dignité en leur rendant la leur. La 2e ville de France et la 5e puissance mondiale doivent pouvoir le garantir. Les écoles? Nous devons tout changer pour faire de Marseille un modèle éducatif performant et innovant. La sécurité? Notre cadre de vie est gangrené par les incivilités, les infractions du quotidien ainsi que le sentiment d’impunité de ceux qui les perpétuent. Nous gagnerons la bataille de la sécurité en renforçant les effectifs, en clarifiant les responsabilités entre Police Nationale et Police Municipale et en nous appuyant sur l’efficacité des nouvelles technologies». «Mais, encore une fois, insiste-t-il, il faut mesurer que la ville est très mal gérée. Nous allons y remédier ce qui permettra de rétablir la confiance avec l’État et donc de disposer de fonds et nous ferons de même avec l’Europe, une Europe qui, pour cette municipalité n’existe pas». Puis, d’évoquer la mise en place d’une gouvernance qui «va s’appuyer sur la transparence, nos décisions seront appuyées sur des éléments objectifs, nos actions seront fondées sur un diagnostic puis une évaluation. Nous tiendrons un Conseil municipal par mois pour débattre et rendre compte. Et, si nous voulons mettre en œuvre des projets que nous n’avons pas annoncés pendant la campagne, nous organiserons un référendum local. Notre gouvernance s’appuiera sur la transparence et le collaboratif car le temps de la gouvernance dans l’entre-soi est révolu».
Douze urgences, douze défis
Ce programme c’est donc douze urgences, douze défis, comme autant de travaux, de reconquête: de l’école, de la sécurité, de l’espace public, de la santé, de la dignité, du temps, de la nature en ville, de l’emploi, de la mer, du centre-ville et des noyaux villageois, de la politique et de la place mondiale de Marseille. Yvon Berland précise notamment: «Notre fil rouge sera l’éducation car c’est par là que tout commence et notre programme se décline en trois temps: 100 jours, 1 000 jours avec une vision à dix ans». En matière de santé, il considère que «la question n’est pas de construire un bâtiment mais de favoriser l’innovation au sein de notre CHU et de remédier aux déserts médicaux notamment dans la partie Nord de la ville. Nous aiderons financièrement l’installation de cabinets médicaux inter-professionnels, il en faut sans doute une vingtaine dans Marseille. Nous déploierons également une offre mobile de soins. Et ce sera aussi une façon de régler le problème des urgences.» Concernant l’espace public, il lance: «Nous avons abandonné l’espace public aux poubelles et aux voitures. Rendons notre ville propre et à nouveau accessible à tous, notamment les personnes âgées, celles en situation de handicap et les jeunes parents avec poussettes». Puis abordes les sujets transverses au rang desquels: la culture «qui est un enjeu majeur d’inclusion», l’urbanisme «qui nécessite une politique volontariste et de long terme», la grande pauvreté, «nous coordonnerons toutes les volontés pour lutter contre». Indique encore que le nombre de crèches sera multiplié, que la pratique du sport sera développée. Et, assure-t-il: «Nous lutterons contre les discriminations sexistes et homophobes».
Puis de donner la parole à «notre prochain adjoint aux finances», Philippe de Fontaine Vive, lequel précise: «Nous partons d’un diagnostic, celui de la Chambre régionale des comptes. Au lieu de contester ce document comme d’autres nous en faisons une base de travail. Deux critiques sont avancées: l’absence de stratégie claire et de pilotage sérieux avec une dépense du personnel que l’on a laissé filer ce qui a asphyxié les capacités de financement des priorités lors de ces deux dernières années ». ll importe donc, selon Philippe de Fontaine Vive de recréer des marges de manœuvres en renégociant la dette, en ayant une meilleure valorisation du patrimoine municipal. «Nous avons commencé à discuter avec les partenaires financiers, que sont la BEI et la Caisse des Dépôts et Consignations, qui sont prêts à nous aider, tout comme la Région ou encore l’État si le sérieux revient. Puis, il y a une mutualisation des services à mettre en place avec la métropole. Nous allons demander à la Chambre régionale des comptes de mettre en place un programme de travail afin de voir avec elle les points les plus complexes pour avoir une vision claire».
«Marseille n’a toujours pas pris le virage de la révolution de la transition écologique»
Trois dossiers, l’environnement, la sécurité et l’emploi sont alors mis en exergue. Sophie Goy, tête de liste dans les 9e et 10e arrondissements, évoque les thèmes de l’environnement et de l’écologie, de plus en plus mis sur le devant de la scène : «Marseille n’a toujours pas pris le virage de la révolution de la transition écologique. Elle est, là-encore, très en retard par rapport aux autres grandes villes et métropoles. Les espaces verts y sont inexistants. La biodiversité est non représentée. Nous imposerons que la ville soit dotée de 20 % d’espaces verts». Saïd Ahamada tête de liste dans les 15e et 16e arrondissements, poursuit sur ce volet «vert» : «Notre ambition affichée est d’être une municipalité neutre en émission carbone. Avec des agents municipaux que nous souhaitons valoriser dans leurs fonctions pour devenir de vrais ambassadeurs de la Ville. Une Ville qui doit être là pour donner le « La », justement, de cette politique en matière de neutralité carbone. Une politique qui doit être impulsée en premier lieu par la Ville, une terre modèle de la transition écologique». En ce qui concerne le rapport de Marseille et de ses habitants à la mer, le député de LREM a plusieurs fois insisté sur une idée précise : «Nous avons tourné le dos à la mer dans cette ville, dont seulement 17 % de sa façade maritime est accessible sur 57 kilomètres de littoral. Nous avons prévu plusieurs projets d’accès à la mer pour inverser la donne.» Dans le programme présenté, il est ainsi prévu de « tester l’ouverture au public d’une partie de la Digue du Large dès l’été 2020», et de lancer le projet d’une «grande vague, de l’Estaque aux Goudes, le long du littoral, pour devenir une promenade installée pour les cyclistes et piétons».
800 policiers municipaux en 2025
Caroline Pozmentier-Sportich en charge de la sécurité durant les deux derniers mandats, en binôme avec Yvon Berland dans les 6e et 8e arrondissements, a annoncé le «quasi doublement du nombre de policiers municipaux» par rapports aux effectifs actuels, «pour passer à 800 en 2025». Considère que «pour le moment, le compte n’y est pas. Je le dénonce. Il y a eu un frein sur le programme municipal de 2014. J’ai beaucoup travaillé sur le sujet avec le secrétaire d’État, Laurent Nuñez, qui connaît bien Marseille, au sujet d’une véritable brigade de la tranquillité publique que nous entendons installer la nuit. Nos réflexions ont conduit à ce qu’elle soit composée au minimum de 50 policiers municipaux, et renforcée par d’autres agents. On doit sortir des silos. Les services municipaux dans ce domaine ne peuvent pas s’arrêter de travailler à 17 heures». L’enjeu serait «d’avoir un policier pour 1 000 habitants, en plus de la création dans chaque secteur d’une équipe de la tranquillité publique pour la nuit». Le chiffre de 2 000 caméras de vidéo protection a été avancé pour 2021, comme l’expérimentation d’une application d’entraide citoyenne d’alerte et de secours et la présence de médiateurs de proximité sur l’espace public. Toujours dans le programme d’Yvon Berland pour Marseille est inscrite la volonté de compter «sur 500 agents de la police municipale dès avril 2020 pour être sur le terrain durant la saison estivale». Autres idées avancées : « La tolérance zéro sur les délits routiers, l’expérimentation d’une application citoyenne de signalement des incivilités, l’installation d’écrans dans les trois commissariats de la police nationale pour le transfert d’images des caméras de vidéo surveillance». Autres projets annoncés : un dispositif de nuit d’accompagnement des femmes, l’installation de radars tourelles autour des écoles et l’ouverture d’un hôtel de police mixte sur Euroméditerranée, composé avec à la fois des représentants de la police municipale et de la police nationale, «c’est une demande qui émane de chez eux, nous y répondrons».
«Un positionnement de Marseille au service de l’humain et de la nature»
Troisième grand thème présenté par Arnaud Devigne, tête de liste dans les 1er et 7e arrondissements, celui de l’économie et de l’emploi. «Aujourd’hui, il y a plusieurs chiffres et réalités à prendre en compte, comme le fait que 35 % des 15-24 ans à Marseille sont sans emploi. Un actif sur deux n’a pas le Bac. Il manque encore 60 000 emplois du secteur privé dans la ville. Il faut réconcilier Marseille avec la réussite des talents, et améliorer les conditions de vie dans ce sens. Nous avons ici un gros problème de formation de nos jeunes. Pourtant, en 2030, 85 % des emplois qui seront occupés n’existent toujours pas aujourd’hui. Il y a tout à faire dans le domaine, mais, pour cela, il faut se donner les moyens d’augmenter la formation dans ce sens». Dans ce but, le programme de campagne prévoit la «création d’une école inclusive pour préparer aux métiers de demain». Elle devrait être installé entre le J1 et le J4, à la Joliette, pour ainsi proposer de former les jeunes sans diplôme originaires de la ville, comme les plus âgés en reconversion professionnelle, aux métiers issus de la transition numérique et écologique. Arnaud Devigne poursuit son raisonnement : «50 % des emplois qui vont être créés sont liés au numérique. On doit en même temps penser à ce chiffre, tout en augmentant à Marseille la qualité de vie pour faire rester les jeunes ici. Il y a eu pour la ville toutes ces années capitales de la culture, du sport, d’autres choses… mais, au final, pour pas grand-chose. On ne peut pas lancer comme cela plein de batailles, il faut se concentrer sur une, car il est impossible de gagner en même temps 50 batailles. Il y a des priorités à avoir. Il faut désormais choisir un positionnement de Marseille au service de l’humain et de la nature. En développant les projets de coworking au centre-ville, pour faire de la rue Saint-Ferréol une rue des entrepreneurs. Un lieu où on vient et où on vit à nouveau, grâce à plusieurs espaces réservés au coworking, à l’installation ou le retour d’architectes, journalistes, professions libérales… pour revitaliser le centre-ville.»
Bruno ANGELICA et Michel CAIRE