On a vu à La Roque – Abduraimov et Trevino : Tchaïkovsky sublimé !

Publié le 8 août 2014 à  18h54 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  18h06

Behzod Abduraimov et Robert Trevino à la tête du Sinfonia Varsovia ont donné un Concerto N° 1 pour piano et orchestre de TchaÏkovsky qui fera date (Photo Florian Burger)
Behzod Abduraimov et Robert Trevino à la tête du Sinfonia Varsovia ont donné un Concerto N° 1 pour piano et orchestre de TchaÏkovsky qui fera date (Photo Florian Burger)

Des enregistrements intéressants du «Concerto pour piano et orchestre n° 1» de Tchaïkovsky, il y en a des dizaines. Pléthore même. Citons parmi eux les duos pianos-chefs tels que Argerich/Dutoit, Weissenberg/Karajan, Fetsman/Rostropovitch, Lang Lang/Barenboim, Alice Sara Ott (qui sera à La Roque mardi)/ Thomas Hengelbrock, Ashkenazy/Maazel, ou encore Trifonov (présent à la Roque cette semaine)/Gergiev. Aussi attendait-on cette nouvelle association du pianiste Behzod Abduraimov et du chef d’orchestre Robert Trevino comme un passionnant élément de comparaison. Ce fut tout simplement un concert choc, une de ces soirées musicales dont on ressort éblouis, fascinés, en miettes. Dès les premières notes de l’Allegro non troppo e molto maestoso on comprend que l’on va assister à un événement. Cela se confirme très vite et pourtant l’on a encore rien perçu de la grandeur de ce qui va suivre. Au piano Behzod Abduraimov (24 ans à peine) déploie sa virtuosité, son intelligence de lecture de l’œuvre, pour offrir un Concerto sublime et sublimé du Tchaïkovsky comme on ne l’entend jamais. Notamment dans le 1er mouvement que l’on joue en général de manière assez russe, ampoulée, solennelle, en excluant de l’ensemble son aspect poétique. Avec ce supplément d’âme qui signale les artistes majeurs, Abduraimov ne se contente pas d’effacer une à une les difficultés de la partition mais propose d’en nuancer tous les aspects en offrant une palette infinie de couleurs. Quant aux 2e et 3e mouvements joués de manière rageuse, lyrique, grandiose, ils semblent, ainsi donnés, s’apparenter à une symphonie de Mahler, solaire et tragique. Mais dans un concerto avec orchestre pour réussir son pari il faut être deux. A la tête du Sinfonia Varsovia tenant ses musiciens avec force et sympathie Robert Trevino s’est montré exceptionnel lui aussi. Preuve que La Roque et son directeur artistique René Martin proposent aussi de découvrir non seulement de jeunes pianistes mais de nouveaux chefs. Gageons en effet que Robert Trevino sera demain l’un des très grands directeurs d’orchestre appelé à diriger les formations les plus prestigieuses du monde. Son association avec Abduraimov relevait du miracle, tout comme après l’entracte sa direction de la 5e symphonie de Tchaïkovsky donnée avec un maximum de sobriété et une fougue hors du commun. Un très beau travail des cordes, le refus d’une lecture monolithique de l’œuvre là encore un immense moment qui a laissé le public ivre de bonheur.
Jean-Rémi BARLAND

Articles similaires

Aller au contenu principal