On a vu au Grand Théâtre de Provence : il n’y a pas que le cul dans la vie, il y a aussi la tendresse, bordel !

Publié le 15 novembre 2014 à  11h42 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  18h25

Le « dodo collé » final, un tableau étonnant de délicatesse et de tendresse (Photo D.R.)
Le « dodo collé » final, un tableau étonnant de délicatesse et de tendresse (Photo D.R.)

N’étant pas un habitué des spectacles de danse, c’est certainement mon côté « voyeur refoulé» qui m’a conduit, vendredi soir, au Grand Théâtre de Provence pour découvrir « Un peu de tendresse bordel de merde » ou hommes et femmes dansent nus, totalement, sur une chorégraphie de Dave St.-Pierre. Déjà, s’appeler Saint-Pierre et laisser se balader à l’air libre seins, culs et quequettes avait un petit quelque chose de provoquant qui me plaisait bien. Mais je dois l’avouer, je suis entré dans la salle à reculons, si j’ose dire, et j’en suis ressorti avec la banane et riche d’une nouvelle expérience de vie. Non point que je me sois dépoilé pour balader ma bedaine au milieu des abdominaux des danseurs, mais parce que ce spectacle, parfois cru, réjouit tout en interpellant. Il réjouit parce que ces hommes à poil, perruques blondes sur la tête, qui grimpent dans la salle sur les appuis coudes des fauteuils en caressant les têtes de spectateurs, en émettant de petits sons et, parfois, comme derrière moi ce soir là, s’allongeant sur les genoux de quatre spectatrices, c’était plutôt amusant. Et ils ont du talent, les bougres, pour éviter en permanence le contact qui pourrait être fatal avec leurs parties… Un grand moment.
Ce qui est intéressant, c’est que cette nudité, loin d’être un répulsif, devient une façon de se mettre la salle dans la poche. Et, croyez-moi, à la fin du spectacle, toutes générations confondues, les applaudissements étaient forts nourris. Ce qui fait aussi la force du spectacle, c’est que la nudité humanise le rapport entre la scène et la salle et qu’elle est employée à bon escient pour marquer les temps forts du show. Ce show, il est orchestré par la maîtresse de cérémonie, Sabrina, une dominatrice frustrée qui, si elle ne le fait pas, pourrait fouetter le spectateur si besoin était. Elle qui a «laissé toute cette merde de taureau de tendresse loin derrière-elle» n’aspire pourtant finalement qu’à une chose, un «dodo collé». Le texte est cru, désopilant dans une traduction faussement naïve et chargée de sens pour qui veut l’entendre. Neuf mecs à poil, assis en fond de scène et qui simulent une fellation avec leur perruque blonde devant leur sexe, le ton est donné. Soumission, vulnérabilité, machisme, féminisme, tout est évoqué ici avec plus ou moins de violence. Même l’exclusion et le rejet de l’Autre sont abordés avec l’arrivée non désirée d’une rouquine au milieu des blondes «couillues». Bon, je ne vais pas tout vous raconter, non mais!
Simplement dire, aussi, que ce spectacle est une réelle performance artistique avec une chorégraphie certes débridée, mais très physique, qui offre de beaux moments, notamment les pas de deux, et un final irréel, somptueux, magique et poétique, celui de la tendresse triomphante avec ce fameux «dodo collé» pour les couples alors que Sabrina se retrouve seule. Rien que pour ça, il faut courir voir ce spectacle «made in Québec» né il y a six ans déjà…

Michel Egéa

Autre représentation ce samedi 15 novembre à 20 h 30 au Grand Théâtre de Provence. Réservations au 08 2013 2013. Attention, n’arrivez pas en retard et si vous entendez parler joual derrière vous, c’est normal.

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